Musicien et journaliste, Kerim Bouzouita observe la scène musicale. Il a noté lui aussi la qualité de Mousiqa wassalem mais rappelle : « en Tunisie, c’est essentiellement le rap qui marche. Et malgré le dynamisme de ses représentants, le genre est toujours banni de la scène tunisienne, le circuit de programmation est toujours underground... De toute manière, il y a floraison de festivals mais le problème, c'est l’organisation. Elle est toujours "cheap". Quand au ministère de la Culture, il est à coté de la plaque, mais il laisse faire car il n’a pas le choix. »
Si l'Etat est en retrait, la culture est pourtant une affaire éminemment politique. Et l'affaire du Printemps des Arts reste dans toute les têtes. Mi-juin, cette exposition d'art plastique avait été saccagée par des casseurs présentés comme proches de la mouvance salafiste. L'opération avait été suivie d'émeutes dans plusieurs villes du pays faisant un mort et rappelant la fragilité de la paix sociale en Tunisie. Le ministre de la Culture, Mehdi Mabrouk, avait alors mis en cause des « provocations artistiques », redoublant la consternation de nombreux artistes.
Une association comme
Kolna Tounes qui se veut de « vigilance et de mobilisation citoyenne » a fait de la culture un de ses axes d'actions. Cette année, elle a décidé de relancer l'historique
festival de Dougga . Pour quatre soirées, elle a pu réunir des grands noms de la scène tunisienne : El Theatro, Fadhel Jaziri... sur ce site romain.
« Pour nous, à Dougga, c'était un peu l'année zéro. On a voulu faire un essai. Des services de bus ont été mis en place pour amener le public depuis les villages voisins et aussi depuis Tunis », explique Mohamed Turki, coordinateur culturel de l’association, qui déroule un vrai argumentaire en faveur de la décentralisation culturelle. L'association a déjà organisé des tournées dans des villes moyennes. « Il faut avant tout des spectacles de qualité. Il y a peut-être 400 festivals en Tunisie pendant l’été mais beaucoup n’ont pas de valeur artistique... Pendant la période Ben Ali, il y avait du divertissement mais pas de culture dans ces événements. Evidemment, aujourd'hui il y a une explosion. Chacun essaie d’apporter sa pierre mais ce n’est pas organisé comme il faut. C'est comme avec les partis politiques : il faudra des rapprochements. »