La préhistoire
C'était il y a longtemps. Presque 40 ans. A une époque où internet n'existait pas, où il n'y avait pas de téléphone mobile et où les "réseaux sociaux" ne relevaient pas de quelques clics mais se construisaient, parfois, après de vraies claques et quelques verres de bières dans un bar enfumé.
C'était en 1975. Autant dire la Préhistoire.
La Grande-Bretagne allait mal. Le Thatchérisme grignotait les esprits. Les élites britanniques pensaient que le libéralisme politique allait sauver l'économie. Margaret Tatcher, surnommée "La dame de fer" s'y employait avec un zèle redoutable. La casse sociale risquait d'être importante ? Tant pis ! Il fallait coûte que coûte redresser le pays, juguler l'inflation, éradiquer le chômage ! Alors, pendant que les travaillistes pataugeaient, les conservateurs peaufinaient leur plan. Il consistait à passer en force, faisant fi des syndicats, à dégraisser au maximum les services publics considérés, par nature, comme non rentables et à mener une large politique de privatisations. Tous les secteurs allaient être bientôt touchés : éducation, services, santé.
Pour celles et ceux qui étaient nés du mauvais côté de la barrière, les sans-grades, les employés, les perspectives d'avenir s’annonçaient plutôt sombres. Perspective insupportable pour John Lydon.
L'adolescent, fils d'immigrés Irlandais, vivait alors dans une cité au nord de Londres.
Une forte tête, ce Lydon ! Diverses épreuves de la vie l'ont endurci. Durant son enfance, le gamin a attrapé une méningite et en sortant du coma, il a dû réapprendre à parler mais aussi à se souvenir. Il confiera au journal Le Monde : "L'impact le plus important a été celui de mon amnésie. J'ai mis quatre ans à retrouver mes souvenirs. Cette expérience terrible m'a forcé à un travail d'autoanalyse qui m'a fait comprendre la nature temporaire d'une personnalité. C'est à partir de là que j'ai pris le mensonge en horreur. Je devais si désespérément me reposer sur la parole des autres pour connaître la vérité, que la moindre tromperie me traumatisait. J'ai décidé alors de ne plus jamais mentir. Quitte à me faire quelques ennemis."
Il sera servi.
C'était il y a longtemps. Presque 40 ans. A une époque où internet n'existait pas, où il n'y avait pas de téléphone mobile et où les "réseaux sociaux" ne relevaient pas de quelques clics mais se construisaient, parfois, après de vraies claques et quelques verres de bières dans un bar enfumé.
C'était en 1975. Autant dire la Préhistoire.
La Grande-Bretagne allait mal. Le Thatchérisme grignotait les esprits. Les élites britanniques pensaient que le libéralisme politique allait sauver l'économie. Margaret Tatcher, surnommée "La dame de fer" s'y employait avec un zèle redoutable. La casse sociale risquait d'être importante ? Tant pis ! Il fallait coûte que coûte redresser le pays, juguler l'inflation, éradiquer le chômage ! Alors, pendant que les travaillistes pataugeaient, les conservateurs peaufinaient leur plan. Il consistait à passer en force, faisant fi des syndicats, à dégraisser au maximum les services publics considérés, par nature, comme non rentables et à mener une large politique de privatisations. Tous les secteurs allaient être bientôt touchés : éducation, services, santé.
Pour celles et ceux qui étaient nés du mauvais côté de la barrière, les sans-grades, les employés, les perspectives d'avenir s’annonçaient plutôt sombres. Perspective insupportable pour John Lydon.
L'adolescent, fils d'immigrés Irlandais, vivait alors dans une cité au nord de Londres.
Une forte tête, ce Lydon ! Diverses épreuves de la vie l'ont endurci. Durant son enfance, le gamin a attrapé une méningite et en sortant du coma, il a dû réapprendre à parler mais aussi à se souvenir. Il confiera au journal Le Monde : "L'impact le plus important a été celui de mon amnésie. J'ai mis quatre ans à retrouver mes souvenirs. Cette expérience terrible m'a forcé à un travail d'autoanalyse qui m'a fait comprendre la nature temporaire d'une personnalité. C'est à partir de là que j'ai pris le mensonge en horreur. Je devais si désespérément me reposer sur la parole des autres pour connaître la vérité, que la moindre tromperie me traumatisait. J'ai décidé alors de ne plus jamais mentir. Quitte à me faire quelques ennemis."
Il sera servi.

Détruire cette solidarité
De cette enfance un peu grise, il confiera à Télérama : "J’ai grandi à l’ombre d’Arsenal, le club dont je suis supporter, et une certaine violence ne m’était pas étrangère. Ça pouvait être brutal, mais ça restait presque bon enfant. Avec le punk, une autre violence a été mise au jour. Celle d’une société britannique bâtie sur l’humiliation constante d’une classe ouvrière traitée comme une bande de demeurés. Quand j’étais jeune, à Finsbury Park, il y avait une mixité incroyable : des Blancs, des Noirs, des Indiens, des Irlandais, des Anglais, des Grecs, des Turcs, qui s’entendaient très bien. On ne jugeait que les personnalités, pas la couleur ou la nationalité. Tous les gouvernements qui se sont succédé se sont acharnés à détruire cette solidarité."
