
Fil d'Ariane
Dès 1982, un archéologue ivoirien renommé, François Guédé Yiodé, alerté par un géologue, avait commencé des fouilles à Anyama, à dix kilomètres d'Abidjan, sur le terrain d'un particulier. Il y a bien eu la présence de l'Homo sapiens à Abidjan il y a 150 000 ans. Des scientifiques viennent de le prouver.
La Côte d'Ivoire, connue pour sa riche biodiversité et son histoire culturelle, vient de révéler un pan méconnu de son passé. Une découverte archéologique majeure a mis en lumière la présence de l'Homo sapiens dans la région d'Anyama, près d'Abidjan.
Il y a 150 000 ans, la région d'Abidjan n'était qu'une vaste forêt tropicale. C'est dans cette jungle dense que l'Homo sapiens, notre ancêtre direct, a laissé des traces de son existence.
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Cette découverte bouleverse les idées reçues sur l'occupation humaine des forêts tropicales, longtemps considérées comme inhospitalières pour les premiers humains. Cette découverte, publiée dans la prestigieuse revue scientifique Nature, marque la plus ancienne preuve de présence humaine en forêt tropicale.
La commune d'Anyama fait donc parler d'elle. Et pour ses habitants, cette révélation est une source de fierté. "C'est une fête pour nous de savoir que des gens vivaient ici il y a si longtemps", déclare Alfa Koné, un résident local. Cette découverte change la perception de l'histoire locale, longtemps dominée par l'idée que seuls des animaux peuplaient ces terres.
Les fouilles, menées en 2020 par une équipe internationale d'anthropologues et d'archéologues, ont permis de mettre au jour des artefacts en pierre, témoins de l'activité humaine. Cependant, l'histoire de cette découverte remonte aux années 1980, lorsque le professeur François Guédé Yiodé a commencé à explorer le potentiel archéologique d'Anyama.
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Considéré comme le seul spécialiste de la préhistoire en Côte d'Ivoire par ses pairs, François Guédé Yodé a consacré une dizaine d'années à fouiller ces sols, souvent à ses propres frais. Il a mis au jour, au fil des ans, des centaines d'artefacts en pierre laissés par des humains. Et il en reste encore. "C'était des chasseurs-cueilleurs, dit-il en observant des vestiges. Ils ne restaient pas en place, ils ont pris tout le territoire de la Côte d'Ivoire."
Malgré l'importance de ces découvertes, le site d'Anyama est aujourd'hui menacé par l'exploitation en carrière. Les autorités ivoiriennes n'ont pas pris de mesures pour protéger ce patrimoine inestimable.
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À son domicile, François Guédé Yodé conserve précieusement les vestiges découverts. Il a donné certains outils en pierre ou sédiments à l'équipe internationale qui vient de publier son étude. Le professeur et ses pairs espèrent que cette nouvelle attention internationale incitera à la préservation et à l'exploration des autres richesses archéologiques du pays.