La côte de ces documents s'envole. Une maison d'enchères basée à Boston vient de vendre une lettre de Mozart 217 000 dollars. Rédigé en 1786, le précieux billet, adressé à un ami autrichien, ne contient qu'une simple phrase : "Je vous demande de m'envoyer le quatuor en Sol mineur, la sonate en Mi bémol, et le nouveau trio en Sol".
Le 21 novembre sera mis en vente un "Tintin au Congo", cuvée 1937, avec un hors texte inédit de Hergé. Les experts estiment que la vente pourrait s'envoler et dépasser les 2 millions d'euros.
Il s'agit là de deux ventes encadrées par des réseaux professionnels. Les acquéreurs, souvent des passionnés, sont aussi, parfois, des hommes d'affaires. Ils reniflent le bon placement. Parce qu'il est possible d'acheter des manuscrits en indivision, c'est -à-dire à plusieurs propriétaires, et de générer des revenus en autorisant, par exemple, la location de ces documents à des musées ou à des sociétés. Cerise sur le gâteau, l'investissement est défiscalisé et n'entre donc pas dans le calcul de l'Impôt sur la fortune (ISF). Quand le poids des mots rejoint celui des lingots...
Attention cependant aux risques d'escroquerie. En France, la société Aristophil, qui laissait espérer à des épargnants des rendements très attractifs (près de 9 % par an), concernant des lettres et autres documents historiques a été placée en liquidation judiciaire. 18 000 souscripteurs sont concernés. Le montant des sommes investies - peut-être à perte - attendrait 850 000 euros.
Mais est-il possible de dénicher la bonne affaire sur des sites d'enchères ? "C'est un peu la pêche aux pigeons affirme Jean-Emmanuel Raux, l'un des meilleurs experts français sur les autographes. Sur e-bay, il y a des gens qui balancent des manuscrits 5 000 dollars alors qu'en réalité, ils en valent 2 000. Une lettre sans intérêt de Maupassant vaut entre 500 et 600 euros. Il y a des gens qui achètent ce genre de chose et qui les vendent à 1 600 euros. Les prix sont subjectifs. Vous avez des gens pour qui l'argent coule à flots ! Sur Internet, j'ai vu des fantaisies : des gens qui signent allègrement des photographies, par exemple, de Jean-Paul Sartre, sans même chercher à imiter la signature ! Marie-Antoinette a beaucoup de faux aussi, beaucoup !"
Qui détermine le prix ? Il y a d'abord la qualité du texte autographe. Ainsi, quelques mots d'amour ou le manuscrit d'un auteur célèbre auront plus de valeur qu'un simple billet d'excuse ou qu'une lettre de remerciements.
Mais les "stars" ne subissent aucune décôte : "Il y a davantage d'amateurs pour Victor Hugo, qui est le plus grand poète du 19ème siècle, que pour Zola. Et puis, vous avez des gens qui sont très rares, comme Einstein, Salinger ou Rimbaud, pour lesquels on trouve très peu d'écrits. Un petit billet d'Arthur Rimbaud vaut au moins 50 000 euros, et pour un poème, comptez entre 300 et 400 000 euros."
Attention aux risques, cependant. Avant d'acheter un manuscrit , "il faut s'assurer que celui-ci est authentique auprès d'experts reconnus, insiste Jean Emmanuel Raux. Il ne faut pas acheter si le vendeur n'est pas un professionnel. Il y a des particuliers qui revendent sur Internet des manuscrits d'origine douteuse et qui peuvent être "revendicables" par l'Etat. Cela concerne par exemple des archives volées."