Fil d'Ariane
Fin d'une longue incertitude : Macky Sall ne se présentera pas pour un nouveau mandat présidentiel. Longtemps attendue, cette déclaration faite à la télévision lundi soir qui suscite une vague de réactions dans le pays comme à l'international.
Photo d'archive. À la tête du Sénégal depuis 2012, Macky Sall a annoncé ne pas se présenter de nouveau pour un troisième mandat en 2024.
Le président sénégalais Macky Sall a annoncé officiellement dans un discours télévisé, lundi 3 juillet au soir, qu'il renonce à briguer un nouveau mandat présidentiel, mettant fin à une longue incertitude dénoncée par l'opposition.
Les réactions ne se sont pas faites attendre. Sur le plan international, le ton général est aux félicitations venant de chefs d'Etat ou d'institutions qui traduisent une forme de soulagement.
L'ancien président du Niger Mahamadou Issoufou salue "une grande intelligence politique" de la part du président Macky Sall. "Ainsi, le Sénégal reste un des porte-flambeaux dont la flamme éclaire notre continent", écrit-il dans un tweet.
Son successeur élu en 2021 au Niger, le président Mohamed Bazoum "formule le vœu que cette décision mûrement réfléchie apaise définitivement le climat politique dans ce pays frère".
"Après un long entretien téléphonique avec [son] grand frère le président Macky Sall", le Bisso-guinéen Umaro Sissoko Embalo salue une "décision courageuse de grand homme d'État". Et d'ajouter : "On peut succéder à Macky Sall mais il est difficile de le remplacer".
Le président de la Commision de l'Union Africaine, le Tchadien Moussa Fakki Mahamat exprime son "admiration (...) d'avoir privilégié l'intérêt supérieur du Sénégal et de préserver ainsi le modèle démocratique sénégalais".
Le secrétaire général de l'ONU a tenu lui à dire qu'une telle "décision constitue un exemple très important pour son pays et pour le reste du monde".
Le président du Conseil européen Charles Michel s'adresse à Macky Sall : "Vous oeuvrez pour le Sénégal et défendez une Afrique forte et respectée. Merci pour l'excellente coopération".
Dans ce concert d'éloges, le Congolais Martin Fayulu, candidat malheureux à la présidentielle en RDC de 2018, veut croire à une source d'espoir pour son pays en cette année d'élection présidentielle. "Puisse ce discours de haute portée politique et symbolique inspirer tous les leaders africains. Nous, Congolais, devons méditer cet acte historique, empreint de courage, de lucidité, d’éthique, de dignité et de patriotisme."
Au Sénégal, la déclaration de Macky Sall constitue un tournant dans l'agenda politique du pays dans la perspective de l'élection présidentielle de 2024.
Après son annonce, le président Macky sall s'est offert un bain de foule auprès de ses partisans réunis devant le palais présidentiel. Dans les rangs du gouvernement, le ministre de l'Agriculture, de l'Équipement Rural et de la Souveraineté Alimentaire Aly Ngouille Ndiaye souligne la constance du chef de l'État qui "confirme ce qu'il nous a toujours dit dans toutes ses communications , discours, livres et interventions... Son Excellence le président Macky Sall vient de nous donner une leçon de la sacralité de la parole donnée".
Dans la même veine, le ministre des Affaires étrangères Mankeur Ndiaye salue une "décision courageuse, libre, souveraine et sage" et se fend même d'une confidence : "Il y a 2 ans il m'a dit qu'il ne serait pas candidat et il est resté fidèle à ses engagements".
La star internationale de la chanson, homme d'affaires et homme politique sénégalais, Youssou Ndour, se montre dithyrambique : "un président de la République qui organisera, sans y participer, l'élection de son successeur, ça sera une 1ère dans notre histoire commune. Un Très grand président tu l'es, un Chef d'Etat incomparable tu le resteras", déclare-t-il dans une déclaration écrite postée sur Twitter.
Dans l'opposition, c'est un autre son de cloche qui accompagne l'annonce de non candidature de Macky Sall à la prochaine présidentielle.
"Mieux vaut tard que jamais, le président Macky Sall a finalement accepté que la Constitution ne l'autorisait pas à se présenter une troisième fois, lance l'ex-Premier ministre qui a rejoint l'opposition Aminata Touré dans une déclaration vidéo. [...] C'est dommage qu'il n'est pas fait cette déclaration dès sa réélection en 2019, cela aurait épargné à notre pays tout ce qui s'est passé, ces pertes en vie humaines".
Et Aminata Touré d'exiger du président Sall que l'enquête détermine "qui est le commanditaire de ces tueries et qui en sont les acteurs" à propos de l'enquête sur les 16 personnes tuées lors des graves troubles qui ont suivi la condamnation de l'opposant Ousmane Sonko à deux ans de prison ferme pour "corruption de la jeunesse" début juin.
"Mais ceci c'est par l'extraordinaire mobilisation des démocrates sénégalais, de la jeunesse notamment à qui je voudrais rendre un vibrant hommage mais également à la diaspora qui a fait un travail extraordinaire".
Saluant "une belle décision", l'opposant et ex-maire de Dakar Khalifa Sall a "pensé à tous les morts dans des manifestations depuis 2021, une cinquantaine", "des sacrifices qui n'ont pas été vains" et plaidé pour "une élection inclusive".
Le porte-parole de M. Sonko a simplement tweeté "Focus 2024" avec le portrait de son leader. Sur le plateau du Journal Afrique de TV5MONDE, le député du Pastef, le parti d'Ousmane Sonko, Alioune Sall estime que Macky Sall "ne mérite aucune éloge". Il dénonce "une situation de pourrissement qui a été causée par le président alors que la Constitution était claire et définitivement interdit cette troisième candidature".
Sénégal : "Macky Sall ne mérite pas d'éloge", selon un député du parti d'Ousmane Sonko (Pastef)
Enfin, très suivis sur les réseaux sociaux, les activistes panafricanistes, aux positions anti-françaises et pro-russes, Kemi Seba et Nathalie Yamb ont éhalement commenté sur Twitter l'annonce du président sénégalais. Pour le Franco-béninois Kemi Seba, président de l'ONG Urgences panafricanistes, "il serait profondément naïf que de penser que suite à ce revirement du président en exercice , le courant souverainiste sénégalais a gagné. [...] Vigilance donc, car malheureusement , la Françafrique n’a pas dit son dernier mot, bien au contraire , en ce moment même, elle se régénère."
Son alter ego Natahlie Yamb, surnommée "la Dame de Sotchi", lui emboîte le pas, : "Quel sera le candidat de la Françafrique? J’ai ma petite idée…" Mystère.