Bruxelles : « Et si on osait la paix ? »

A Bruxelles, il s’agit de vivre avec le  traumatisme des attentats qui ont endeuillé le pays et d’en tirer toutes les leçons. Une exposition, qui  réunit 300 documents originaux, permet d’appréhender le pacifisme à travers les dernières décennies. Et de découvrir combien la Belgique, et notamment sa jeunesse, s’est toujours mobilisée au nom des grandes préoccupations européennes et mondiales. Passionnant.
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Expo Bruxelles
L'exposition est organisée par l’Université Libre de Bruxelles.
© Michele Jacobs Hermes
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Bruxelles
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Bruxelles (ULB), après la Cité Miroir à Liège, et avant le Mundaneum à Mons, s’appuie sur un constat : les commémorations des deux grandes Guerres Mondiales foisonnent jusque dans les plus petits villages et brandissent le patriotisme comme une valeur cardinale. Mais le rôle des organisations qui se sont investies dans le pacifisme est souvent ignoré.  A tel point que la plupart des Belges seraient incapables de citer leurs  4 Prix Nobel de la Paix. Un coup de main ?  L’Institut de droit international de Gand (1904), Auguste Beernaert (1909), Henri La Fontaine (1913) et le Père Pire (1958).

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Plusieurs instituts et centres d’archives belges ont contribué à la mise en place du dispositif accroché aux cimaises de la salle Allende, fait d’affiches originales, de photographies, de tracts, de publications. Parmi eux,  l’Institut d’Histoire Ouvrière Economique et Sociale (IHOES), dont on avait pu récemment apprécier le savoir-faire  dans des expositions à Liège et à Herstal.

L’Europe, « rempart »  de paix

Trois parties  structurent  l’exposition.
« Bâtir la paix » donne à  découvrir comment une démarche pro-active visant à la mise en œuvre d’un droit international, trouve ses racines au début du 19ème siècle,  sous l’impulsion d’ organisations américaines et britanniques protestantes. Place ensuite aux juristes et économistes progressistes, qui ont suscité la mise en place d’organisations internationales chargées d’arbitrer et de réguler les échanges mondiaux.
Pareille démarche n’est pas toujours sans arrière pensée : un document rappelle ici que la Première Conférence  pour la Paix à La Haye, en 1899, avait été voulue par le Tsar Nicolas II. Il s’agissait pour la Russie de trouver le moyen de limiter ses dépenses militaires, préjudiciables au redressement économique du pays….

Bruxelles expo Paix
Le XIXe congrès à Genève en 1912 se fit l'écho des protestations contre la guerre italo-turque
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Plus tard, en 1957, la construction de la Communauté européenne, après une première union fondée sur le charbon et l’acier,  est  valorisée comme un instrument de paix indéniable.
 
Il est en outre question  du lien fondamental que les pacifistes, pour la plupart socialistes, communistes ou anarchistes,  rejoints par les francs-maçons,  ont tenu à établir avec la démocratie, l’éducation, le droit social et le droit des peuples, y compris en matière de parité hommes/femmes.  Puis du courant humanitaire qui sera initié par les organisations chrétiennes. Les deux tendances se rejoignant pour s’insurger contre toutes les formes de xénophobie et venir au secours des populations opprimées ou victimes de guerres.
 

Les jouets guerriers en accusation

Le deuxième volet de l’exposition, « Dénoncer la guerre »,  permet d’appréhender le prisme des positions que recouvre le pacifisme, surtout après les violences inouïes qui ont atteint les populations en 14-18. La  petite Belgique, dont la neutralité a été foulée au pied par l’envahisseur, en est sortie particulièrement meurtrie. Il est notamment intéressant d’apprendre que les pacifistes, et plus particulièrement les femmes investies dans le mouvement, se sont penchés sur les manuels scolaires de l’époque et se sont insurgés contre les jouets liés à la guerre.
Plus globalement, le désarmement  est apparu  aux progressistes comme le meilleur moyen de réorienter les dépenses publiques vers les mesures sociales.
L’antimilitarisme de l’après guerre trouva une partie de son explication dans les interventions musclées des soldats lors de mouvements de grève, et la conviction qu’ils étaient in fine  les complices du capitalisme, tant à l’interne qu’à l’international.  L’antagonisme linguistique propre à la Belgique se manifesta aussi dans l’identification au patriotisme ou non.
On s’intéressera ici à  la création de la SDN, la Société Des Nations,  à Genève en 1919, sous l’impulsion du président américain Wilson,  ainsi qu’aux autres mouvements  spécifiquement investis dans le désarmement, tel le Rassemblement Universel pour la Paix. Aux réactions suscitées par la montée du fascisme et du nazisme, mouvements perçus comme les incarnations les plus diaboliques qui soient de l’impérialisme économique. A l’Organisation des Nations Unies  et de ses Instances juridiques internationales, ainsi qu’à la mise en place des bataillons de casques bleus. Aux actions des pacifistes qui estimaient que l’ONU devait revenir à ses missions initiales telles que définies par la Charte. 

