C'est bien connu, les vrais artistes ne meurent jamais. Et aux États-Unis, on le prouve ! Des techniciens viennent de ressusciter Michael Jackson sous forme d'hologramme pour les Bilboards Music Awards. Un joli coup médiatique qui coïncide avec le 5ème anniversaire de la mort du chanteur et la sortie d'un album posthume.
Le retour des artistes disparus sous forme d'hologramme ? Un marché potentiellement lucratif.
Un effet saisissant
Les invités en sont restés l’œil écarquillé, le souffle court. Sur scène, à quelques mètres d'eux, Michael Jackson ! Paradoxe : ce n'était pas le vrai mais c'était bien le même !
Il s'agissait d'un hologramme, une image en trois dimensions qui, par un effet visuel, permet de recréer une présence virtuelle particulièrement réaliste.
Et le public de se frotter les yeux. L'artiste interprétait "Slave to the rythm", l'un des huit titres de l'album posthume "Xscape". Le teint pâle, vêtu d'un habit de lumière, avachi dans un fauteuil royal, Michael Jackson semblait prêt à bondir, et bondissait bientôt pour servir une chorégraphie impeccable accompagnée par une dizaine de danseurs.
Pourtant, jusqu'à la dernière minute, Michael Jackson a bien failli ne pas revenir d'entre les morts. Deux entreprises ont cherché à bloquer cette performance numérique. Hologram USA Inc et Musion Das Hologram Ltd, détentrices de plusieurs brevets, contestaient l'utilisation de cette technologie. Mais Kent Dawson, le juge fédéral, a tranché : selon lui, il n'y avait pas suffisamment de preuves pour affirmer que l'image prévue en 3-D violerait les brevets détenus par les deux compagnies. Il confortait ainsi l'avis de plusieurs avocats qui déclaraient que les techniques utilisées étaient dans le domaine public et donc libres de droit. Le spectacle a ainsi pu avoir lieu. Mais la bataille judiciaire n'est pas éteinte. Elle se poursuivra dans les semaines à venir.
Elvis, John et Jimmy
Ce n'est pas la première fois que la technologie ressuscite les artistes disparus. En 2007, Elvis Presley, plus de trente ans après son décès, "remonte sur scène" pour un duo avec Céline Dion. En novembre 2011, la chanteuse Maria Carey, pourtant bien vivante, donnait un concert dans cinq villes européennes à la fois, grâce aux techniques holographiques. En 2012, lors d'un festival de musique en Californie, le rappeur américain Tupac Shakur, décédé 16 ans plus tôt lors d'une fusillade, faisait un étrange retour sous les feux de la rampe via un hologramme projeté sur scène.
Depuis lors, beaucoup d'entrepreneurs fantasment sur d'improbables affiches : John Lennon et Jimmy Hendrix, Jim Morrisson en duo avec Barbara Straisand, toutes les combinaisons holographiques semblent réalisables. Pour le meilleur, pour le pire, et surtout pour l'argent. Reste que l'affaire, si séduisante qu'elle paraisse, n'est pas sans risque. L'entreprise Digital Domain, qui était leader dans ce secteur d'activité (et dont l'un des membres fondateurs n'était autre que le réalisateur James Cameron), a mis la clef sous la porte après 20 ans d'activités. La société, qui avait pourtant remporté un Oscar pour son travail sur le personnage vieillissant de Brad Pitt dans " L’Étrange histoire de Benjamin Button " affichait, il est vrai, des dettes à hauteur de 214 millions de dollars.
Depuis cette faillite, c'est Hologram USA qui a récupéré les droits sur les brevets des projections d'hologramme. Et la nouvelle société, sous l'impulsion du sulfureux milliardaire Alki David, entend bien les faire respecter.
Amy Winehouse, le retour ?
En mars, Hologram USA a intenté une action en justice contre le Cirque du Soleil (et MGM Resorts International) pour son spectacle, "ONE Michael Jackson". En cause, l' "interprétation numérique" de Jackson, et l'utilisation non autorisée de sa technologie. L'affaire est actuellement examinée par le tribunal fédéral de Los Angeles. C'est que l'enjeu est de taille. Le spectacle du Cirque du Soleil a rencontré un énorme succès, et ses retombées financières frôlent le milliard de dollars. Alki David, omniprésent dans les médias américains (chaînes de TV, production cinéma), rappelle à qui veut l'entendre que l'âge moyen de l'audience des téléspectateurs aux États-Unis dépasse les 40 ans mais que la majorité des utilisateurs d'Internet qui utilisent les sites vidéo ont entre 18 et 30 ans. Pourquoi, dès lors ne pas créer des programmes susceptibles de satisfaire ces deux publics ? La technologie des hologrammes, qui réunirait des stars intergénérationnelles, pourrait être un moyen, parmi d'autres, de satisfaire ces tranches d'âges.
Affaire à suivre...
L'homme d'affaire aime dérouter ses interlocuteurs. Il veut s'imposer partout où l'on ne l'attend pas. Il y a deux ans, ne confiait-il pas à "The Hollywood Reporter" : "J'ai essayé de suivre la ligne droite, conventionnelle. C'est tout à fait ennuyeux. Nous sommes nés pour créer, inspirer et apporter ainsi notre contribution, à la mesure de nos moyens". Cela tombe bien. Les siens sont immenses.
Dernier projet du milliardaire fantasque : une tournée mondiale de la chanteuse Amy Winehouse, décédée en juillet 2011 à l'âge de 27 ans. Il vient d'expliquer au journal britannique The Sun : "Le plan, c'est qu'Amy (sic) fasse enfin son tour du monde (elle n'a pas pu le faire quand elle était vivante), avec un orchestre et son hologramme, elle peut aller sur scène et les fans peuvent la voir reprendre ses plus grands hits ".
Le père de l'artiste n'a toujours pas donné son accord.
Décidément, le show bizness est impitoyable. Les morts célèbres n'ont pas droit au repos éternel.