Fil d'Ariane
Avec l'écrivain Hugo Ball, le plasticien Marcel Duchamp, le peintre et architecte Marcel Janco, le groupe veut dénoncer l'absurde, pratiquer l'anarchisme dans l'art. Il prône une liturgie du dégoût. Dans le groupe, on trouve également l'écrivain et photographe Hemmy Hennings et le peintre Hans Arp.
Au cabaret Voltaire, à Zurich, où est né le mouvement, Tristan Tzara, (de son vrai nom Samuel Rosenstock) note dans son journal : "1916 - février. Dans la plus obscure rue sous l'ombre des côtés architecturaux, où l'on trouve des détectives discrets parmi les lanternes rouges - Naissance- naissance du Cabaret Voltaire".
Tristan Tzara est l'imprésario du scandale. Il est dynamique, inventif. Il se hâte de préciser que "tout le monde est directeur du mouvement Dada" et, à celles et ceux qui en douteraient, ce provocateur de génie donne dans le Bulletin Dada la liste des 80 présidents et présidentes !
"Comment veut-on ordonner le chaos qui constitue cette infinie informe variation : l’homme ? Le principe : « aime ton prochain » est une hypocrisie" Tristan Tzara (extrait du manifeste Dada - 1918
Tzara arrive à Paris en 1919 et le mouvement s'implante naturellement à grands coups de scandales et de provocations. La presse se déchaîne. Les dadaïstes font irruption dans les institutions artistiques. Ils sèment un trouble inédit jusque là. André Breton et Aragon adhèrent aussitôt. Il souffle sur Paris un vent de souffre particulièrement rafraîchissant.
Une communion s'établit, ou plutôt une connivence se crée entre les "historiques" de Dada et ce sang frais parisien. Aragon proclame avec virulence : " Vous êtes les maîtres de tout ce que vous casserez. On a fait des lois, des morales, des esthétiques, pour vous donner le respect des choses fragiles. Ce qui est fragile est à casser. Eprouvez votre force une fois ; après cela je vous défie bien de ne pas continuer. Ce que vous ne pourrez casser vous cassera, sera votre maître".
Impossible de récupérer ce mouvement qui revendique haut et très fort son absurdité. Le mouvement déconcerte, séduit, scandalie, fascine. Tristan Tzara écrit : "... Dada ne signifie rien [...] Je suis contre les systèmes, le plus acceptable des systèmes est celui de n'en avoir aucun [...] Que chaque homme crie : il y a un grand travail destructif, négatif, à accomplir. Balayer, nettoyer [...] Abolition de la mémoire : DADA ; abolition de l'archéologie : DADA ; abolition des prophètes : DADA ; abolition du futur : DADA [...] Liberté : DADA, DADA, DADA, hurlement des douleurs crispées, entrelacement des contraires et de toutes les contradictions, des grotesques, des inconséquences : LA VIE. ".
En 1921, Dada offre même "50 francs de récompense à qui trouve le moyen de nous expliquer Dada".
André Breton en 1922 organiste un "congrès pour la détermination des directives des directives de la défense de l'esprit moderne".
L 'initiative irrite Tzara.
Pour lui, Dada est contre le "modernisme" qui est une notion déjà périmée. Tzara considère "que le marasme actuel, résulté du mélange des tendances, de la confusion des genres et de la substitution des groupes aux individualités, est plus dangereux que la réaction".