Sénégal : "des anomalies" dans les finances publiques sous l'ex-président Macky Sall

La Cour des comptes sénégalaise pointe des "anomalies" dans la gestion des finances publiques sous Macky Sall. Son rapport, publié le 12 février 2025, met en doute les chiffres officiels sur la dette et le déficit. Le FMI a suspendu son aide en attendant des clarifications.

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Le président sénégalais Macky Sall lors d'une réunion

Le président sénégalais Macky Sall lors d'une réunion avec une délégation de dirigeants et de hauts fonctionnaires africains à Saint-Pétersbourg, en Russie, le samedi 17 juin 2023.

(Evgeny Biyatov/Agence hôte photo RIA Novosti via AP)
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Des "anomalies" et des "manquements" ont été décelés dans la gestion des finances publiques au Sénégal entre 2019 et 2024, sous l'ex-président Macky Sall. C'est ce qu'a relevé mercredi 12 février 2025 la Cour des comptes dans un rapport qui pourrait influencer les relations futures entre Dakar et ses partenaires, notamment le FMI.

Ce document est publié après que le régime de Macky Sall (2012-2024) a été accusé fin septembre par le Premier ministre Ousmane Sonko d'avoir falsifié les chiffres des finances publiques. Selon lui, des données erronées auraient été communiquées aux partenaires internationaux, notamment sur la dette et le déficit budgétaire.

Un endettement plus élevé qu'annoncé

"L’encours total de la dette de l'administration centrale budgétaire s'élève à 18 558,91 milliards de FCFA, au 31 décembre 2023, et représente 99,67 % du PIB", un taux "supérieur" au montant annoncé par le précédent régime, indique le rapport couvrant la période de 2019 au 31 mars 2024.

Le déficit budgétaire annoncé par l'ex-gouvernement "est inférieur à celui reconstitué par la Cour" des comptes, une juridiction indépendante du gouvernement, ajoute le document.

(Re)voir Les conclusions de l'audit sur les finances publiques au Sénégal

Le chiffre "recalculé" par la Cour pour l'année 2023 est par exemple de 12,3 % contre 4,9 % annoncé.

Ousmane Sonko avait fin décembre décrit une situation des finances publiques "catastrophique", avec, selon lui, un déficit budgétaire atteignant 10,4 % du PIB et une dette publique représentant 76,3 % du PIB.

Des incohérences et des financements hors budget

La Cour dit avoir constaté "des discordances sur l’encours de la dette publique, des anomalies dans les surfinancements (de projets opérés par l'État) et des manquements dans la gestion de (ses) dépôts" bancaires.

Elle pointe aussi "une dette bancaire importante contractée hors circuit budgétaire" et "non retracée dans les comptes de l'État", ainsi que des "tirages sur ressources extérieures supérieurs à ceux affichés" par l'ex-gouvernement.

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Un porte-parole du FMI avait confirmé début novembre à l'AFP que le Fonds avait suspendu son programme d'aide actuel "en attendant que la Cour des comptes (sénégalaise) valide le rapport d'audit", dont le gouvernement a présenté les conclusions fin septembre.

Le FMI n'ouvrira pas de discussion sur un nouveau programme "avant que la situation ne soit clarifiée par les autorités sénégalaises", avait précisé le porte-parole.

Critiques de l'opposition et réaction du nouveau pouvoir

"On se demande où était la Cour" des comptes pendant la période contrôlée, a réagi Youssou Diallo, un soutien de l'ancien président Macky Sall, joint mercredi par l'AFP.

"L'ensemble des dirigeants de la Cour doivent démissionner. Ce sont des institutions qui fonctionnent au gré de ceux qui sont au pouvoir", a-t-il poursuivi, sans se prononcer sur le fond du rapport.

(Re)voir Sénégal : la reddition des comptes a commencé

Le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye, élu en mars, prône la rupture avec le système. Il a nommé chef de gouvernement Ousmane Sonko, qui aurait dû être à sa place s'il n'avait été déclaré inéligible.

Le nouveau pouvoir a présenté mi-octobre un plan de développement pour les cinq prochaines années, s'inscrivant dans une stratégie à 25 ans.