Fil d'Ariane
Le projet de loi du gouvernement britannique visant à expulser au Rwanda des migrants arrivés illégalement au Royaume-Uni est "incompatible" avec les obligations du pays en matière de droits humains, alerte une commission parlementaire britannique.
Le Premier ministre britannique Rishi Sunak quitte le 10 Downing Street pour assister à la session hebdomadaire des questions des Premiers ministres au Parlement de Londres, le 7 février 2024.
Le Premier ministre conservateur Rishi Sunak a fait de ce projet le socle de sa politique de lutte contre l'immigration clandestine. Il espère pouvoir le mettre en application avant les élections législatives prévues cette année. Mi-janvier, il l'a qualifié de "priorité nationale urgente".
Mais ce projet très controversé, débattu actuellement à la Chambre des Lords - la chambre haute du Parlement - cette semaine, est critiqué aussi bien par le chef de l'Église anglicane que par les Nations unies.
Une commission parlementaire, composée de douze membres, des travaillistes et des conservateurs des deux chambres du Parlement, juge dans un rapport publié lundi le projet "fondamentalement incompatible" avec les obligations du Royaume-Uni en matière de droits humains. Le projet de loi a été rédigé en réponse à la Cour suprême britannique, qui a jugé illégal d'envoyer des migrants au Rwanda, estimant que le pays ne pouvait être considéré sûr pour eux.
Adossé à un nouveau traité entre Londres et Kigali, le texte définit le Rwanda comme un pays tiers sûr et empêche le renvoi des migrants vers leurs pays d'origine. La commission s'inquiète en particulier de "l'obligation pour les tribunaux de considérer le Rwanda comme un pays 'sûr' et de la limitation de l'accès aux tribunaux pour faire appel des décisions".
De plus, il n'est "pas clair" que les migrants expulsés vers le Rwanda puissent avoir "la garantie" de ne pas être envoyés dans un pays où ils pourraient être persécutés. "Les droits humains sont universels", souligne la Commission. Mais le projet de loi "porte atteinte à ce principe essentiel en refusant à un groupe particulier (les migrants expulsés, NDLR) les protections garanties par la loi sur les droits humains".
Avec ce projet, des organismes publics seraient "autorisés à agir en violation de la Convention européenne des droits de l'homme", alerte la Commission. "Si le Royaume-Uni adopte une législation qui ne respecte pas ses propres engagements internationaux en matière de droits humains, cela nuira gravement à sa capacité d'influencer les autres pays pour qu'ils respectent le droit international", écrit-elle encore dans ce rapport.
Le projet divise au sein même du parti conservateur, des élus ayant critiqué le texte, alors que d'autres ont réclamé un durcissement. Ces derniers avaient tenté en vain de l'amender avant son adoption par les députés.