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Le parcours appréhende les  grands rassemblements destinés à la jeunesse, des mouvements qui se sont polarisés sur les dangers de  la Guerre Froide, sur l’ «assujettissement » de la Belgique à l’OTAN, sur la dénonciation de la guerre au Vietnam et du soutien apporté par les Etats-Unis aux dictatures sud-américaines, sur  l’encouragement aux indépendances en Afrique et en Algérie notamment.
©Michèle Jacobs Hermes

 Œuvrer pour la paix passe immanquablement par la dénonciation de  la bombe atomique au lendemain d’Hiroshima. Une manifestation rassemblant 400 000 personnes à Bruxelles, en 1983, reste dans beaucoup de mémoires : il s’agissait d’empêcher l’installation en Belgique de missiles. Ce seront ensuite les essais nucléaires qui polariseront les attentions, puis le poids du lobbying des marchands d’armes au sein de l’Union européenne.

Faites l’amour, pas la guerre : la contre-culture hippie à la belge…
Enfin, la troisième partie de l’exposition  a été baptisée « Agir par la non-violence » et s’intéresse tant aux prises de position individuelles, comme l’objection de conscience, qu’aux manifestations de masse dans les années 60 à 80, parmi lesquelles des sit-in, des happenings et des chaînes humaines, inspirés du mouvement « Peace and Love ». 

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Le pacifisme est alors  généralement le fait  d’ONG, voire de syndicats, souvent antagonistes, mais peu à peu fédérés au travers d’organes de coordination mondiaux.
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La chute du Mur de Berlin en 1989 signe un tournant dans les méthodes des mouvements pacifistes et dans leurs objectifs. La contestation donne lieu à de nouveaux instruments de communication. Des personnalités comme Martin Luther King, Gandhi  et aujourd’hui  Aung San Suu Kyi continuent à susciter l’admiration.
Cette nouvelle forme d’adhésion à des idéaux pacifistes qui passe aujourd’hui par les réseaux sociaux, renoue avec les  grands rassemblements comme on l’a vu en Belgique et en France, et avec la prise de conscience de la réal-politique. La Belgique n’a pas été absente des guerres du pétrole en Irak ; elle participe, à son échelle, aux opérations militaires de l’heure. Et les chercheurs en charge de l’exposition n’ont pu s’empêcher de remarquer que, dans certains conflits, la couverture médiatique qui en est faite  parle pudiquement  de « frappes chirurgicales » voire d’  « interventions humanitaires ». Serait-ce ce que l’on désigne par le mot « euphémisme » ?
 
 

Jusqu’au 23 avril (Entrée libre).
Université Libre de Bruxelles-Salle Allende Campus du Solbosch. Avenue Paul Héger à 1050 Bruxelles (www.ulb.ac.be/culture)
 
Du 16 septembre 2016 au 14 mai 2017 : au Mundaneum à Mons (www.mundaneum.be)

Le brexit de la santé en Grèce
L’Université Libre de Bruxelles ose la paix. Elle ose aussi actuellement la solidarité ! A l’initiative du doyen sortant de sa Faculté de Médecine, Yvon Englert, elle lance 3 actions très concrètes pour venir au secours des Grecs, patients et praticiens confondus.
Si vous souhaitez participer aux projets « Pirée », « Eubée » et « Thessalonique », rendez-vous sur :
www.urgencesGrece.eu