Sénégal : trois sages-femmes condamnées dans l’affaire Astou Sokhna

Astou Sokhna est morte enceinte à l’hôpital en attendant qu’on lui donne les soins qu’elle réclamait en vain. Trois sages-femmes ont été condamnées ce 11 mai à six mois de prison avec sursis pour "non-assistance à personne en danger". L’affaire a provoqué une vague d’indignation. Le président sénégalais Macky Sall a promis une enquête.
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capture d'écan manif mort Astou Sokhna
Manifestations de protestation contre le décès d'Astou Sokhna à Louga, Sénégal, en avril 2022.
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Les six sages-femmes inculpées ont été auditionnées ce 11 mai au tribunal de Louga, au nord de Dakar. Trois ont été condamnées et trois ont été relaxées. Ce drame a suscité une vague d'indignation sur les réseaux sociaux contre les carences du système de santé publique, jusqu'à provoquer des réactions au plus haut niveau de l'État.

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Attente de 20 heures pour une césarienne

Astou Sokhna, mariée et enceinte de neuf mois, est décédée à l'hôpital de Louga le 1er avril après ce que la presse locale a présenté comme une longue agonie et un déni de soin. La jeune femme, qui avait 34 ans selon un avocat de la partie civile, a attendu pendant une vingtaine d'heures la césarienne qu'elle réclamait.

Le personnel aurait refusé sa demande, arguant que son opération n'était pas prévue, et aurait menacé de la chasser si elle insistait.

Ce 11 mai, le jugement a été prononcé en présence des six prévenues et de nombreuses agentes de santé venues apporter leur soutien à leurs collègues poursuivies.

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Les trois femmes condamnées avec sursis étaient de garde la nuit où Astou Sokhna a été admise à l'hôpital, a indiqué un de leurs avocats, Me Abou Abdou Daff. Les trois autres étaient de garde pendant la journée. Le parquet avait requis lors du procès le 27 avril un an de prison dont un mois ferme contre quatre des six prévenues et la relaxe pour les deux autres.

"Nous ne connaissons pas la motivation du tribunal (pour condamner les trois sages-femmes). Nous allons apprécier pour faire éventuellement un recours", a ajouté Me Daff. Présent dans la salle d'audience au moment du verdict, le mari de Mme Sokhna, Modou Mboup, a déclaré s'attendre à "un autre" jugement. 

« Si nous restons les bras croisés, il pourrait y avoir d'autres Astou Sokhna »

"Nous ne contestons pas, bien que nous ayons le cœur meurtri, mais nous nous attendions sérieusement à un autre" jugement, a-t-il confié. "Personnellement, je vais m'arrêter là. Les avocats (de la partie civile) vont voir s'ils vont continuer la procédure", a-t-il ajouté.

"Nous avons mis en exergue ce que tous les Sénégalais déplorent dans les hôpitaux. C'est une victoire. Si nous restons les bras croisés, il pourrait y avoir d'autres Astou Sokhna", a ajouté l’époux de la victime, Modou Mboup, en allusion aux accusations de "négligence" visant le personnel médical. Il a précisé que sa défunte épouse "respectait ses rendez-vous, l'échographie, les analyses".

Ce que nous voulions, et le tribunal nous a suivi, c'est une déclaration de culpabilité. Un avocat de la partie civile, Ameth Moussa Sall

La nuit du drame, "je l'ai amenée à 09H30 à l'hôpital. À part la perfusion, je n'ai pas vu autre chose qu'on lui ait administré jusqu'à son décès à 05H00. Si elles (les sages-femmes) avaient fait ce qu'elles devaient faire, peut-être que ça ne se serait pas passé comme ça", ajoute-t-il. Un avocat de la partie civile, Ameth Moussa Sall, a indiqué ne pas être "déçu". "L'objectif de la partie civile n'était pas de faire condamner à de la prison ferme. Ce que nous voulions, et le tribunal nous a suivi, c'est une déclaration de culpabilité".

Il a indiqué avoir déposé ce même jour une nouvelle plainte visant les six sages-femmes, une gynécologue de l'hôpital de Louga et la direction de ce même hôpital ainsi que l'État du Sénégal pour "homicide et faux et usage de faux". "Nous avons demandé que l'État soit tenu civilement responsable", a-t-il ajouté.

Autre scandale dans l’hôpital public 

Face au tollé provoqué par la mort de Madame Sokhna, le président sénégalais Macky Sall avait publié un message de condoléances et donné pour instruction de déterminer les responsabilités.

Le ministre de la Santé, Abdoulaye Diouf Sarr, a reconnu le 14 avril que la mort de cette jeune femme aurait pu être évitée avec plus de vigilance. Le directeur de l'hôpital a été révoqué et remplacé depuis.

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Une autre affaire dans un hôpital public a fait scandale récemment. À Kaolack dans le centre du pays, un nourrisson déclaré mort vendredi 6 mai par une infirmière puis déposé à la morgue a été ensuite retrouvé vivant par son père quelques minutes après, avant de finalement décéder dans la journée, selon la presse locale. Le parquet a annoncé le 8 mai avoir ouvert une enquête. L'infirmière a été déférée le 11 au parquet après quatre jours de garde à vue.