Au Canada, l'architecture autochtone en symbiose avec la nature

Découvrir les spécificités de l'architecture des Premières Nations du Canada. C'est le programme de l'exposition "Non cédées - Terres en récit" proposée par le Musée canadien de l'Histoire jusqu’en mars prochain. Elle met ainsi en valeur l'architecture autochtone respectueuse de l'environnement. 
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expo architextes autochtones
Des paysages canadiens sont présentés pour illustrer le lien symbolique qui lient les architectes autochtones à leurs terres et à la planète. 
©TV5MONDE/ Catherine François.
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Saviez-vous quel était le nom du continent nord-américain avant que les Européens n’y posent le pied ? Les Amérindiens l’appelaient "l’Île de la Tortue", car la tortue est un symbole de la terre et de la Vie pour ces communautés.

Beaucoup d’autochtones estiment qu’ils vivent toujours sur cette île et le nom de cette exposition, "Non cédées – Terres en récit", n’est pas innocent : ils considèrent que leurs territoires n’ont jamais été "cédés" aux colonisateurs européens et qu’ils leur appartiennent toujours.

Les principes de l’architecture autochtone

Cette exposition revient donc sur la colonisation et explique comment le colonialisme a eu un impact sur l’architecture du continent. Elle explique aussi en quoi l’architecture autochtone diffère des autres types d’architectures, à travers le regard de 18 architectes et designers issus des Premières Nations ou métis.

Le visiteur apprend tout d’abord quels sont les principes qui guident un architecte autochtone :
-Chaque étape s'inscrit dans un cheminement spirituel guidé par les aînés de la communauté.
- Chacun doit veiller à bien se conduire.
- Chacun doit se former pour être au service des autres.
- Chacun doit respecter les processus décisionnels des traditions de chacun.
- La forme architecturale s'inspire de l'esprit de la nature.
-Tout plan pour l'avenir doit tenir compte de tous les donneurs et donneuses de vie pendant sept générations.

Respect de la nature, durabilité, intégration dans l’environnement et préservation de nos ressources : voilà ce qui guide un architecte autochtone quand il fait les plans d’un édifice, d’une maison, d’une école. C’est ce qu’expliquent les 18 architectes et designers.

Une perspective qui diffère radicalement d’autres types d’architecture selon Douglas Cardinal, l’architecte d’origine Anishinabé qui a dirigé cette exposition. Il est le plus célèbre architecte indigène du Canada : on lui doit notamment le Musée canadien de l’Histoire, où se tient justement cette exposition, mais aussi le Smithsonian Museum of the American Indian à Washington. Il a aussi été nommé "Maître mondial de l’architecture contemporaine" par l’International Association of Architects.

Le plus célèbre architecte autochtone du Canada

"Nous, les Indigènes, nous avons en général une autre vision que les Blancs, et c’est le cas aussi dans le domaine de l’architecture", explique-t-il.

Les autochtones savent qu'on ne peut pas contrôler la nature sinon on la détruit.

Douglas Cardinal

Douglas Cardinal estime que les Européens se sont servis de l’architecture comme d’un outil de colonisation lorsqu’ils se sont emparés du continent nord-américain : "L'architecture a toujours été utilisée par les États pour créer cette soi-disant civilisation qui en fait impose une vision de contrôle sur les gens. Les civilisations occidentales ont toujours imposé cette vision de domination sur la nature, alors que dans la pensée des communautés indigènes, nous appartenons à cette nature, nous en sommes un élément. Avec ce point de vue de domination, les civilisations occidentales ont accentué les menaces qui pèsent sur la planète, elles ont tué des millions d'espèces et détruit tout ce qu’elles touchent parce qu’elles croient qu’elles peuvent dominer la nature. C’est cette arrogance qui a causé tous ces problèmes sur la planète. Les autochtones savent qu'on ne peut pas contrôler la nature sinon on la détruit, ils n'ont pas cette façon de voir de le monde".

Les architectes autochtones ont une relation symbiotique avec la terre.

 Douglas Cardinal

Douglas Cardinal croit que les architectes autochtones peuvent apporter beaucoup de choses à l’architecture et qu’il est temps de les écouter pour sortir de la spirale destructrice de notre planète.

"Les architectes autochtones ont une relation symbiotique avec la terre, déclare de son côté Mark O’Neill, le président-directeur-général du Musée canadien de l’Histoire, il y a quelque chose d’organique dans les édifices qu’ils construisent. Leurs expériences sont influencées par la nature, l’environnement, c’est ce qui fait toute la différence. Dans cette exposition, on parle de résilience, on parle de colonialisme et aussi de la souveraineté des communautés. Ça fait aussi partie de l’Histoire du Canada".  

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Reportage : Catherine François

L'architecture autochtone, une façon d'être

Plusieurs édifices construits par des architectes indigènes ou métis sont présentés. Visiter cette exposition permet de comprendre que clairement, l’architecture autochtone, c’est une façon d’être et de voir notre environnement d’une autre façon.

En ces temps de menaces réelles sur notre planète, disparitions d’espèces par milliers, multiplication des phénomènes météorologiques extrêmes causés par le réchauffement climatique, il serait en effet intéressant d’intégrer ces principes qui guident les architectes autochtones dans nos façons de concevoir les édifices, écoles, maisons, usines, etc. De comprendre une fois pour toutes que nous ne pourrons jamais dominer la nature, que nous devons la respecter et la préserver, que nous ne sommes qu’un élément de la planète…