Après Calder en 2017 et le Corbusier en 2018, le bleu Klein envahit le sous-sol du musée. L’exposition "Yves Klein, des cris bleus…" propose 65 pièces en majorité tirées des archives Yves Klein autour d’un bassin de ce bleu dit IKB (International Klein Blue) déposé en 1960 à l’INPI, l’Institut national de la propriété industrielle.
Le mantra de Klein : saisir la beauté qui existe à l’état invisible, et pour cela se libérer de la ligne en se tournant vers la monochromie. Son bleu vibre et vibrionne, éblouissant le regard, donnant à voir ce qui n’est pas représenté mais pourtant sur la toile.
Une exposition qui ne révolutionnera pas pour les amateurs la connaissance de ce peintre mort à 34 ans, passé tel une météore dans les 60’s (1928-1962) mais qui après l’imposant accrochage à Beaubourg offre dans le Sud de la France et à tous ceux qui le découvriront lors de leur passage dans l’Aveyron une belle entrée en matière à son œuvre. Après les noirs changeants de Soulages, découvrir le bleu saturé de Klein électrise durablement le regard.
Fils né à Nice de parents peintres (sa mère Marie Raymond est la marraine de Soulages), le jeune Yves songe à une carrière dans la marine marchande mais faute de réussir au concours, se tourne vers le judo, sa première expérience d’ "espace spirituel".
Il y rencontre le sculpteur Arman et le poète Claude Pascal (dont est exposé le Portrait Relief à Rodez) qui décrit ainsi leur rencontre : "En 1947, face à cette mer imbécile où se consument les vieillards de la France et de l’art, nous avions la vingtaine et nous nous nourrissions de l’or et du fer contenus dans l’air".
Les trois compères se partagent alors le monde : à Arman, la terre et ses richesses, à Claude Pascal l’air et à Yves Klein le ciel, le bleu et l’infini.
Après une formation à Londres à la feuille d’or chez un encadreur, il part en août 1952 au Japon pour obtenir le 4ème dan de judo, le plus haut grade obtenu par un judoka européen. Grade refusé à son retour par la fédération française de judo.
Klein se tourne vers son "Aventure monochrome", une aventure qui commence par un refus. En 1955, son monochrome orange est refusé par le Salon des réalités nouvelles, pourtant consacré à l’art abstrait au motif que nul motif ne figure sur la toile. Un an après il met au point son bleu IKB et adopte sa devise : "Pour la Couleur ! Contre la ligne et le dessin !"
Le judo fondé sur les forces et éléments du cosmos (eau, air, terre, feu) a forgé l’esprit de Klein. Son intérêt pour la philosophie des Rosicruciens en quête des forces spirituelles gouvernant l’univers a complété sa mystique.
Le monde est le principal acteur de l’art. Le nom de ses œuvres en est révélateur : Architecture de l’air (1959 projet avec l’architecte Claude Parent) et une conférence à la Sorbonne la même année intitulée "L’évolution de l’art vers l’immatériel", Reliefs planétaires et Cosmogonie Rose (1961).
Six mois après son mariage le 6 juin 62, Yves Klein comme il l’avait prédit meurt précocement d’une crise cardiaque. Son ancienne assistante, Rotraut, devenue son épouse n’en a pas la preuve mais en est persuadée : le bleu IKB et ses vapeurs toxiques ont tué leur inventeur.
"Le siècle Soulages" du 15 juin au 10 novembre 2019.
"Yves Klein, des cris bleus" du 21 juin au 3 novembre 2019.