De cette enfance un peu grise, il confiera à Télérama : "J’ai grandi à l’ombre d’Arsenal, le club dont je suis supporter, et une certaine violence ne m’était pas étrangère. Ça pouvait être brutal, mais ça restait presque bon enfant. Avec le punk, une autre violence a été mise au jour. Celle d’une société britannique bâtie sur l’humiliation constante d’une classe ouvrière traitée comme une bande de demeurés. Quand j’étais jeune, à Finsbury Park, il y avait une mixité incroyable : des Blancs, des Noirs, des Indiens, des Irlandais, des Anglais, des Grecs, des Turcs, qui s’entendaient très bien. On ne jugeait que les personnalités, pas la couleur ou la nationalité. Tous les gouvernements qui se sont succédé se sont acharnés à détruire cette solidarité."
God Save the Queen
Le mouvement punk ("vaurien" en français) se construit sur cette colère.
Avec Steve Jones à la guitare, Paul Cook à la batterie et Glen Matlock à la basse (remplacé par Sid Vicious en 1977), le quatuor va bouleverser la scène rock anglaise et donc mondiale. John Lydon, bientôt surnommé Johnny Rotten à cause, parait-il, du mauvais état de ses dents, semble habité par une terrible rage.
L'énergie des Sex Pistols est incandescente.
Sous l'impulsion du très habile Malcolm McLaren, le manager du groupe, les Sex Pistols sortent "God Save the Queen" pendant la semaine du jubilé d'argent de la reine Elizabeth II.
Dans le royaume, la déflagration est quasi-atomique. Les bons sujets britanniques ont presque les oreilles qui saignent en écoutant la chanson-vitriol :
Le mouvement punk ("vaurien" en français) se construit sur cette colère.
Avec Steve Jones à la guitare, Paul Cook à la batterie et Glen Matlock à la basse (remplacé par Sid Vicious en 1977), le quatuor va bouleverser la scène rock anglaise et donc mondiale. John Lydon, bientôt surnommé Johnny Rotten à cause, parait-il, du mauvais état de ses dents, semble habité par une terrible rage.
L'énergie des Sex Pistols est incandescente.
Sous l'impulsion du très habile Malcolm McLaren, le manager du groupe, les Sex Pistols sortent "God Save the Queen" pendant la semaine du jubilé d'argent de la reine Elizabeth II.
Dans le royaume, la déflagration est quasi-atomique. Les bons sujets britanniques ont presque les oreilles qui saignent en écoutant la chanson-vitriol :
"God save the queen
Dieu sauve la reine
The fascist regime
Le régime fasciste
They made you a moron
Ils ont fait de toi un connard
A potential h-bomb
Une bombe H potentielle
God save the queen
Dieu sauve le reine
She ain't no human being
Elle n'est pas un être humain
There is no future
Il n'y a pas de futur
In england's dreamland
Dans le pays féerique d' Angleterre
D'abord un état d'esprit
" Le punk était justement pour moi la révolte contre la ghettoïsation, expliquera-t-il.J’avais toujours griffonné des choses, je lisais beaucoup de poésie, de Keats notamment. Je m’étais même imaginé devenir écrivain. Mais je sentais qu’il manquait toujours quelque chose. C’était la musique. Et ces textes pour les Sex Pistols sont sortis par jets. Ils devaient mûrir au fond de ma cervelle."
Lors d'un entretien au Monde , il se fera plus précis : "Il ne s'agissait pas d'un manifeste ni d'une mode vestimentaire. Le punk est un état d'esprit ouvert à de nouvelles idées, avec la volonté de continuellement évoluer, de chercher la prochaine étape, pas seulement en musique mais dans le monde autour de nous. Quand j'ai écrit les chansons des Sex Pistols, il ne s'agissait pas de parler du chaos pour l'amour du chaos, mais de dire que le gouvernement et les institutions nous induisaient en erreur."
" Le punk était justement pour moi la révolte contre la ghettoïsation, expliquera-t-il.J’avais toujours griffonné des choses, je lisais beaucoup de poésie, de Keats notamment. Je m’étais même imaginé devenir écrivain. Mais je sentais qu’il manquait toujours quelque chose. C’était la musique. Et ces textes pour les Sex Pistols sont sortis par jets. Ils devaient mûrir au fond de ma cervelle."
Lors d'un entretien au Monde , il se fera plus précis : "Il ne s'agissait pas d'un manifeste ni d'une mode vestimentaire. Le punk est un état d'esprit ouvert à de nouvelles idées, avec la volonté de continuellement évoluer, de chercher la prochaine étape, pas seulement en musique mais dans le monde autour de nous. Quand j'ai écrit les chansons des Sex Pistols, il ne s'agissait pas de parler du chaos pour l'amour du chaos, mais de dire que le gouvernement et les institutions nous induisaient en erreur."

Réveiller les consciences et secouer la mentalités des bien-pensants, voici l'objectif vital. Mais pas question, pour autant de jouer les prêcheurs. "J'essayais d'abord de changer ma propre vie, de ne pas accepter de ne pas avoir de débouchés. "No future", c'est ce que le gouvernement offrait à des gens comme moi, venus de la classe ouvrière. Le système scolaire vous maintenait dans votre condition sociale. "Contentez-vous de ces rares boulots." Eh bien, M. Rotten ne s'est pas contenté de ça…(...)Il ne peut y avoir d'avenir à moins de faire les choses par soi-même. A la fin de God Save the Queen, le refrain répète "No future for you", car c'est ce qui nous attend quand on ne fait rien."
La carrière du groupe durera trois ans et ne comptera qu'un seul album studio et quatre singles. Suffisant pour bouleverser l'histoire du rock.