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Visite guidée du premier musée afro-américain de l'Histoire.
Reportage de nos partenaires de Radio-Canada
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Vidéo : le premier musée afro-américain, à Washington

Sur la toile de fond de tensions raciales persistantes, Barack et Michelle Obama viennent d'inaugurer, ce 24 septembre, le premier musée afro-américain de l'Histoire, symbole de la place centrale des Noirs aux Etats-Unis.

Une foule immense était réunie ce samedi 24 septembre sur le National Mall, une longue coulée verte qui s'étire à deux pas de la Maison Blanche, pour assister à l'ouverture du Musée national de l'histoire et de la culture afro-américaine (NMAAHC). En écrasante majorité noirs, des milliers d'Américains ont convergé des quatre coins du pays pour écouter religieusement Barack Obama, venu couper le ruban. L'inauguration s'accompagnait d'une série de concerts au ton engagé, dénonçant le racisme et les brutalités policières.  

 Nous ne sommes pas un fardeau ou une tache pour l'Amérique (...) Nous sommes l'Amérique.
Barack Obama

Le NMAAHC, un projet centenaire enfin finalisé, rassemble des milliers d'objets racontant l'histoire des Noirs, de l'esclavage à l'accès aux droits civiques en passant par la ségrégation, ainsi que leurs contributions dans la culture, le sport et la société. 


"Le musée de l'histoire afro-américaine n'est pas séparé de l'histoire plus large de l'Amérique. Il ne montre pas le côté caché de l'histoire américaine, mais un élément central de l'histoire américaine", a prononcé Barack Obama, premier président noir des Etats-Unis, sous l'ovation du public et les applaudissement d'un parterre de responsables politiques. "Nous ne sommes pas un fardeau ou une tache pour l'Amérique (...) Nous sommes l'Amérique", a-t-il lancé, sur l'esplanade du musée, un imposant bloc ultra-moderne paré de bronze. 
 

musée afro-américain
Pendant le discours prononcé par Barack Obama pour la cérémonie d'inauguration du Smithsonian Museum of African American History and Culture on the National Mall à Washington, samedi 24 septembre, 2016. 
©AP/Pablo Martinez Monsivais

Le candidat à la présidentielle Donald Trump, qui peine à séduire les électeurs noirs et a tenu des propos controversés sur les tensions raciales, a jugé lui aussi le musée "magnifique" et salué "la contribution incroyable" des Noirs à leur pays.

De la fierté et des larmes

Lorsque le président Barack Obama a présenté la famille noire descendante d'esclave qui a inauguré avec lui samedi le musée de l'histoire afro-américaine, l'émotion a envahi la grande artère au coeur de Washington. Ruth Odom Bonner, une vieille femme de 99 ans aux cheveux blancs et au manteau rose carmin lui tombant sur les pieds, est fille d'un noir né esclave dans le Mississippi avant d'obtenir la liberté et de vivre sous la ségrégation. C'est elle qui a tiré sur le cordon pour faire sonner la cloche de l'ouverture, avec l'aide de son fils, son petit-fils, son arrière petite-fille ainsi que Barack et Michelle Obama : 

 Ruth Odom Bonner
Barack et Michelle Obama avec Ruth Odom Bonner, au centre, inaugurant le Smithsonian National Museum of African American History and Culture à Washington, le 24 septembre.
@AP/Manuel Balce Ceneta

Lynchage

Pour Heather Lawson, jeune femme vêtue d'une robe aux imprimés africains, il était "important d'être là aujourd'hui", pour "prendre part à l'histoire". "Nous venons de loin et nous avons encore beaucoup de chemin à faire", confie-t-elle, expliquant que les tensions raciales ne vont pas disparaître du jour au lendemain. "Le fait que nous étions à une époque pieds nus, enchaînés, réduits en esclavage et vendus, et que maintenant nous sommes là, cela montre que nous pouvons y arriver. Nous pouvons réaliser les changements qui s'imposent".

Comme elle, de nombreux Noirs venus des quatre coins des Etats-Unis oscillaient entre fierté et sentiment que le combat pour l'égalité est loin d'être terminé, en arrivant devant l'imposant édifice posé sur l'artère menant au Capitole. Surtout, l'émotion suscitée par Ruth Odom Bonner chez de nombreuses personnes samedi reflète la sensibilité de la question raciale pour les Noirs aux Etats-Unis.

"Je suis honorée et pensive", a résumé Jeanette Providence, professeure de collège venue spécialement de Sacramento (Californie). "Dans nos livres d'histoire, notre contribution n'est pas reconnue", a déploré cette sexagénaire. "Donc je suis venue rendre hommage à ceux de nos ancêtres qui ont rendu cela possible." Quant aux brutalités policières qui secouent de nouveau l'Amérique, "elles rappellent la période où l'on lynchait" les Noirs, avance-t-elle.

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Même son de cloche chez Karmello Colman venue, elle, de Kansas City, dans le Missouri, qui se dit à la fois "fière" et "humble". Fière de l'édifice qui rassemble les "accomplissements" des Noirs, et attentive aux "importantes questions" qui restent à régler : tensions raciales, relations de la jeunesse noire avec la police, inégalités...

Tout le monde ne pouvait accéder ce samedi, pour éviter une trop grande affluence. Heather Lawson, elle, a déjà son billet pour mardi. "Je sais déjà que je vais pleurer dedans", sourit-elle. "Et pas qu'une fois !"

"Aider à nous voir"

Seul un "battement de cil" nous sépare du passé esclavagiste de l'Amérique, a rappelé Barack Obama. "C'était seulement hier et donc nous ne devons pas être surpris que toutes les plaies ne soient pas refermées... Mais ce musée nous montre que même face à l'oppression, même face à une difficulté inimaginable, l'Amérique est allée de l'avant", a-t-il insisté.

En plein regain de tensions raciales, il a assuré que le musée "procure un contexte pour les débats de notre époque. Il les éclaire, et donne une idée de comment ils ont évolué. Et peut-être en donne la proportion. Il peut, peut-être, aider un visiteur blanc à comprendre la souffrance et la colère de manifestants, dans des endroits tels que Ferguson et Charlotte", deux villes théâtres d'émeutes après la mort d'un Noir tué par la police, en 2014 et ces derniers jours à Charlotte.

"Ce musée peut nous aider à nous parler. Et plus important, à nous écouter et encore plus important à nous voir", a énuméré Barack Obama après avoir multiplié les anecdotes et récits sur la vie des Noirs aux époques esclavagiste et ségrégationniste, rappelant à plusieurs reprises le chemin parcouru. "L'Amérique est le seul endroit au monde, s'est-il réjoui, où cette histoire peut se produire".