Soudan : un an de guerre et une crise humanitaire sans précédent

Le Soudan, considéré comme l’un des pays les plus pauvres au monde vit “une des pires catastrophes humanitaires, la pire crise de déplacement et bientôt la pire crise de la faim au monde”, selon l’ONU. Depuis un an, ce pays est ravagé par une guerre entre l'armée et les paramilitaires. Quel est le bilan humanitaire ? 

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Des enfants soudanais souffrant de malnutrition sont soignés dans une clinique MSF du camp de Metche, au Tchad, près de la frontière soudanaise, le samedi 6 avril 2024.

Des enfants soudanais souffrant de malnutrition sont soignés dans une clinique MSF du camp de Metche, au Tchad, près de la frontière soudanaise, le samedi 6 avril 2024. 

(Photo AP/Patricia Simon)
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  • Les origines du conflit

Le 15 avril 2023, des tirs et explosions retentissent dans les rues de la capitale soudanaise, Khartoum. Depuis, le pays s'est enfoncé dans une crise politique, et une guerre civile. 

Le conflit actuel oppose le général Abdel Fattah al-Burhane, chef de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le putsch de 2021, à son ancien second Mohamed Hamdane Daglo, dit Hemedti, chef des paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

En 2021, les deux généraux avaient évincé ensemble les civils avec lesquels ils partageaient le pouvoir depuis la chute en 2019 du dictateur Omar el-Béchir. Mais ils se sont ensuite divisés sur la question de l'intégration des paramilitaires dans l'armée. N'ayant jamais réussi à signer un accord censé relancer une transition démocratique, les combats ont donc commencé, il y a un an.

Les forces paramilitaires revendiquent la prise de plusieurs infrastructures clés. L'armée mène des frappes aériennes contre des bases de paramilitaires.

Le Programme alimentaire mondial (PAM) de l'ONU suspend le 16 avril 2023 son aide, après la mort de plusieurs humanitaires dans des combats au Darfour, vaste région de l'ouest frontalière du Tchad.

Des milliers d'habitants de Khartoum fuient les combats, de nombreux pays évacuent leurs ressortissants. Des trêves sont signées mais les accords ne seront jamais respectés très longtemps, les FSR et l'armée s'accusant mutuellement de violer le cessez-le-feu.

La guerre s’installe, les combats s’intensifient et la population entre dans une crise sans fin.

  • Bilan crise humanitaire

Depuis, ce sont des milliers de personnes qui sont mortes, dont entre 10 000 et 15 000 dans une seule ville du Darfour, à l'ouest du pays. "Près de 8 millions" de personnes, à l'intérieur comme à l'extérieur du pays ont été déplacées, selon le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). La crise humanitaire au Soudan et dans les pays limitrophes relève de l'urgence. 

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25 millions de personnes, soit la moitié de la population du pays, ont besoin d'aide, selon Jean Stowell, chef de mission de Médecins sans frontières au Soudan. Il dénonce pour sa part "un vide humanitaire extrêmement inquiétant".

La brutalité de ce conflit et la menace d’une famine créent un environnement propice aux décès tragiques de nombreux enfants. Ted Chaiban, directeur général adjoint de l'UNICEF

"En plus des décès liés à la violence, nous voyons des enfants qui meurent à cause de la malnutrition et du manque de vaccins, des femmes qui souffrent de complications après des accouchements dangereux", énumère-t-il dans ce communiqué.

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Selon un communiqué de l'UNICEF, ce sont près de 4 millions d'enfants de moins de cinq ans qui devraient souffrir de malnutrition aiguë cette année, dont 730 000 de malnutrition aiguë sévère potentiellement mortelle. Plus de 90 % des 19 millions d'enfants en âge d'être scolarisés privés d’accès à une éducation formelle. "La brutalité de ce conflit et la menace d’une famine créent un environnement propice aux décès tragiques de nombreux enfants", déclare Ted Chaiban, directeur général adjoint de l'UNICEF. 

"Près de la moitié des enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère se trouvent dans des zones difficiles d'accès, où les affrontements persistent, exacerbant ainsi leur situation déjà désastreuse. Si toutes les parties impliquées dans le conflit nous permettaient d'atteindre les communautés nécessiteuses et de remplir notre mission humanitaire sans politisation de l'aide, nous pourrions sauver des vies", a-t-il poursuivi.

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Mais l'Unicef alerte également sur les risques de recrutement d'enfants par les groupes armés et les risques de violences sexuelles à leur encontre. "L'année 2023 a enregistré le plus grand nombre de violations graves des droits de l'enfant vérifiées au Soudan depuis plus d'une décennie. Les chiffres réels sont probablement bien plus élevés que ceux rapportés, en raison des défis extrêmes de vérification des violations liés aux problèmes d'accès", indique leur communiqué.

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La crise humanitaire touche également les pays qui reçoivent l'afflux massif des réfugiés soudanais, notamment le Soudan du sud, le Tchad, l'Ethiopie et l'Egypte. 

  • Conférence à Paris

Une conférence internationale s'est ouverte ce lundi 15 avril 2024 à Paris sur le Soudan, un an pile après le début de la guerre, avec l'espoir de réveiller la mobilisation sur cette "crise oubliée" aux conséquences humanitaires catastrophiques et aux risques géopolitiques majeurs.

La réunion, co-présidée notamment par l'Allemagne, a associé un volet politique pour essayer de trouver des portes de sortie au conflit, à un volet humanitaire pour mobiliser les dons et faire entrer massivement de l'aide dans ce pays dévasté de la Corne de l'Afrique, ainsi qu'une réunion d'une quarantaine de membres de la société civile soudanaise.

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"L'attention internationale est plus sur Gaza et sur l'Ukraine que sur le Soudan", a insisté le Quai d'Orsay, évoquant une crise "humanitaire mais aussi géopolitique. Le risque d'éclatement du Soudan et de déstabilisation de toute la Corne est absolument majeur"

La réunion politique, à huis clos, a rassemblé notamment des ministres des voisins du Soudan (Tchad, Libye, Kenya, Djibouti, Soudan du Sud, Egypte, Ethiopie), du Golfe (Emirats arabes unis, Arabie Saoudite) et de puissances occidentales (Etats-Unis, Grande-Bretagne, Norvège). Des organisations régionales comme l'Union africaine, la Ligue arabe et l'Igad, le bloc des pays est-africains, étaient également présentes aux côtés d'agences de l'ONU.

La volonté derrière cette réunion était "d'adopter une déclaration de principe et de faire le point sur les différentes initiatives de paix", a précisé le Quai d'Orsay.