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Le dernier long-métrage de Thierry Michel, "L'Empire du silence" sort mercredi 16 mars en France. Il évoque le sort des populations de l'Est congolais confrontées à une spirale de massacres et de violences après le génocide de 1994 au Rwanda.
Le cinéaste de 69 ans dit y voir "un puzzle reconstitué", "un film bilan" du travail de témoignage entrepris dans l'ex-Zaïre depuis 1999.
C'était l'année de sortie de "Mobutu, roi du Zaïre"; le documentaire qui l'a révélé à l'étranger. Dans un entretien avec l'AFP, chez lui à Liège, il revient sur sa carrière, au cours de laquelle il a réalisé une trentaine de films.
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À partir de 1994, la volonté du nouveau pouvoir tutsi à Kigali d'"éradiquer" les génocidaires hutu, réfugiés de l'autre côté du lac Kivu, a conduit à des massacres impliquant des rebelles congolais associés à des soldats rwandais et ougandais. Et des civils étaient en première ligne. En RDC, "les morts se comptent par centaines de milliers, et les victimes (de viols notamment) en millions", décrit Thierry Michel.
Aujourd'hui "des criminels sont encore aux commandes" dans plusieurs pays de la région, et des groupes rivaux perpétuent les tueries pour le contrôle des richesses minières. "Le Kivu, c'est 70% des réserves mondiales de coltan" (très utilisé dans les composants électroniques), affirme le réalisateur.
En RDC, la parole a commencé à se libérer depuis le départ du président Joseph Kabila (2001-2019). Des femmes victimes se font entendre, des avocats descendent dans la rue, des suspects sont nommés. Mais le nouveau président Félix Tshisekedi "n'a pas assaini l'armée. Or c'est un objectif prioritaire pour beaucoup de gens", regrette Thierry Michel.
Un de ses premiers documentaires, "Pays noir, pays rouge" (1975), était consacré à la culture ouvrière de sa région, et le prochain s'intéressera aux anciens travailleurs de la sidérurgie, confie-t-il à l'AFP.
"C'est du social existentiel", enchaîne ce diplômé de l'école d'arts IAD, qui ne compte plus les prix récoltés dans les festivals. "J'aime m'immerger dans le réel, aller au coeur de la société, avec des ados, des enfants, pour comprendre comment ils voient le monde et peuvent se tracer un destin".
(Re)voir : L'école de l'impossible, un documentaire de Thierry Michel
Le monde de l'enfance est en effet un autre fil rouge de son travail. Dans "Gosses de Rio" (1990), il explore la violence des favelas au Brésil. En Belgique, c'est l'école comme lieu de socialisation et d'intégration qui aiguise sa curiosité, avec "Enfants du hasard" (2017) et "L'école de l'impossible" (2021), dont son épouse Christine Pireaux est co-autrice.