Comment évolue situation en Centrafrique ces dernières semaines ?
Depuis le mois d'août, il y a une augmentation de 57 % des déplacés : les gens fuient, ils ont peur. On estime maintenant à 400 000 le nombre de déplacés, soit 10 % de la population - comme en Colombie. Cette dispersion ne fait que renforcer les problèmes de cohésion sociale et de dialogue intercommunautaire.
Sur une population de 4,6 millions d'habitants, la moitié a moins de 18 ans. Depuis décembre 2012, avec l'explosion du nombre de déplacés, 7 enfants sur 10 ne peuvent plus aller à l'école. Avant la crise, il y avait déjà 1,2 millions d'enfants déscolarisés.
Avant 2012, la Centrafrique présentait déjà l'un des taux de développement humain les plus critiques d'Afrique, voire du monde. Le taux de mortalité maternelle, par exemple, est le 3e plus bas du monde, après le Tchad et la Somalie.
Nous sommes aujourd'hui à la veille d'une famine, en l'absence de semis et de récolte. La malnutrition menace, avec son cortège de problèmes cognitifs chez les enfants.
Quelle est la situation dans la capitale, Bangui, où vous retournez dès demain ?
C'est la désolation. Les routes sont des pistes. Les dispensaires ont été pillés ; le système bancaire étant paralysé, il n'est plus possible de payer les employés des services de santé ou les enseignants ; avec les ponts dynamités et les stations d'essence vides autour de Bangui, il est très difficile d'accéder à la capitale. Tous les projets de création et de réhabilitation d'école et de centre de jeunes que l’Unicef avait prévu avant la crise sont gelés. Tout était déjà très triste avant la crise, mais maintenant, il ne reste plus rien, tout ce qui tenait encore debout a été saccagé de façon systématique. On sent que les gens arrivent au bout de leur extraordinaire résilience - trop d'injustice, trop de violence, trop d'impunité ; alors ils se regroupent pour contre-attaquer et la situation s'envenime encore. Or la sécurité est la clé de voûte de notre travail.