Tchad : l'ancien Premier ministre Succès Masra arrêté par les autorités

Dans les premières heures de la matinée, l'ancien Premier ministre et ex-candidat à la présidentielle, Succès Masra, a été arrêté à son domicile par une quinzaine d'hommes armés. Les images de vidéosurveillance montrent cette intervention qui a rapidement fait le tour des médias. Cette arrestation intervient dans un contexte tendu, suite à des violences meurtrières survenues dans le village de Mandakao, au sud du pays.

Accusations graves et tensions communautaires

Le procureur de la République affirme que Succès Masra serait impliqué dans ces violences survenues mercredi, ayant causé la mort de 42 personnes, principalement des femmes et des enfants. Ces événements tragiques ont exacerbé les tensions entre communautés locales. Selon les autorités, des messages incitant à la haine et à la révolte ont circulé sur les réseaux sociaux, "appelant la population à s'armer contre d'autres citoyens". 

Nous avons opté pour une lutte pacifique depuis notre premier jour
Tog-Yeum Nagorngar, secrétaire général du parti Les Transformateurs

"Ces actes graves sont constitutifs d'incitation à la haine, à la révolte, de bandes armées, de complicité d'assassinat, d'incendie volontaire et de profanation de sépultures", a déclaré devant la presse le procureur de la République, Oumar Mahamat Kedelaye.

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Les avocats réclament des preuves 

Mais le message mis en avant par la justice pour incriminer M. Masra, daterait de mai 2023. "Nous attendons toujours qu'on nous produise la preuve de ces accusations contre notre client. On ne peut pas nous brandir ce prétendu audio qui date de quelques années", a dit à l'AFP Me Ndordji Allatan.

Le collectif tient à porter à la connaissance de l'opinion nationale et internationale de ce que cette arrestation est des plus illégales. 

Collectif de défense de Succès Masra

Par ailleurs, selon son confrère Me Francis Kadjilembaye, "rien dans l'audio ne peut établir une infraction". Selon une traduction française de l'audio en langue ngambaye, il est dit: "apprenons-nous les uns et les autres à utiliser une arme à feu. Que ce soit fille ou garçon, que ce soit femme ou homme... soyons tous des boucliers protecteurs". 

Selon les avocats, il s'agit d'un appel à l'autodéfense des populations du sud du Tchad, victimes d'exactions. "Si on appelle à l'autodéfense, c'est que le gouvernement a failli. Le gouvernement est défaillant", a estimé Me Allatan. En outre, selon Me Kadjilembaye, "on ne sait même pas si l'audio est de Masra (...) Ce sont les membres du gouvernement qui disent que c'est authentifié, mais authentifié comment ?".

"Le collectif tient à porter à la connaissance de l'opinion nationale et internationale de ce que cette arrestation est des plus illégales", a par ailleurs indiqué le collectif d'une vingtaine d'avocats qui défend M. Masra lors d'une déclaration samedi. Les avocats, qui reconnaissent ne pas avoir eu encore accès au dossier, se réservent le droit de dénoncer d'éventuels vices de procédure lors du procès.

Soutien du parti des Transformateurs

Au siège du parti des Transformateurs, les cadres ont vivement réagi à l'arrestation de leur président. Ils exigent sa libération immédiate et sans condition, tout en réfutant les accusations portées contre lui. 

"Nous avons opté pour une lutte pacifique depuis notre premier jour", a affirmé de son côté le secrétaire général du parti Les Transformateurs. Tog-Yeum Nagorngar a réaffirmé son engagement de "lutter pacifiquement en respectant les lois [du] pays".  Et, si un changement de stratégie devait être envisagé, explique-t-il, cela serait annoncé par eux-mêmes.

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Dans l'après-midi, Succès Masra a pu recevoir la visite de ses avocats ainsi que celle de deux vice-présidents du parti, témoignant du soutien dont il bénéficie au sein de sa formation politique. Cette affaire, qui mêle politique et tensions communautaires, continue de susciter de vives réactions et pourrait avoir des répercussions importantes sur la scène politique nationale.