Fil d'Ariane
Najla Bouden a été "chargée de former un gouvernement dans les plus brefs délais", a indiqué la présidence dans un communiqué. Née en 1958 et scientifique de formation, Najla Bouden, qui a pratiquement le même âge que le président Kaïs Saïed et est originaire de la ville de Kairouan, est inconnue du grand public.
C'est la première fois qu'une femme prend la tête du gouvernement en Tunisie, même si les pouvoirs octroyés à ce rôle ont été considérablement amoindris par les "mesures exceptionnelles" adoptées par Kaïs Saïed le 22 septembre, qui suspendent l'application de chapitres clé de la Constitution.
Voir : Tunisie : une femme nommée Premier ministre
La présidence a publié une vidéo de Kaïs Saïed recevant Najla Bouden dans son bureau et la chargeant de former un nouveau gouvernement pour le lui présenter "dans les prochaines heures ou jours".
عملا بأحكام الأمر الرئاسي عـدد 117 لسنة 2021 المتعلق بتدابير استثنائية وخاصة على الفصل 16 منه، كلّف رئيس الجمهورية #قيس_سعيد السيدة نجلاء بودن حرم رمضان بتشكيل حكومة، على أن يتم ذلك في أقرب الآجال. #TnPR pic.twitter.com/R2c5azSqhT
— Tunisian Presidency - الرئاسة التونسية (@TnPresidency) September 29, 2021
Kaïs Saïed a insisté à plusieurs reprises sur le caractère "historique" de la nomination d'une femme pour la première fois pour diriger le gouvernement en Tunisie. "C'est un honneur pour la Tunisie et un hommage à la femme tunisienne."
La principale mission du futur gouvernement sera "de mettre fin à la corruption et au chaos qui s'est répandu dans de nombreuses institutions de l'Etat".
Le décret présidentiel du 22 septembre est venu officialiser le coup de force du 25 juillet du président Kaïs Saïed par lequel il s'est arrogé les pleins pouvoirs, après avoir limogé le Premier ministre, gelé le parlement et avoir repris en main aussi le pouvoir judiciaire.
Désormais, sur la base des "mesures exceptionnelles" prises le temps de mener une série de "réformes politiques", le chef de l'Etat, détenteur du pouvoir exécutif, préside lui-même le conseil des ministres.
Les mesures du 22 septembre prévoient aussi la poursuite du gel du Parlement et que le président légifère par décrets.
Avant sa nomination surprise, Najla Bouden était directrice générale d'un projet de réforme de l'enseignement supérieur.
Auparavant, cette docteure en géologie avait été chargée de mission, puis directrice générale au ministère de l'Enseignement supérieur.
La société civile tunisienne reste partagée sur ce choix. Certains de ses membres louent la première nomination d'une femme à la tête d'un gouvernement. D'autres rappellent les positions très conservatrices du président Saïed sur le rôle des femmes.
C'est historique et c'est relativement bien accueilli (...) mais c'est sa marge de manoeuvre qui va déterminer le succès de son action.
Taïeb Zahar, Directeur de l'hebdomadaire francophone "Réalités"
L'Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD) s'est réjouie du choix du président de nommer une femme. La présidente de l'association, Neïla Zoghlami, a affirmé qu'elle en avait elle-même fait la requête lors d'une réunion avec Kaïs Saïed.
La réaction de la militante des droits des femmes Bochra Bel Haj Hmida est plus mitigée. Elle salue la portée symbolique du geste mais rappelle que Kaïs Saïed était "connu" pour ses positions conservatrices sur l'égalité entre les hommes et les femmes.
Mercredi, la chancelière allemande Angela Merkel a jugé "essentiel" un "retour à la démocratie parlementaire" lors d'un entretien téléphonique avec Kaïs Saïed.
Elle met en garde le président tunisien sur "l'importance de l'acquis démocratique pour la stabilité et le bien-être du pays.", d'après un communiqué de la chancelière allemande. Elle fait ainsi référence à son coup de force de juillet dernier.