Les combats sont entrés, samedi 22 avril, dans leur deuxième semaine au Soudan. Les violents affrontements entre l'armée régulière et les paramilitaires ont fait des centaines de morts et des milliers de blessés. Les multiples appels au cessez-le feu ont été ignorés.
Dans la nuit de vendredi 21 à samedi 22 avril, les fortes explosions qui ont secoué la capitale, Khartoum, ces derniers jours ont diminué. Mais dès le matin, les échanges de tirs ont repris, rapportent des témoins.
Pourtant, la veille, l'armée a annoncé avoir "
accepté un cessez-le-feu de trois jours" pour la fête de l'Aïd al-Fitr, qui marque la fin du mois sacré du jeûne musulman. Auparavant, le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, et le secrétaire d'État américain, Antony Blinken, entre autres, ont appelé à un cessez-le-feu.
À Khartoum, agglomération de cinq millions d'habitants, le conflit a bouleversé la vie des habitants terrorisés. Ils se sont réfugiés à l'intérieur de leurs maisons sans électricité, sous une chaleur écrasante. De nombreux civils se sont aventurés à l'extérieur uniquement pour obtenir des denrées alimentaires d'urgence ou pour fuir la ville.
(Re)voir : Soudan : pas de trêve et un Aïd sous les tirs
"Situation catastrophique" au Darfour
La fin du mois de ramadan se fête habituellement "
avec des sucreries et des pâtisseries, avec des enfants heureux, et des gens qui saluent leurs proches", regrette Sami al-Nour, un habitant de la capitale. Mais au lieu de cela, il y a eu "
des coups de feu et des odeurs nauséabondes de sang tout autour de nous."
Khartoum a été le théâtre de certains combats parmi les plus féroces, avec des frappes aériennes, des chars dans les rues et des coups de feu dans les quartiers densément peuplés. Mais la violence a fini par gagner l’ensemble du pays.
Les combats ont fait rage notamment au Darfour, l'une des régions les plus pauvres du Soudan, où "
la situation est catastrophique", selon un docteur de Médecins sans frontières (MSF).
Plan d’évacuation en cours d’élaboration
Des plans d'évacuation des ressortissants étrangers au Soudan sont en cours d'élaboration. Les États-Unis, la Corée du Sud et le Japon ont déployé des forces dans les pays voisins, et l'Union européenne envisage de prendre des mesures similaires.
Vendredi, le département d'État américain a fait savoir que la situation était encore trop risquée pour permettre l'évacuation du personnel de l'ambassade. Aussitôt, les FSR du général Daglo, très actives sur les réseaux sociaux, ont répondu être "
prêtes à ouvrir tous les aéroports du Soudan" pour que "
les pays amis voulant évacuer leurs ressortissants" puissent le faire.
Risque d’extension du conflit
La violence pourrait plonger encore des millions de personnes dans la faim au Soudan. Dans le pays, 15 millions de personnes, soit un tiers de la population, ont besoin d'aide, selon le Programme alimentaire mondial (PAM).
Des analystes redoutent que les pays de la région ne basculent dans le conflit. Des mesures urgentes sont nécessaires pour empêcher qu'il ne dégénère en "
guerre civile à part entière", a averti l'International Crisis Group (IGC).
Le différend entre les généraux Burhane et Daglo porte sur l'intégration prévue des forces de sécurité soudanaises dans l'armée régulière. Une condition essentielle à la conclusion d'un accord visant à rétablir la transition démocratique dans le pays.
Un bilan publié par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) fait, pour l’heure, état de 413 morts et 3.551 blessées dans les combats.
Lutte de pouvoir entre générauxLes violences ont éclaté dans le pays le 15 avril entre l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant
de facto du Soudan depuis le putsch de 2021, et son adjoint devenu rival, le général Mohamed Hamdane Daglo, qui commande les Forces de soutien rapide (RSF), des paramilitaires redoutés. Les deux généraux ont pris le pouvoir lors du putsch. Ils se sont ensuite affrontés dans une lutte de pouvoir acharnée.
Le général Daglo, dit « Hemetti », a fait savoir, dans un communiqué, avoir "discuté de la crise actuelle" avec Antonio Guterres, notamment une "
trêve humanitaire, des passages sûrs et la protection des travailleurs humanitaires". Les deux précédents cessez-le-feu de 24 heures annoncés en début de semaine ont déjà été ignorés.
Créées en 2013, les FSR du général Daglo regroupent des milliers d'anciens Janjawids, des miliciens arabes recrutés par l'ex-dictateur Omar el-Béchir, déchu en 2019, pour combattre des minorités ethniques au Darfour.
(Re)lire : Soudan : qui sont Al-Burhane et Daglo, ces deux chefs de guerre qui se disputent le pouvoir ?