Fil d'Ariane
Avec la guerre en Ukraine, l’inflation s’est envolée en Europe. En Allemagne, Espagne ou au Royaume-Uni, les prix ont fortement augmenté à la pompe, de même que les factures d’électricité. La hausse se fait aussi sentir sur les denrées alimentaires. Les différents États tentent de s’organiser pour faire face aux difficultés rencontrées par les entreprises et les familles.
Dans le Journal du Dimanche, la cheffe économiste de l’Organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE) Laurence Boone a estimé que l’inflation pourrait encore augmenter « de deux points à deux points et demi », en raison de l’invasion russe. Elle souligne toutefois que ces estimations restent incertaines.
L’inflation consiste en une diminution du pouvoir d’achat. Elle est provoquée par une forte demande d’un bien particulier, alors que l’offre de ce bien ne bouge pas, voire diminue. Sa conséquence directe : une hausse des prix. Pour la mesurer, il faut utiliser l’indice des prix à la consommation (IPC). Il sert à donner une estimation de la différence des prix des produits entre deux périodes. Parmi les produits compris dans cet indice, il y a l’alimentation, le tabac, l’énergie, les produits manufacturés et les services. Mais il faut garder en tête que l’inflation réelle est plus large que la consommation des ménages.
La guerre en Ukraine n’est pas la seule responsable de cette flambée. Depuis le mois de novembre, l’inflation atteint un sommet historique. En effet, le redémarrage de l’économie après les restrictions mises en place pour faire face au Covid-19 ont provoqué de fortes tensions sur les marchés. Au mois de septembre en France, l’Insee pointait une hausse de 2,1% des prix à la consommation par rapport à un an plus tôt.
Actuellement, c’est l’énergie qui fait grimper le taux d’inflation. En France, par rapport à mars 2021, il est en hausse de 28,9% selon l’Insee. Pour la zone euro, cette hausse est de 44,7% sur un an en mars, selon Eurostat. La Russie étant le plus gros exportateur de gaz au monde, la guerre en Ukraine bouleverse donc le marché énergétique. Les pays dépendants du gaz russe cherchent des alternatives, ce qui fait que les producteurs de gaz gonflent les prix. C’est aux consommateurs d’en faire les frais. La Russie est aussi le deuxième producteur de pétrole au monde, d’où l’impact sur le prix des carburants.
L’inflation provoquée par la guerre en Ukraine se fait ressentir partout en Europe. Eurostat indique que le taux d’inflation dans la zone euro s’élevait à 7,5% sur un an au mois de mars. Il s’agit du niveau le plus élevé enregistré depuis le début de cet indicateur, début 1997. Le mois précédent, elle atteignait déjà le niveau record de 5,9%. Il s’agit d’une moyenne : elle n’est pas la même d’un pays à un autre.
l’inflation restera élevée cette année, mais pourrait commencer à ralentir en 2023
Laurence Boone, cheffe économiste de l’Organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE)
En Espagne, le taux d’inflation atteignait 9,8% au mois de mars. Son plus haut niveau depuis 37 ans. En France, l’inflation atteint 4,5% au mois de mars, après avoir atteint 3,6% sur un an au mois de février. En Allemagne, elle s’élevait à 7,3% sur un an au mois de mars, soit le plus haut taux d’inflation enregistré en 40 ans.
Jusqu’où peut aller l’inflation ? Laurence Boone reste tout de même optimiste quant à la suite des événements. Selon elle, « l’inflation restera élevée cette année, mais pourrait commencer à ralentir en 2023. » Cela reste toutefois soumis à l’évolution du conflit en Ukraine.
Laurence Boone préconise l’élaboration de « politiques budgétaires ciblées pour aider les ménages et les entreprises à passer le cap. » Elle conseille toutefois d’éviter de mettre en place des restrictions sur les exportations car « elles n’ont jamais donné de bons résultats par le passé. » Les stratégies adoptées par les différents États européens concordent avec les préconisations de l’économiste.
Face à cette flambée historique, le gouvernement espagnol a mis en place une enveloppe de 16 milliards d’euros pour venir en aide aux familles et aux entreprises touchées. Cette aide est attribuée sous forme de prêts. Le 25 mars, il avait aussi annoncé un milliard d’euros d’aide pour réduire le coût du carburant. Cette aide comprenait notamment une baisse du prix du litre de gazole de 20 centimes, appliquée directement à la pompe. Le pays était en proie à une importante grève des chauffeurs routiers depuis plus de trois semaines, contre la hausse des prix du carburant. Ils ont décidé de suspendre temporairement leur mouvement ce 3 avril.
Confronté à sa plus grave crise pétrolière depuis des années, le Royaume-Uni a annoncé le 23 mars une réduction de 5 pence sur le litre d’essence (soit 6 centimes d'euro). Le secteur de l’énergie est également très touché dans le pays : les prix de l’électricité et du gaz ont augmenté de 50% le 1er avril. Devant aussi faire face à une hausse des prix du carburant, l’Allemagne a décidé de baisser les prix des abonnements aux transports en commun à 9 euros par mois, pendant trois mois, afin d’alléger le budget transport des familles. Le gouvernement allemand a également opté pour une réduction des taxes sur les carburants, de 30 centimes par litre sur l'essence et 14 centimes pour le diesel.