Fil d'Ariane
Les pays d'Amérique du Sud abritant la forêt amazonienne se réunissent à Bélem pour tenter de sauver cette forêt, poumon de la planète. Les membres de l'Organisation du traité de coopération amazonienne (OTCA) visent la préservation de 80% de l'Amazonie d'ici 2025.
Photo aérienne montran la "Linha 26" de la la communauté indigène Wari' près de la zone déforestée de Nova Mamore, dans l'état de Rondonia, Brésil le 14 juillet 2023. Les communautés locales sont encerclées par les exploitations agricoles, qui pratiquent l'élevage ou la cultivation de soja.
"Cette rencontre est un tournant. Dans l'histoire de la défense de l'Amazonie, de la forêt, de la transition écologique, il y aura un avant et un après", a déclaré le président de gauche du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva, quelques minutes avant l'ouverture du sommet, sur les réseaux sociaux.
La rencontre sur deux jours rassemble des représentants des huit pays membres de l'Organisation du traité de coopération amazonienne (OTCA), créée en 1995 dans le but de préserver cette vaste région qui abrite environ 10% de la biodiversité de la planète.
Lula a pris place dans la salle de conférences aux côtés de ses homologues de la Bolivie, de la Colombie et du Pérou, tandis que l'Équateur, le Guyana et le Suriname étaient représentés par des ministres.
Le président vénézuélien a été remplacé au pied levé par sa vice-présidente Delcy Rodríguez. Sur son compte Twitter, rebaptisé X, Nicolas Maduro a révélé souffrir d'une otite.
Le sommet à Belém fait également office de répétition générale pour cette cité portuaire de 1,3 million d'habitants du nord du Brésil qui accueillera en 2025 la conférence de l'ONU sur le Climat COP30.
"Nous ne pouvons pas permettre que l'Amazonie atteigne le point de non-retour", avait déclaré le 7 août à Belém Marina Silva, ministre brésilienne de l'Environnement.
Si ce point de non-retour était atteint, l'Amazonie émettrait plus de carbone qu'elle n'en absorberait, ce qui aggraverait le réchauffement de la planète. La secrétaire-générale de l'OTCA, Alexandra Moreira, annonce ce 8 août que le sommet accoucherait d'une déclaration commune avec "des mesures audacieuses et énergiques" pour protéger la forêt tropicale.
"Ce ne sera pas juste un message politique: c'est un plan d'action détaillé pour le développement durable en Amazonie", où vivent près de 50 millions de personnes, a déclaré Lula.
De retour au pouvoir en janvier, Lula s'est engagé à mettre un terme d'ici 2030 à la déforestation, qui a fortement augmenté sous le mandat de son prédécesseur d'extrême droite Jair Bolsonaro.
La "Déclaration de Belém" a été "négociée par les huit pays en un temps record, un peu plus d'un mois", a indiqué Mauro Vieira, ministre brésilien des Affaires étrangères.
Elle stipule les "nouveaux objectifs et les nouvelles taches" à accomplir pour préserver la plus grande forêt tropicale de la planète.
L'un des principaux défis sera de trouver un plan d'action commun pour éradiquer la déforestation illégale.
Les terres déboisées sont souvent transformées en pâturage pour le bétail, mais la destruction est également causée par des orpailleurs et des trafiquants de bois.
De retour au pouvoir en janvier, Lula s'est engagé à mettre un terme d'ici 2030 à la déforestation, qui a fortement augmenté sous le mandat de son prédécesseur d'extrême droite Jair Bolsonaro. Le Brésil abrite 60% de la forêt amazonienne.
Mais la ministre Marina Silva sait que chaque pays ira à son rythme: "nous ne voulons pas imposer nos vues, il faut parvenir à un consensus progressif", a-t-elle reconnu le 7 août.
Son homologue Colombienne, Susana Muhamad, souhaite que soit inclus dans la déclaration l'objectif commun de préserver "80% de l'Amazonie d'ici 2025".
La Colombie défend par ailleurs une transition énergétique plus rapide, avec une économie qui ne dépend pas du pétrole, ce qui semble impensable pour le moment pour d'importants producteurs d'hydrocarbures comme le Venezuela ou le Brésil. Le président colombien Gustavo Petro a affirmé que la "déforestation zéro" serait "insuffisante". "La science nous a montré que même si on recouvre le monde entier d'arbres, ça ne suffira pas à absorber les émissions de CO2 (...). Il faut abandonner les énergies fossiles", a-t-il insisté.
Selon lui, cette responsabilité est avant tout "des pays du nord", tandis que "nous (les pays amazoniens) devons protéger l'éponge", comme il décrit la forêt tropicale.
Mais cette transition énergétique est un sujet plus sensible pour d'importants producteurs d'hydrocarbures de la région amazonienne, comme le Venezuela ou le Brésil.
Cette question a également été abordée le week-end dernier, lors d'une rencontre de représentants de la société civile à Belem intitulée "Dialogues Amazoniens", avec des manifestations réclamant une "Amazonie libre de pétrole".
De nombreux leaders indigènes ont également pris part à cette rencontre, espérant faire entendre leurs revendications, notamment sur le droit à la terre.
Manifestation des peuples autochtones à Belem, ce 8 août. Sur leurs pancartes ont peut lire : "La démarcation est l'avenir" et "Notre avenir n'est pas à vendre".
"Les peuples autochtones doivent être vus comme des institutions millénaires", a confié à l'AFP le Colombien Dario Mejia, membre du Forum permanent pour les questions indigènes de l'ONU. Il espère que les dirigeants sauront "se mettre d'accord pour faire la paix avec la nature".
Ces mots d'ordre sont réapparus le 8 août, lors d'un cortège qui a rassemblé environ 1.500 personnes dans les rues de Belem, dont des militants indigènes, qui brandissaient des banderoles avec des messages comme "Nous sommes ici depuis toujours".
"Si l'on ne met pas fin à la déforestation, nous devront faire face à des problèmes bien plus graves", a confié hier à l'AFP le chef indigène emblématique Raoni Metuktire.
Ce 8 août, le sommet se poursuivra avec la participation de pays non membres de l'OTCA invités à Belém.
La France, dont la Guyane représente 1% de la forêt amazonienne, ne fait pas partie de l'organisation et sera représentée par son ambassadrice à Brasilia, Brigitte Collet. Pourtant le président Lula avait personnellement invité son homologue français. Cette absence a été soulignée par la France insoumise. Jean-Luc Mélenchon parle de "mépris" et Mathilde Panot de "honte".
L'Indonésie, la République du Congo et le Congo-Brazzaville, qui abritent de vastes forêts tropicales dans d'autres continents, ont également été invités.