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RDC : en Ituri, zones d'ombre autour d'une nouvelle flambée de violence

Que s'est-il passé la semaine dernière dans la région de l'Ituri dans le nord-est de la République démocratique du Congo ? Des affrontements entre communautés Hema et Lendu auraient fait plus de 160 morts. Mais les circonstances et les bilans restent flous.
Des corps découverts dans la brousse. 161 morts au total. Le chiffre est livré par des représentants locaux de la société civile dans le territoire de Djugu. Les 21 premiers cadavres ont été trouvés samedi 15 juin. 140 autres suivront le lendemain.
Un responsable local joint par nos soins ne confirme pas ce bilan mais évoque néanmoins "96 victimes confirmées entre le lundi 10 et le vendredi 14 juin. Une cinquantaine d'autres personnes auraient été tuées entre vendredi et samedi à Mahagi et des vérifications sont en cours". Les victimes vivaient dans la plupart des cas dans les zones habitées par les ressortissants de l’ethnie hema. 

Si les bilans restent flous, tout le monde s'accorde à reconnaître le caractère dramatique des événements survenus la semaine dernière en Ituri. Tout le monde, jusqu'au sommet de l'Etat. C'est en effet par un tweet que le président Félix Tshisekedi a fait part de sa consternation ce mardi.
 

Dans la journée de lundi, des jeunes de la région avaient manifesté pour réclamer la venue sur place du chef de l'Etat.

Représailles

Que sait-on des causes de ces violences après plusieurs mois d'accalmie ? Selon le responsable local que nous avons joint, un commerçant de la communauté lendu aurait été tué le lundi 10 juin dans une localité à une trentaine de kilomètres de Bunia, la "capitale" de l'Ituri. Les Hema nient toute responsabilité et affirment qu'il s'agit d'un coup monté destiné à justifier les massacres qui ont suivi en représailles. Accusations démenties côté Lendu.

Pour sa part, l'armée congolaise rapporte qu'un groupe armé serait à l'origine de la flambée de violences. Les FARDC évoquent un certain Ngudjolo, mais qui -précision nécessaire car l'homonymie est déjà commentée sur les réseaux sociaux- n'aurait rien à voir avec Mathieu Ngudjolo Chui, un ancien militaire devenu chef de milice lendu. Il a été acquitté en 2012 par la Cour pénale internationale où il comparaissait pour des crimes commis en Ituri au début des années 2000.
A l'époque, déjà, l'Ituri est le théâtre d'affrontements entre Lendu et Hema. La vieille rivalité s'est transformée en guerre sanglante entre les deux communautés exploitées par certains protagonistes du conflit régional dont la RDC est le théâtre de 1998 à 2003. L'un des points d'orgue sera en février 2003 l'attaque du village à majorité hema de Bogoro qui vaudra à Mathieu Ngudjolo Chui son transfèrement vers la CPI, aux côtés de Germain Katanga, mis en cause dans le même massacre. 

Depuis lors, l'Ituri reste une poudrière et les violences n'ont jamais vraiment cessé entre les deux communautés. En mars 2018, autour de Djugu, des dizaines de personnes avaient été tuées dans des affrontements.
Ces dernières semaines, la situation s'était apaisée et, début 2019, tous avaient participé à un "dialogue intercommunautaire" sous l'égide de la MONUSCO. Mais depuis deux semaines, l'Ituri sombre à nouveau. Le Haut commissariat de l'ONU aux réfugiés estime ce mardi 18 juin que les violences de ce mois de juin ont déjà fait 300.000 déplacés.