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Le Yukon, qui signifie "grande rivière" en langue autochtone gwichʼin, est un territoire du nord-ouest du Canada. Il compte plus d'ours et de grizzlis que d'humains, une nature rude et sauvage apprivoisée par un couple de Français, à la tête d'une agence de tourisme intimiste. Sur cette photo, le canyon Miles, près de Whitehorse, la capitale du Yukon.
Pour aller s’installer dans le Yukon et rejoindre ses 0,1 habitants au kilomètre carré, il faut aimer l’isolement, la rudesse du sauvage, ses montagnes pelées et ses lacs glacés, ses rivières cerclées de roches et de pins. Il faut surtout être sacrément amoureux du Yukon, pour en faire son métier et ne jamais vouloir le quitter. Reportage
« Là où les sentiers s’arrêtent, l’aventure commence » peut-on lire sur le site de Terre Boréale. Cette aventure commence en 2013, quand Maxime Gouyou-Beauchamps et Miléna Georgeault, Français d’origine, ont fondé cette agence d’aventure touristique qui offre des excursions intimistes dans le Yukon sauvage, hors des sentiers battus. Une belle histoire de réussite qu’ils m’ont racontée lors de mon passage dans ce territoire du nord-ouest du Canada.
Maxime Gouyou-Beauchamps et Miléna Georgeault, Français d’origine, fondateurs de Terre Boréale, une agence d’aventure touristique qui offre des excursions intimistes dans le Yukon.
Tout commence en 2003 quand Maxime, Savoyard d’origine, vient à Yellowknife, dans les territoires du Nord-Ouest, dans le cadre d’un échange scolaire : il adore son expérience, tombe en amour avec les grandioses espaces du grand Nord canadien et se promet de revenir un jour.
Ce qu’il va faire, en 2011, au Yukon cette fois. Sa compagne Miléna, qu’il a rencontrée alors qu’ils faisaient tous les deux des études en conservation de la biodiversité, vient le rejoindre. Dans un premier temps, Miléna étudie les loutres près de Whitehorse et Maxime travaille dans le secteur de l’exploitation minière.
On a eu envie de leur montrer, leur expliquer pourquoi on a décidé de vivre ici. Maxime Gouyou-Beauchamps, co-directeur de l'agence d'aventure touristique Terre Boréale
« Nos familles sont venues nous visiter, se souvient Maxime et on a eu envie de leur montrer, leur expliquer pourquoi on a décidé de vivre ici. Alors on leur a fait découvrir cette belle nature, ce Yukon qu’on aime. Et après, on s’est dit, tiens, pourquoi ne pas créer une entreprise qui fasse ça ? C’est comme ça que l’idée est née. Dix ans plus tard, les clients qui viennent avec nous, on les considère comme des membres de notre famille. »
Depuis plus de dix ans donc, Terre Boréale offre des séjours d’au moins six jours à des groupes de six personnes maximums, plus un guide, dans un Yukon inexploré. « C’est une agence d’aventure touristique intimiste, précise Maxime, le but c’est d’avoir de la qualité, avec des guides qu’on choisit et qui nous choisissent, on ne fait pas du gros volume ».
L’hiver, ce sont des activités à la journée, beaucoup de gens viennent voir les aurores boréales, on offre aussi des expéditions de raquettes, de pêche sur glace, de chiens de traineaux. Miléna Georgeault, co-directrice de l'agence d'aventure touristique Terre Boréale
Et en toute sécurité : en une décennie d’activité, l’entreprise n’a jamais rapporté de catastrophes, comme des randonneurs égarés ou des rencontres avec la faune locale qui auraient mal tourné. Il y a plus d’ours et de grizzlis que d’habitants au Yukon, quand on s’y promène, on se promène dans leur jardin.
Terre Boréale offre des forfaits adaptés en fonction des conditions physiques de chacun toute l’année, et 90% de son activité se fait durant l’été et le début de l’automne.
« L’hiver, ce sont des activités à la journée, beaucoup de gens viennent voir les aurores boréales, on offre aussi des expéditions de raquettes, de pêche sur glace, de chiens de traineaux, etc. On essaye aussi de sortir des sentiers battus, on a, par exemple, développé un forfait de trois jours dans une cabane en rondin sur une île » explique Miléna.
Terre Boréale est aussi guidée par un souci environnemental, valeur fondatrice de l’entreprise ajoute Miléna : « Nous voulons avoir un impact minimal sur la nature, c’est notre valeur de base, le respect de l’environnement, et nous la véhiculons auprès de notre clientèle ». C’est notamment la politique du zéro-déchet lors des excursions.
