Des camions à perte de vue, presque à l'arrêt. Nous sommes sur le corridor qui mène au poste frontière de Kasumbalasa dans le Haut-Katanga, et au bout du chemin la Zambie. Un corridor totalement engorgé. Pour faire quatre-vingt-dix kilomètres, ces chauffeurs mettent sept jours en moyenne.
Ça fait sept jours que je ne me suis pas lavé faute de douche. Même si tu veux uriner, tu ne sais pas où le faire, mais si tu le fais dans ces canalisations les militaires t'arrêtent et te demandent vingt voire trente dollars.
Djumbe Hassan, chauffeur
Un manque d'infrastructures et de fluidité presque absurde lorsqu'on sait que Kasumbalesa est la porte de sortie de la production minière de la région. Dans ces camions, il y a du cobalt, du cuivre, bref le gros de la richesse du pays. Une situation à laquelle Joseph Kabila a promis de remédier. Le 1 er juin dernier, le président congolais a inauguré un port sec censé tout désengorger.
Kasumbalesa va être un véritable levier de l'essor économique de la RDC. C'est comme tout port, la construction d'un port génère en fait des dividendes et des retombées sur tous les plans.
Patient Sayiba, Directeur Général de l'Ogefrem (Office de Gestion du Fret Multimodal)
Des retombées économiques donc mais quid de la lutte contre la corruption, endémique à ce poste frontière. Ici le sport national, c'est la fraude sur le poids des minerais tranportés. Le gouvernement avait pourtant installé des ponts à bascule, censés peser au gramme près la cargaison de chaque camion. Mais depuis trois ans, ils sont en panne, selon la Ligue Congolaise de Lutte contre la Corruption.
"On nous avait dit effectivement qu'il y avait des problèmes, des problèmes d'installations et ces problèmes devraient coûter à peu près 50 000 dollars pour réparer les pompes à skil. Mais malheureusement jusqu'à preuve du contraire, ces pompes à skil ne fonctionnent toujours pas", explique Ernest Mpararo, Président de la Ligue Congolaise contre la Corruption et la Fraude.
Chaque année selon lui, entre cent et deux cent millions de dollars s'évaporent dans les poches de quelques-uns. La Licoco (Ligue congolaise de lutte contre la corruption) ne croit pas que le port sec promis par Joseph kabila, y changera quoi que ce soit.
Nous l'affirmons étant donné que le système qui est mis en place est un système presque institutionnalisé, ce sont les autorités locales ou les autorités provinciales ou les autorités nationales qui sont impliquées dans cette fraude ou dans la corruption au poste frontalier de Kasumbalesa.
Ernest Mpararo, Président de la Ligue Congolaise contre la Corruption et la Fraude
La construction du port sec de Kasumbalesa nécessitera près de 300 millions de dollars d'investissement et devrait être opérationnel en 2021.