
Un homme apporte une composition florale à la famille de l'écrivain hispano-péruvien Mario Vargas Llosa dans le quartier de Barranco à Lima, le 14 avril 2025
Drapeaux en berne et deuil national: Lima est plongée dans le recueillement après la mort du prix Nobel de littérature Mario Vargas Llosa, dont l'oeuvre prolifique s'est souvent nourrie des rues et quartiers de la capitale péruvienne.
Les premières oeuvres de l'écrivain hispano-péruvien se déroulent dans la ville bordée par l'océan Pacifique, notamment "Conversation à la Cathédrale" et "La Ville et les Chiens".
Ce dernier roman, publié en 1963, prend pour décor le collège militaire Leoncio Prado, où Vargas Llosa fut interne au début des années 1950. Lundi, au lendemain de sa mort, les cadets de l'établissement lui ont rendu hommage en formant, en rangs serrés, ses initiales MVLL, a constaté l'AFP.
Plusieurs fois primée, l'oeuvre qui relate le climat de violence régnant dans l'académie militaire a contribué à faire émerger le mouvement littéraire du "boom latino-américain", dont Vargas Llosa était le dernier représentant vivant.
Dans le reste de la ville, les hommages sont discrets mais chargés d'émotion.
Alvaro Vargas Llosa, fils de l'écrivain Mario Vargas Llosa, s'entretient avec le personnel de sécurité dans le hall de l'appartement de son père dans le quartier de Barranco à Lima, le 14 avril 2025
Quelques compositions florales ont notamment été livrées à son domicile du quartier bohème de Barranco, où quelques admirateurs s'étaient rassemblés dès dimanche soir, tandis que les principales oeuvres de l'écrivain étaient mises à l'honneur dans les vitrines des librairies.
"Nous, les littéraires, sommes en deuil. C'est l'un des meilleurs écrivains péruviens qui a écrit dès son plus jeune âge", confie à l'AFP Maryori Otera, 25 ans, responsable de la librairie Crisol, située au coeur du quartier de Miraflores.
C'est autour de la place principale de ce quartier touristique que Vargas Llosa situe ses premiers romans à la fin des années 1950. Un circuit touristique permet de découvrir les lieux qui ont inspiré son oeuvre.
"C'est une grande perte pour le Pérou, pour le monde et pour l'Amérique latine", estime la libraire de Crisol.
A quelques rues de là, dans la librairie El Virrey, le poète Fernando Gonzalez-Olaechea évoque "une profonde tristesse", en achetant un exemplaire du roman primé "La maison verte" (1966).
"La mort de Vargas Llosa est la mort d'un espace intime chez chacun de ses lecteurs", regrette-t-il. "Son héritage artistique est énorme, c'est un écrivain titanesque".
Près d'un kiosque à journaux, Oscar Trelles, 60 ans, dit se souvenir de Mario Vargas Llosa "comme d'un monstre de la littérature latino-américaine et mondiale".
L'écrivain Mario Vargas Llosa à Madrid en octobre 2009
"Vargas Llosa, Péruvien universel et éternel", "Adieu à un géant des lettres" ou encore "Vargas Llosa, dans le coeur du Pérou", titrent les Unes des journaux locaux.
"Il laisse un vide qu'il sera très difficile de combler", assure l'électricien Guerli Peralta. "Vargas Llosa et son oeuvre m'ont beaucoup aidé à mieux comprendre l'identité péruvienne. Et il m'a aussi beaucoup aidé, dans ce sens, à mieux découvrir cette identité en moi-même".
Sur le circuit touristique dédié à Vargas Llosa, un autre lieu occupe une place particulière: la modeste maison crépie de gris où il vécut dans les années 1950 avec sa femme et tante par alliance Julia Urquidi. Leur relation inspira son roman "La Tante Julia et le Scribouillard".
"Sa mort nous laisse le souvenir de l'ancienne Lima, de son époque et de ses expériences", témoigne auprès de l'AFP Jaime Suarez, dont la maison fait face à celle où résida l'écrivain.
Ces derniers mois, l'auteur de plus de 30 ouvrages, entre romans, nouvelles, pièces de théâtre et reportages journalistiques, avait entrepris une forme de pèlerinage dans Lima, accompagné de son fils Alvaro, selon les photos publiées par ce dernier sur X.
Dans la ville de dix millions d'habitants, le drapeau péruvien flottait lundi en berne sur les mairies, les casernes militaires et les institutions publiques, en application du deuil national décrété par le gouvernement.