La clientèle est variée : « 80% de notre clientèle vient d’Amérique du nord, en majorité ce sont des Canadiens originaires de Colombie-Britannique et du Québec. On a un panel d’âge assez large, entre 30 et 60 ans, en majorité ce sont des couples mais il y a aussi des familles et des gens qui voyagent en solo » détaille Maxime.
Le Canyon Miles, près de Whitehorse, la capitale du Yukon.
En juin 2023, Terre Boréale a obtenu sa certification B Corp. Il s’agit d’une plateforme de cotation d’entreprises, élaborée en France, qui décerne un « label » d’entreprise éco-responsable et durable que toute compagnie, quelle que soit sa taille et son secteur d’activité, peut tenter d’avoir partout dans le monde.
Actuellement, plus de 8900 entreprises présentes dans 90 pays, dont plus de 450 en France et quelques 800 au Canada, ont la certification B Corp, le B voulant dire : Bénéfice pour tous.
Quand l’hydravion ou l’hélico décollent, qu’ils te déposent dans ces paysages et qu’il n’y a pas un bruit, personne, aucune trace de civilisation autour de toi, pas de sentier, c’est absolument magique.
Maxime Gouyou-Beauchamps, co-directeur de l'agence d'aventure touristique Terre Boréale
Maxime et Miléna n’en sont pas peu fiers.
« L’entreprise est décortiquée, passée à la moulinette à travers cinq critères, précise Maxime, parmi lesquels la gouvernance : qui en est le propriétaire, comment c’est géré, est-ce qu’elle a accès à des paradis fiscaux, quels sont les salaires, les conditions de travail ?
Le deuxième critère, c’est le client : quel est le niveau de satisfaction de la clientèle ? Le troisième critère, c’est la communauté, comment l’entreprise est ancrée dans sa communauté, quels sont les liens qu’elle y a développé et son impact. Enfin l’un des derniers critères, c’est l’environnement et le respect de l’environnement. Il faut avoir un minimum de 80 points pour obtenir cette certification. »
« Au début, on n’a pas cherché à l’avoir, poursuit Miléna, on a plus voulu passer à travers le processus pour s’orienter dans le développement de notre entreprise. Mais maintenant qu’on l’a, on va tout faire pour la garder parce que ça donne quand même une belle crédibilité pour les gens qui connaissent cette certification. »
« Avec B Corporation, on est un livre ouvert pour le client, poursuit Maxime, on lui ouvre la turbine de l’entreprise, il peut savoir comment on la gère, dans quels secteurs on va faire des dépenses, la formation, l’achat de matériel, les salaires des employés etc. Tout est détaillé. »
La certification est valable pendant trois ans : « Le fait que l'on doive refaire les tests tous les trois ans, cela nous oblige à maintenir une qualité, souligne Miléna, c’est stimulant. »
Il y a peu d’entreprises touristiques qui offrent des randonnées en français au Yukon et ça c’est un gros plus pour nous.
Miléna Georgeault, co-directrice de l'agence d'aventure touristique Terre Boréale
Autre caractéristique de Terre Boréale : la mise en valeur de la langue française. Les quatre guides qui travaillent dans l’entreprise sont soit Français, soit Québécois d’origine nous dit Maxime.
« On voulait que nos clients francophones puissent avoir un service en français, dans un pays bilingue, pour nous, c’était indispensable. ». « Il y a peu d’entreprises touristiques qui offrent des randonnées en français au Yukon et ça c’est un gros plus pour nous », poursuit Miléna.
Maxime et Miléna soulignent la vitalité de la communauté francophone au Yukon et ils me confient vouloir que leur petite fille puisse plus tard aller dans une école française.
Le fleuve Yukon serpente à travers tout le territoire.
Comme toutes les entreprises dans le secteur touristique, Terre Boréale a accusé le coup de la pandémie avec un gros ralentissement de ses activités pendant plus de deux ans, alors qu’elle venait de vivre un été record en 2019.
Mais cela a été l’occasion de mettre en place un plan de communication sur les réseaux sociaux pour augmenter sa clientèle et continuer à faire rayonner, en français, l’immensité et la beauté sauvage du Yukon.
« Quand l’hydravion ou l’hélico décollent, qu’ils te déposent dans ces paysages et qu’il n’y a pas un bruit, personne, aucune trace de civilisation autour de toi, pas de sentier, c’est absolument magique et extraordinaire. C’est cette expérience unique qu’on veut continuer à offrir à nos clients » conclut Maxime.
Parmi les nombreuses activités proposées par Terre Boréale, la descente en canoë de la rivière Big Salmon.