Seifeddine Makhlouf, un ex-député tunisien, critique du président Kaïs Saïed et chef d'un parti islamiste, a été arrêté chez lui dans la nuit de vendredi 20 à samedi 21 janvier. Il vient d'être condamné par un tribunal militaire à 14 mois de prison, selon son avocate.
Seifeddine Makhlouf, chef d'Al-Karama, un parti islamo-nationaliste, a été reconnu coupable vendredi 20 janvier d'insulte envers des agents de la police à l'aéroport international de Tunis-Carthage en mars 2021.
Son avocate, Ines Harrath, a déclaré à l'AFP qu'un tribunal militaire l'avait condamné en appel vendredi 20 à 14 mois de prison avec effet immédiat. Seifeddine Makhlouf avait été condamné en mai 2022 à cinq mois de prison en première instance.
Une vingtaine de membres de forces de l'ordre en civil ont encerclé sa maison vers 23h00 et au bout de deux heures "
ont pénétré chez lui et l'ont emmené", a-t-elle ajouté.
Une vidéo publiée sur Facebook montre Seifeddine Makhlouf être conduit dans la rue par les membres des forces de l'ordre et crier : "
À bas le coup d'État". Des hommes en civil le font ensuite entrer dans une voiture.
Condamnations par les tribunaux militaires
En mars 2021, Seifeddine Makhlouf ainsi que d'autres députés de son bloc s'étaient rendus à l'aéroport de Tunis pour exhorter la police aux frontières de laisser une femme, fichée S17 et suspectée de lien avec le terrorisme, voyager. La scène de dispute avait choqué en Tunisie.
Dans le cadre de cette affaire, le tribunal militaire a également condamné plusieurs personnes, notamment des membres de Karama, à des peines de prison plus légères.
En juin 2022, Seifeddine Makhlouf avait par ailleurs été condamné en appel par un tribunal militaire à un an de prison ferme pour "
atteinte à la dignité de l'armée", selon son avocat. Il avait également été sanctionné d'une interdiction d'exercer son métier d'avocat pour cinq ans.
(Re)voir : Nouvelle manifestation contre le président Kaïs Saïed en Tunisie
Critiques de Kaïs Saïed
Seifeddine Makhlouf, qui avait perdu son immunité parlementaire en 2022, critique régulièrement le président Kaïs Saïed.
Élu fin 2019, Kaïs Saïed s'est arrogé les pleins pouvoirs fin juillet 2021 en limogeant le Premier ministre et en suspendant le Parlement, avant de le dissoudre en mars 2022. Ses opposants l'accusent d'instaurer une nouvelle autocratie dans le pays.
Au-delà de ces cas concernant des personnalités islamistes, les ONG locales et internationales dénoncent régulièrement les poursuites judiciaires engagées contre des civils par des tribunaux militaires.
Pour Ahmed Néjib Chebbi, président du Front de salut national (FSN), principale coalition d'opposition, le jugement "
reflète une mentalité de vengeance" de la part du pouvoir. "
Nous assistons à la mise à mort des libertés et à la destruction de la démocratie", a-t-il déclaré à des journalistes.
De son côté, la présidence de la République a appelé dans un communiqué sur Facebook à déployer des efforts pour "
s'attaquer à tous les corrompus et ceux qui se croient au-dessus des lois".