Rapport Stora : l’Algérie réclame "la reconnaissance des crimes coloniaux" de la France

Après la publication du rapport de l'historien français Benjamin Stora sur la réconciliation mémorielle entre les deux pays, le gouvernement algérien a réclamé ce lundi "la reconnaissance des crimes coloniaux" de la France, par la voix de son porte-parole Ammar Belhimer.

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Alger, le 19 mai 1958
Manifestation pour l'indépendance, 19 mai 1958, Alger. (AP Photo)
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"La résistance de la France à ne pas reconnaître ses crimes a ses raisons. Elles sont connues de ceux qui ont la nostalgie du passé colonial et l'illusion de l'Algérie française", explique M. Belhimer dans un entretien accordé au journal gouvernemental arabophone El Massa lundi 8 février. Il a également ajouté que "le criminel fait généralement l'impossible pour éviter d'admettre ses crimes, mais cette politique de fuite en avant ne peut pas durer".

M. Belhimer salue la remise par Paris des restes de 24 résistants algériens tués au début de la colonisation française au XIXe siècle, en juillet dernier, mais il estime que "l'accomplissement moral le plus important est la reconnaissance des crimes coloniaux de la France".

Le porte-parole du gouvernement algérien, et ministre de la Communication, s'abstient de citer nommément le rapport Stora mais il répond à une question sur le dossier de la mémoire entre les deux rives de la Méditerranée.

Spécialiste reconnu de l'histoire contemporaine de l'Algérie, Benjamin Stora a été chargé en juillet par le président Emmanuel Macron de "dresser un état des lieux juste et précis du chemin accompli en France sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d'Algérie".

C'est la première fois qu'un membre du gouvernement algérien réagit - même de façon  indirecte - aux préconisations de l'historien français, publiées le 20 janvier.

Ni le président Abdelmadjid Tebboune, soigné en Allemagne pour des "complications" post-Covid, ni le directeur des archives nationales Abdelmadjid Chikhi, chargé d'un travail parallèle sur la question mémorielle, ni le ministre des Anciens combattants ne se sont encore exprimés sur le sujet.

En revanche, la puissante Organisation officielle des moudjahidine, les anciens combattants de la guerre d'indépendance, a rejeté le document qui "a omis d'aborder (...) les différents crimes coloniaux perpétrés par l'Etat français".

Le rapport de l'historien français continue de soulever une avalanche de critiques, aussi bien en Algérie qu'en France, notamment pour ne pas avoir préconisé des "excuses" de la part de l’État français.

(RE)voir :  Rapport Stora : "C'est un déni de justice, un déni de vérité"

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Dans un entretien dimanche avec le quotidien algérien L'Expression, M. Stora s'est défendu d'être opposé à "la présentation d'excuses de la France à l'Algérie pour les massacres commis" pendant la période coloniale.

Emmanuel Macron s'est engagé à prendre des "actes symboliques" pour apaiser les mémoires sur la colonisation et la guerre d'Algérie (1954-1962) mais a exclu de présenter les "excuses" demandées par Alger. Lors d’un entretien accordé au journaliste Khaled Drareni, Emmanuel Macron, alors candidat à la présidence de la République, avait défini la colonisation comme un crime.