Daft Punk ? Saviez-vous que...

Onde de choc sur la planète musique : c'est par une vidéo énigmatique postée sur les réseaux sociaux, sobrement intitulée "Epilogue", que les Français Daft Punk, duo électro le plus célèbre au monde, ont annoncé ce lundi 22 février 2021 leur séparation. Retour sur quelques secrets de leur histoire et leur formidable réussite.
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Daft Punk ? Saviez-vous que...
Les Daft Punk, lors de la dernière cérémonie des Grammy Awards à Los Angeles (photo AFP)
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La vidéo d'un peu plus de 8 minutes montre les deux membres, sous leurs traditionnels masques de robots, avancer dans un désert. Mais ils ne marchent plus du même pas et après quelques signes de tête évocateurs, ceux d'un renoncement, l'un finit par enclencher le système d'auto-destruction de l'autre, qui se pulvérise.

C'est le clap de fin du tandem formé en 1993 par Thomas Bangalter, 46 ans, et Guy-Manuel de Homem-Christo, 47 ans. Cet article a été publié en 2014.

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Les débuts de Daft Punk


A ses débuts, en 1992, le couple de musiciens, Guy-Manuel de Homem-Christo (né le 8 août 1974), et Thomas Bangalter (né le 1er janvier 1975) se nommait “Darlin” et ils étaient… trois. Laurent Brancowitz, guitariste, les quitte peu de temps après pour rejoindre le groupe « Phoenix ». C’est suite à un article assassin du magazine britannique Melody Maker qui qualifie leur musique de "daft punky trash", (“punk nul” ou “punk timbré”) que les deux compères sont séduits par l’appellation… Et qu’ils adoptent aussitôt le nom pour baptiser leur nouvelle association musicale.

 

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Les Daft Punk sans casque (1995)

Pourquoi ces casques ?


Thomas Bangalter expliquait en 2007 : “Nous essayons de séparer notre vie privée de notre vie publique. La célébrité nous embarrasse. Nous ne voulons pas être reconnus dans la rue. Les médias ont accepté de nous laisser porter des masques, ce qui nous ravit. Peut-être que cela déçoit les gens, mais c'est la seule façon pour nous de faire de la musique. Il ne faut pas forcément faire la une des magazines pour faire de la bonne musique". Pertinent et surtout très efficace atout marketing. Cette communication minimaliste, ils la revendiquent crânement : "A une époque où les artistes ont tendance à communiquer toutes les cinq secondes sur les réseaux sociaux, le succès de notre présentation tient à ce que nous ne nous exprimons que tous les cinq ou huit ans. Comme quelqu'un qui ne parle jamais pendant les dîners de famille et qu'on écoute d'autant plus le jour où il se décide."
 
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David Bangalter, alias Daniel Vangarde, père de Thomas Bangalter, des Daft Punk

Le Papa de Thomas


Le père de Thomas Bangalter, David Bangalter, est une figure du show-biz français connu sous le nom de Daniel Vangarde à qui l’on doit notamment l'inénarrable  Jouez Bouzouki interprété par… Dalida  !

« Jouez Bouzouki, jouez Bouzouki
Que l'hiver vole en éclats
Jouez Bouzouki, jouez Bouzouki
Pour moi
C'est la fête à qui voudra »


L’auteur fait aussi dans un registre plus grinçant : la chanson antimilitariste. Ainsi, il écrit "Un bombardier avec ses bombes" qu'il interprète en juillet 1975 dans une émission spéciale consacrée au journaliste Philippe Labro :

"Je ne suis qu’un maillon d’une chaine
Tous les soirs je rentre fatigué
Est-ce ma faute si dans mon usine
On fabrique à longueur de journée
Des bombardiers avec des bombes ?"


Rien d’inoubliable, mais c’est lui qui obligera son fils Thomas à apprendre le piano dès l’âge de 6 ans.  
 
