Voix envoûtante, physique androgyne, icône des nuits parisiennes revenue en grâce en 2001 avec Comme un boomerang en duo avec Étienne Daho, Dani est décédée le 18 juillet à 77 ans.
La chanteuse, également actrice et mannequin, entre autres, est décédée dans la soirée du 18 juillet des "
suites d'un malaise" dans la région de Tours où elle résidait, a indiqué à l'AFP son manager Lambert Boudier.
Elle venait de finir la tournée de son dernier album
Horizons Dorés et achevait déjà la préparation d'un nouvel album.
Dani (Danièle Graule à l'état civil) avait choisi d'appeler ce dernier album
Attention Départ. "
Nous étions prévenus, elle avait juste oublié de nous dire qu'il serait imminent", a écrit sur Facebook son entourage professionnel.
"
Rien n'était plus important pour elle que créer, chanter, être entourée de ceux qu'elle aime", peut-on encore lire. "
Si Dani a inspiré tant d'artistes, photographes, cinéastes, paroliers, compositeurs, metteurs en scène, c'est qu'elle était un souffle de vie puissant, une nature entière, débordante d’amour et d'énergie", ajoute son manager.
"
C'est un vrai personnage, elle a une vraie épaisseur, chez elle pas d'afféterie, elle ne joue pas un rôle, il y a un vrai désir de sculpter une trajectoire d'artiste", décrivait à l'AFP en 2020 Bertrand Dicale, spécialiste de la chanson française.
"Pas comme les autres"
Même si, comme elle le disait il y a deux ans de sa voix aux délicates aspérités : "
ce n'est pas toujours facile de prendre des chemins pas comme les autres". "
C'est très chaotique, mais avec des belles rencontres".
Dani fut la reine du "
Paris by night" des années 70, aux commandes alors de L'Aventure, night-club branché, version française du mythique Studio 54 de New York.
François Truffaut la choisit pour le rôle de Liliane dans
La Nuit américaine, mise en abyme sur le monde du cinéma, Oscar 1974 du meilleur film étranger.
En 1987, l'ex-égérie yéyé avait raconté sa descente aux enfers dans
Drogue la galère.
Elle a un parcours rare d'une dilettante assumée, faite de rencontres et de bons hasards.
Étienne Daho
La rencontre avec Daho
Boudée par les maisons de disques à cause de sa fréquentation des paradis artificiels elle était revenue sur le devant de la scène grâce à Étienne Daho en 2001. Ce dernier lui avait proposé de chanter en duo
Comme Un Boomerang, titre composé pour elle par Serge Gainsbourg mais recalé pour l'Eurovision et oublié. Un grand succès, alors qu'elle n'y croyait pas au départ.
"Elle me parlait de temps en temps de cette chanson que Serge Gainsbourg lui avait écrite pour l'Eurovision en 1975 et qui n'était jamais sortie [jugée trop osée à l'époque]." raconte Étienne Daho à l'AFP
. "J'ai fréquenté Serge pendant quelque temps et je ne l'ai jamais entendu évoquer cette chanson qu'il aurait pu proposer à l'une de ses interprètes. Nous avons fini par retrouver cette chanson, qui était tellement parfaite pour elle que je lui ai immédiatement proposé de produire un single". La chanson n'était pas conçue comme un duo explique l'auteur compositeur
: "La chanson était arrangée pour elle et dans sa tonalité. Mais, pendant l'enregistrement, elle a insisté pour que je lui donne la réplique. Je ne croyais pas du tout que la chanson et le texte puissent être taillés pour un duo. Pour lui montrer qu'elle avait tort, j'ai chanté toute la chanson et, à notre grande surprise, la magie a opéré. Dani avait eu la bonne intuition et cette chanson, qui a eu un énorme succès à sa sortie, est dorénavant un classique. Elle était dans un moment compliqué de sa vie et cette chanson l'a heureusement remise dans la lumière. Elle a un parcours rare d'une dilettante assumée, fait de rencontres et de bons hasards. Chanteuse, mannequin, meneuse de revue, actrice, rosiériste... Elle a toujours fait les choix du coeur, jamais ceux de l'argent. L'absolu contraire d'une carriériste".Depuis, elle avait retrouvé un statut d'icône, qui l'embarrassait. "
Il y a un côté figé alors que j'ai l'impression d'être dans le mouvement", confiait-elle à l'AFP en 2020. Elle préférait parler d'un "
parcours atypique" : mannequin, chanteuse, actrice, meneuse de revue, fleuriste...
Elle incarnait la rock attitude dans toute sa splendeur.
Étienne Daho
C'est ainsi qu'Étienne Daho veut s'en souvenir "toujours libre et dans le présent".
L'auteur compositeur joint par l'AFP ce 19 juillet avait encore parlé la veille avec son amie.
"Elle n'avait de regret d'aucune sorte, pas de nostalgie. Je lui ai parlé hier à 19h30, très longuement. Elle préparait un nouvel album, Attention départ, titre que j'ai interprété comme un nouveau départ pour elle. Ironie du sort, ce titre a une autre résonance aujourd'hui. Elle était joyeuse, très excitée par son prochain album et me demandait conseil. Quand j'ai appris la nouvelle ce (mardi) matin, je ne pouvais y croire. Elle avait une telle énergie, un tel humour, une belle légèreté, beaucoup de bienveillance. Elle avait toujours des tas d'anecdotes et des histoires drôles à partager. C'était une conteuse née qui charmait son monde. Elle n'était pas du tout conventionnelle et aimait la marge. La tonalité de ses dernières tournées avec la guitariste Emilie Marsh était à son image. Ce n'était pas une image frelatée, pas un jeu, elle incarnait la rock attitude dans toute sa splendeur".