Au lendemain des deux attentats déjoués sur la côte-est de la Tunisie, indignation générale parmi la classe politique et la société civile. La présidence tunisienne dénonce une tentative de "torpiller" la transition démocratique. Les professionnels du secteur hôtelier sont sous le choc et la presse évoque une "escalade du terrorisme" qui désormais s'attaque au moteur de l'économie tunisienne: le tourisme.
Un garde de sécurité devant le mausolée d'Habib Bourguiba à Monastir (Photo Bechir Bettaieb. AFP)
4 minutes de lecture
Merci les terroristes La présidence, dans un communiqué, tout en faisant état d’un “plan de sécurité global pour contrer toute attaque terroriste" prévient : "Ces actes et les menaces qui pèsent sur la Tunisie ne réussiront pas à torpiller l'effort engagé à l'échelle nationale pour faire aboutir le processus de transition” Sur sa page Facebook, Rached Ghannouchi, chef du parti islamiste au pouvoir, a dénoncé "ceux qui ont tenté de s'en prendre aux touristes, hôtes de la Tunisie" et au mausolée de Bourguiba les qualifiant de "criminels qui veulent détruire la Tunisie, son économie et sa transition démocratique". La Fédération tunisienne des agences de voyage a mis en place "une cellule de crise pour la prise en charge des résidents de l'hôtel visé par l'attaque", a indiqué son président Mohamed Ali Toumi, selon l'agence TAP et, parlant à l'AFP sous couvert d'anonymat, une professionnelle du secteur hôtelier, a lancé sous le choc un vibrant : "Le tourisme tunisien vous dit merci les terroristes !"
Dangereux tournant ? Les journaux tunisiens notaient jeudi matin, au lendemain de deux attentats suicide manqués, une escalade du "terrorisme" qui s'attaque désormais au tourisme, alors que jusqu'à présent il ciblait plutôt l'opposition et les forces de sécurité dans des zones largement rurales. "Le terrorisme vise désormais le tourisme", constate en Une le Temps. "Les commanditaires visent désormais le coeur battant de l'économie tunisienne et qui sait s'ils ne projettent pas carrément d'urbaniser le terrorisme en déployant leur funeste action dans les établissements publiques, les écoles, les supermarchés et partout où la foule est dense", craint ce journal dans son éditorial. "Dangereux tournant!" titre pour sa part Le Quotidien, qui appelle néanmoins à "ne pas céder à la panique". Le journal souligne par ailleurs qu'avec la multiplication des affrontements armés entre policiers et jihadistes ce mois-ci (neuf morts au sein des forces de l'ordre en octobre), les attentats manqués de Sousse et Monastir, sur la côte est de la Tunisie ne sont pas une surprise. "Ce qui s'est passé hier, aussi triste que grave, n'a pas véritablement surpris d'autant plus que les observateurs avertis (...) ont déjà mis en garde la population et les autorités sécuritaires contre d'éventuels attentats touchant des lieux publics", poursuit le journal. Les journaux estiment par ailleurs que ces tentatives d'attentats, qui ont coûté la vie à l'un des kamikazes, visent à faire dérailler les négociations en cours entre opposants et islamistes au pouvoir pour mettre en place un gouvernement d'indépendants chargé de conduire le pays jusqu'aux élections. "A chaque fois où une lueur d'espoir pointe à l'horizon sur l'échiquier politique, une action terroriste est programmée pour ralentir le processus de réconciliation et de mise en place d'un plan de salut national", relève le Quotidien. La Presse qui constate que le "terrorisme passe à la vitesse supérieure" est plus accusateur, reprochant au cabinet dirigé par Ennahda d'avoir manqué de fermeté face à ces groupes armés. "Faut-il rappeler que l’hydre terroriste n’est pas la résultante des derniers évènements dramatiques qui viennent de secouer le pays, mais bien la conséquence logique du laxisme observés par les gouvernements" successifs dirigés par Ennahda, assène La Presse. Ennahda est accusé par l'opposition et la société civile d'avoir laissé se développer la mouvance salafiste dont une partie est favorable aux recours aux armes. Selon radio Shems FM, la police a découvert une "grande quantité d'explosifs" dans une maison proche du port de plaisance de Monastir, une information non confirmée par le ministère de l'Intérieur.
Des touristes à Sidi Bou Said en juin 2012. Fethi Belaid / AFP
Prudence Les autorités belges ont publié un communiqué : "Les voyageurs qui se trouvent en Tunisie sont invités à faire part de la plus grande prudence durant leur séjour et à se tenir à l'écart des rassemblements et des manifestations", mentionne l'avis de voyage. "Il est conseillé de rester de préférence dans les zones touristiques, mais de nouveaux incidents ou attentats dans ces zones sont toujours possibles." Même conseil de prudence en France où l'on peut lire sur le site du ministère des Affaires Etrangères : " en raison d’opérations de sécurité en cours, il est recommandé d’observer la plus grande prudence lors des déplacements dans les gouvernorats frontaliers de Kasserine, Le Kef et Jendouba, ainsi que dans la zone de Goubellat-Dougga dans le gouvernorat de Béja. Les zones proches de la frontière algérienne sont à éviter."
Tunisie: deux attentats déjoués à Sousse et à Monastir