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Photo AFP

Les droits d’auteur


Le duo, qui pèserait aujourd’hui environ 60 millions de dollars, a rempli sa demande d'adhésion à la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem) en tant qu'auteur-compositeur le 4 décembre 1996. Quelques mois plus tard, c’est le bras de fer avec la Sacem, l’organisme français chargé de collecter et de reverser les droits musicaux. Daft Punk entend gérer leurs "droits mondes" comme ils le souhaitent. La justice leur donne gain de cause. Le groupe accorde à la Société d’auteurs la gestion d'une partie seulement de leurs droits sur la France et "les territoires Sacem". A l'étranger, précise le quotidien français Libération, ils se sont inscrits à la PRS (Performing Right Society) anglaise, à qui ils ont confié la gestion de leurs droits et, parallèlement, pour les États-Unis et le Canada, ils ont adhéré à la BMI.

En mars 2001, le duo se montre très attentif à la question des droits musicaux et déclare : "Nous avons eu des problèmes avec le RPR (parti politique français ndlr) ou France 2, qui avaient utilisé notre musique pour des clips de campagne ou des bandes-annonces de matchs de foot sans nous demander notre avis. Si on avait fait partie de la Sacem, on aurait perdu ces procès, car elle a des accords globaux. Si c'est ça la gestion collective, on n'en veut pas."
 
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Photo AFP

Des honneurs, déshonneur ?


Si le duo électro a raflé la mise dimanche dernier lors des 56ème Grammy Awards à Los Angeles (meilleur enregistrement, meilleur album de l’année), le couple avait cependant déjà reçu, en 2009, la prestigieuse récompense pour le meilleur album électronique ("Alive 2007") et pour celui du meilleur titre pour "Harder Better Faster Stronger" dans la même catégorie.

En juillet 2010, les Daft Punk sont faits chevaliers de l’Ordre des arts et des lettres au titre de "musicien, producteur et scénariste". Une initiative du ministre de la Culture d’alors, Frédéric Mitterrand. Mais les musiciens ne semblent pas courir après les honneurs décernés par les professionnels français de l’industrie du disque. Depuis leur premier album, Homework, en 1997, les 600 professionnels n’ont jamais récompensés leurs disque, mais ils ont été sélectionnés dans la catégorie "spectacle musical". Par deux fois, ils ont dû s’incliner face à Olivia Ruiz (2007) et Michel Polnareff (2008). On dira que nul n'est prophète en son pays. Et le premier label qui les a signés de rappeler qu'ils "ont été acclamés en Angleterre avant la France".

Est-ce la raison qui pousse les Daft Punk à refuser d'être éligible pour la cérémonie française des Victoires de la musique ? Peut-être. Reste que le groupe n'a quasiment plus de rapport avec la France. Il vit en effet une bonne partie de l'année à Los Angeles, leur maison de disques est une filiale américaine du groupe japonais Sony et leurs célèbres casques sont de conception américaine. La francophonie est bien loin..
 
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Photo AFP

Enlever ses œillères


Dans l'une de leurs très rares interviews, les Daft Punk, au journal Le Figaro,  expliquaient la genèse de leur dernier album et donnaient quelques clefs de compréhension sur leur univers musical. Le ton était sans complaisance : " Le vrai tournant est qu'il s'agit de notre premier album enregistré dans un vrai studio. Nous sommes entrés par la porte de la house parisienne à nos débuts, puis nous en avons ouvert d'autres… Nous avons l'impression de faire de la dance music avant tout. Si nous n'avons pas utilisé de samples, c'était pour pouvoir jouer toute la musique, créer la matière nous-mêmes. Nous sommes passés de l'échantillonnage à la re-création, comme si nous avions joué les samples que nous utilisions auparavant.

À la fin des années 1990, nous avons démontré qu'il était possible de faire des disques à la maison. Aujourd'hui, ce qui nous intéressait était d'aller dans un studio d'enregistrement (...) Le contre-courant, c'est enlever ses œillères et ouvrir le champ des possibilités. Il y a eu des films réalisés pour 1000 dollars qui ont montré qu'on peut raconter des histoires sans moyen. C'est un peu ce qui s'est passé dans la musique: après quinze ans de crise, le formatage et la normalisation des moyens de production se sont imposés. Notre projet est une proposition pour dire qu'on est en mesure d'expérimenter de façon ambitieuse en reprenant les meilleures choses du passé pour les réinjecter dans le présent. Nous ne sommes pas passéistes, mais, en terme de contenu, la musique actuelle manque d'ambition créative.
"