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L'"état de siège" annoncé vendredi 30 avril en République démocratique du Congo dans deux provinces de l'Est, pour lutter contre les massacres de civils par des groupes armés, suscite espoirs et inquiétudes. Dans le pays, une partie de l'armée régulière est en effet accusée d'affairisme et de violations des droits humains.
#RDC: Le Président Tshisekedi a proclamé, conformément à ses prérogatives constitutionnelles, l'état de siège sur toute l'étendue des provinces de l'Ituri et du Nord Kivu. pic.twitter.com/oRxPlPSSVc
— Présidence RDC (@Presidence_RDC) May 3, 2021
Dans ces deux provinces riches en minerais, les groupes armés tuent des civils par centaines, provoquant des fuites de population (plus d'un million de déplacés en Ituri, d'après le plaidoyer du Haut commissariat aux réfugiés de l'ONU).
Epicentre des violences à l'Est, le territoire de Beni à la frontière de l'Ouganda est le fief du groupe armé des Forces démocratiques alliées (ADF), accusé du massacre de milliers de civils depuis 2014.
A l'origine des rebelles musulmans ougandais, les ADF sont une organisation "terroriste" affiliée à l'Organisation état islamique, ont récemment décrété les Etats-Unis.
Samedi 1er mai dans la soirée, un responsable musulman, le cheikh Ali Amin, a été tué par "des bandits" qui "ont tiré sur lui" dans la principale mosquée de la ville "pendant la prière du soir" en plein mois de ramadan, a indiqué un officiel, Aloise Mbwarara. Le cheikh avait pris position contre les ADF.
Au total, 122 groupes armés sont encore actifs dans l'Est de la RDC, estime le Baromètre sécuritaire du Kivu (KST).
L'Association congolaise pour l'accès à la justice (Acaj) "salue" également l'annonce du chef de l'Etat mais "demande au Parlement d’adopter" en urgence une loi "pour prévenir des abus" liés à l'état de siège.
"Si l'armée doit avoir plus de pouvoir, elle doit être irréprochable!", prévient aussi le mouvement citoyen Lutte pour le changement (Lucha).
État de siège : Notre analyse et nos propositions. @Presidence_RDC @cibalanky pic.twitter.com/CfT0nPRC3a
— LUCHA (@luchaRDC) May 2, 2021
Ce n'est pas le cas. Dans son dernier rapport mensuel, le bureau conjoint des Nations unies des droits de l'homme (BCNUDH) a enregistré "une augmentation de 32%" des atteintes aux droits de l'homme en mars par rapport à février (655 au total).
"Cette augmentation s'explique par une forte hausse (+127%) du nombre de violations attribuables à des militaires", selon le BCNUDH.
A mots plus ou moins couverts, des officiels sont accusés de duplicité avec les groupes armés dans l'Est du pays. L'"état de siège" risquerait donc de faire reculer les droits humains dans les zones concernées, s'inquiètent des observateurs.
Ce n'est pas le premier effet d'annonce du président Tshisekedi face à l'insécurité dans l'Est. Le chef de l'Etat a déjà annoncé deux "opérations militaires d'envergure", en territoire de Beni en novembre 2019 et en Ituri en juillet 2019.
A Beni, l'offensive de l'armée contre les bases des ADF s'est soldée par des représailles sanglantes des ADF sur les civils (plus de 1.000 personnes massacrées depuis novembre 2019).
L'annonce de l'"état de siège" a été faite vendredi lors du premier Conseil des ministres depuis l'investiture du nouveau gouvernement lundi.
Le président Tshisekedi est en position de force sur le plan interne, après avoir renversé en sa faveur au Parlement la majorité autrefois fidèle à son prédécesseur Joseph Kabila.
Soutenu par les Etats-Unis, le président congolais a également demandé à la France de l'aide dans sa lutte contre les ADF.