La note du pays a été dégradée par l'agence Fitch en janvier dernier. Les autorités de Libreville sont-elles en mesure de rassurer leurs partenaires ? Réponse avec Charles M'Ba, ministre gabonais des comptes publics et de la dette.
Namouri Dosso: Vous étiez de passage à Paris, avec vos homologues, vous avez rencontré notamment le gouverneur de la Banque des États de l'Afrique centrale au sujet de l'obligation pour les compagnies pétrolières, de rapatrier au sein de la banque sous-régionale, les fonds de réhabilitation de l'environnement des gisements tari. Êtes-vous parvenu à un accord ?
Charles M'Ba : L'accord se construit progressivement avec nos partenaires, les opérateurs économiques, pétroliers et miniers qui opèrent dans nos régions. Nous avançons. Nous rencontrerons probablement à Washington nos partenaires à l'occasion de ces assemblées, avec le Fonds monétaire, à la Banque mondiale, et nous espérons aboutir bientôt à un accord.
ND : Pouvez-vous nous dire un mot au sujet de l'actualité dans votre pays, le Gabon ? Brice Oligui Nguema a remporté la présidentielle avec un large score. Le Gabon est-il selon vous entré dans une nouvelle ère ?
CM : Bien sûr que le Gabon est entré dans une nouvelle ère ! Depuis août 2023 en fait. Avec cette élection-ci, les Gabonais ont permis au président Oligui non pas de gagner un pouvoir mais de lui remettre un vrai mandat pour continuer de bâtir le pays. Vous voyez donc un ministre confiant dans l'avenir parce que, en réalité, nous écrivons une vraie page de liberté, de libération, d'enthousiasme et de construction de notre pays.
ND : Néanmoins, d'importants défis économiques attendent votre pays, le Gabon, notamment en ce qui concerne la dette. Comment prévoyez-vous de la surmonter ?
CM : Lorsque nous sommes arrivés en septembre 2023, il y avait une dette de plus de 7000 milliards que nous avons réduite en stock au 31 décembre 2024. Le stock a baissé. Notre stratégie était de desserrer cet étau et de régler les échéances. Cette dette, tout le monde le sait, ce n'est pas nous qui l'avons contractée mais c'est la dette du Gabon. Nous avons pris le problème à bras le corps pour la réduire.
ND : À combien s'élève aujourd'hui la dette du Gabon ?
CM : Au 31 décembre, nous étions à 7208 milliards alors que quand je suis arrivé elle était de 7288 milliards, autrement dit le stock pur de la dette du Gabon a baissé de 260 milliards, ce qui est une bonne indication. Ça veut dire que malgré le fait que nous continuons d'emprunter, le stock est réduit pendant que nous payons les échéances.
ND : Néanmoins, le fond monétaire international projette une aggravation de la dette publique gabonaise avec un taux d'endettement dépensant les 70% du PIB. Est-ce que vous confirmez ces précisions ?
CM : Non je ne confirme pas du tout. Nous sommes toujours en désaccord avec les institutions de Bretton Woods sur notre taux d'endettement. Le fond dit plus de 70%, alors que nous, nous disons 58% quand nous sommes arrivés, 56% aujourd'hui, et nous avons une tendance baissière vers 54%. Alors la réalité est que dans la mesure du fond, ils intègrent une dette qui est une dette sociale intérieure, c'est la dette de l'État vis-à-vis notamment des agents publics. Par exemple, j'ai payé sur instruction du président de la République, le Président Oligui Nguema, tous les rappels en retard pour les pensions. Nous avons payé les deux tiers de des rappels de solde qui étaient en retard depuis 10 ans, autrement dit y compris cette dette-là est encore en complète diminution.
ND : Monsieur le Ministre, néanmoins, quelles mesures concrètes, votre ministère met-il en place pour diversifier l'économie gabonaise au-delà de sa dépendance aux hydrocarbures ?
CM : Alors la diversification, vous faites bien d'en parler. Je ne suis pas le mieux placé pour en parler parce que mon collègue ministre de l'Économie est aussi dans la capitale. Mais je vous dirais quand même quelle est l'idée. L'idée est que nous diversifions notre économie en faisant autre chose que du pétrole, que des mines. Ça veut dire que nous avons une orientation vers l'agriculture, vers le tourisme. Nous avons envie d'une économie qui soit numérisée, donc nous allons développer les services, nous allons développer les métiers, etc. Il nous faut une économie diversifiée en effet, et c'est ce à quoi nous allons nous atteler. J'ai une grande confiance que dans les années qui viennent, notre économie soit parfaitement diversifiée.
ND : Comment comptez-vous prendre des mesures pour que les revenus issus des ressources naturelles bénéficient d'avantages à la population gabonaise ?
CM : Je dois dire que notre gouvernement, celui qui a été mis en place par le président Oligui, est un gouvernement particulièrement empathique. Comment faire pour que les richesses profitent aux uns et aux autres ? Il faut régler les problèmes de la vie quotidienne des Gabonais. C'est ce que nous faisons depuis que nous sommes au pouvoir. Je vous parlais tout à l'heure des pensions de retraite, je vous parle des rappels de sol. Je pourrais vous parler des bourses scolaires de lycéens, universitaires, je pourrais vous parler de la lutte contre la vie chère qui entraîne souvent que l'État mette la main à la poche pour soutenir les ménages gabonais. C'est notre marque de fabrique, l'empathie sociale, l'empathie envers la population.