Bataille de juridictions Ils se livrent une guerre sans merci. Les avocats de la défense et ceux de l’Etat sénégalais ne sont pas d’accord sur la légitimité de la Cour de Répression de l’Enrichissement Illicite (CREI), appelée à juger le fils de l'ancien président sénégalais. C'est pourquoi le procès de Karim Wade, qui avait repris du 4 au 6 août dernier, avait été suspendu, jusqu'à ce lundi 18 août. Les avocats de la défense avancent que cette cour n'est pas compétente pour juger des anciens ministres et qu’il faudrait s’en remettre à la Haute Cour de Justice. Pour Assane Dioma Ndiaye, avocat et président de la Ligue sénégalaise des Droits humains, "il n'y avait aucune raison de faire appel à cette juridiction (la CREI, ndlr) qui n'a pas fonctionné depuis longtemps". De fait, en dormance depuis plusieurs années, celle-ci a été réactivée par Macky Sall après son élection à la présidence, en avril 2012. Les avocats défenseurs des intérêts de l'Etat rétorquent, eux, que la CREI est "toujours comprise dans l’ordonnancement juridique du Sénégal". Selon leurs arguments, même si elle n'est, en principe, pas habilitée à juger d'anciens ministres, le cas de Karim Wade fait exception. En effet, les faits reprochés au fils de l'ancien président s’étalent sur une période allant de 2000 à 2012, durant laquelle il a été successivement conseiller, puis ministre de son père. Durant ces douze années, Karim Wade a été ministre seulement trois ans, ce qui, pour les avocats de l'Etat, ne suffit pas pour comparaître devant la Haute Cour de Justice. De plus, selon le site d’information Afrik.com, l’accusation évoque les incohérences de la défense : "Si elle estime que la CREI n’existe pas, alors pourquoi s’est-elle adressée à elle pour lui demander d’accorder à Karim Wade une liberté provisoire ?" Sidiki Kaba, ministre sénégalais de la Justice, a, lui aussi, réagi sur la remise en cause de la compétence de la CREI.
Sur la Radio Télévision sénégalaise, il a rétorqué que "Le système judiciaire sénégalais est fiable. La preuve, l’Afrique demande au Sénégal de juger Hissène Habré (dictateur tchadien accusé de milliers d’assassinats politiques et de torture entre 1982 et 1990, ndlr). Si la justice sénégalaise a été choisie, c’est parce qu’elle est crédible."