Fil d'Ariane
L’Union européenne va-t-elle maintenir une présence militaire au Sahel ? Alors que l’opération Barkhane doit prendre fin et que la task-force Takuba a été vivement critiquée par la junte militaire ayant pris le pouvoir au Burkina Faso, la question sécuritaire sera un enjeu primordial du sommet entre l’Union européenne (UE) et l’Union africaine (UA). Il se déroulera les 17 et 18 février à Bruxelles.
La veille, le mercredi 16 février au soir, aura lieu un dîner à l'Élysée entre les différents partenaires du Sahel, et des institutions européennes, à la demande du président français, Emmanuel Macron.
Ont en effet été invités à l'Élysée les présidents des pays du G5 Sahel: le Niger, le Tchad et la Mauritanie, à l'exception du Mali et du Burkina Faso, suspendus des instances de l'Union africaine à la suite de coups d'Etat. Seront également présents les dirigeants des pays d'Afrique de l'Ouest, en particulier ceux bordant le golfe de Guinée (Côte d'Ivoire, Ghana, Togo et Bénin), confrontés à une menace terroriste grandissante.
Du côté européen, l'Elysée accueillera les présidents du Conseil européen Charles Michel et de la Commission Ursula Von der Leyen, le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, ainsi que les dirigeants des pays participant ou soutenant les différentes opérations sur le terrain comme Takuba (forces spéciales), EUTM (formation militaire) ou la mission de l'ONU Minusma. Le chef du gouvernement italien Mario Draghi sera présent, mais pas le chancelier allemand Olaf Scholz.
Les invités discuteront de la présence militaire au Sahel, en particulier au Mali, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Selon l'Élysée, des annonces seront faites à la suite de ce dîner, alors que la junte militaire au pouvoir à Bamako presse Paris et ses partenaires européens de se retirer militairement du Mali.
Selon un communiqué de l’Élysée, “il n'est pas concevable” de maintenir un partenariat avec un état “qui est aujourd'hui adossé à une milice et qui a recours à ces activités mercenariales”, en parlant du groupe de mercenaires russes Wagner, présent au Mali.
Sur un éventuel retrait du Mali, "la question est ouverte, elle n'est pas tranchée", a précisé l'Elysée. Mais tous les pays "sont préoccupés par la fuite en avant des autorités de transition maliennes" et expriment "un scepticisme de plus en plus grand pour maintenir leur engagement" dans le pays.
Il y a toutefois "une volonté collective de rester engagé dans la durée au Sahel", dont les pays sont "demandeurs de davantage d'appui et de partenariat", selon la présidence.
Reste à définir pour la France et l’Union européenne les contours d’un futur dispositif militaire régional, essentiellement dans la zone dite “des trois frontières”.
Mais d’autres enjeux seront également abordés par les dirigeants africains et européens. Au terme de ce sommet, les participants devraient adopter une déclaration conjointe pour une vision commune de la collaboration entre les deux continents d’ici 2030. Investissements, santé, climat… Quels seront les thèmes discutés au Sommet Union européenne - Union africaine ? Tour d’horizon.
Emmanuel Macron avait annoncé en décembre 2021 vouloir mettre en place un « new deal financier » entre l’UE et l’UA. Alors que la France a pris la présidence tournante de l’UE au début de l’année 2022, le président français avait affirmé sa volonté de « réviser complètement » la relation entre l’UE et l’UA. Il souhaite notamment « renforcer les investissements dans les économies africaines. »
Actuellement en tournée en Afrique, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a présenté à Dakar la nouvelle stratégie d’investissements de l’UE, Global Gateway. Elle est mise en place afin de faire face à l’influence de la Chine sur le continent, via ses Nouvelles routes de la soie. Elle a ainsi annoncé plus de 150 milliards d’euros pour alimenter des projets d’infrastructures en Afrique, d’ici 2027.
(Re)lire : Pour contrer l'influence de la Chine et de la Russie, l'UE promet à l'Afrique 150 milliards d'eurosCette somme sera principalement destinée à la réduction des risques de catastrophe naturelle, aux énergies renouvelables, aux transports, à l’éducation et à l’accès à internet. La présidente de la Commission européenne a également affirmé que « les investissements seront au cœur des discussions » entre les dirigeants des deux continents à Bruxelles.
Au total, pas moins de sept thèmes seront discutés lors de ce sommet, autour de sept tables rondes.
En effet, le continent africain subit les conséquences du réchauffement climatique, alors qu’il n’est responsable que de 4% des émissions de gaz à effet de serre. Lors de la COP26, qui s’est déroulée à l’automne 2021 à Glasgow, le négociateur Tanguy Gahouma-Bekalé avait urgé les pays occidentaux à respecter leur engagement pris lors de l’accord de Paris. L’Accord prévoit la dotation d‘un fond de 100 milliards de dollars pour aider les pays en développement, notamment les pays d’Afrique, à faire face à la crise climatique. Mais ce fond n’était toujours pas opérationnel au moment de la COP26.
Il revient à l’Union africaine d’établir la liste des pays du continent africain conviés au sommet. De ce fait, les pays qui en ont été exclus ne seront pas de la partie. Parmi eux, le Mali. Le Premier ministre de transition du pays, Chogel Maïga, ainsi que quatre autres responsables, s’est vu imposer des sanctions de la part de l’Union européenne. Ils sont accusés de faire obstacle à la transition démocratique du pays.
(Re)lire : Mali : le premier ministre et quatre autres responsables sanctionnés par l'Union EuropéenneLa Guinée, le Soudan et le Burkina Faso, dont les gouvernements ont récemment été renversés par des militaires putschistes, ne seront pas au sommet non plus. L’Union africaine les a suspendus pour douze mois.