Climat : quelles sont les avancées depuis la COP21 ?

Il y a six ans, lors de la COP21, 192 pays signaient l’Accord de Paris, avec l’objectif de limiter l’augmentation de la température d’1,5°C. Pour Patrick Bayer, maître de conférence à l’université de Strathclyde et spécialiste de la régulation environnementale, cet accord reste un fondement de la lutte contre le réchauffement climatique. Entretien.
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COP26
Pour la COP26, des bannières sont disposées dans le centre-ville de Glasgow en Écosse. 
Scott Heppell / AP
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L’Accord de Paris pour le climat est-il désuet ? Faut-il faire table rase et élaborer un nouvel accord qui puisse loger tout le monde à la même enseigne ? Patrick Bayer, maître de conférence à l’université de Strathclyde à Glasgow en Écosse et spécialiste d’économie politique en matière de régulation environnementale considère l’Accord de Paris comme un pilier pour guider les pays vers des objectifs de réduction des émissions.

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TV5MONDE : En 2015, tout le monde applaudissait l’Accord de Paris et ce qu’il promettait. Est-ce qu’on l’applaudit toujours aujourd’hui ?

Patrick Bayer, université de Strathclyde à Glasgow en Écosse : C’était la première fois que des pays de partout sur la planète se rassemblaient autour d’un accord reconnaissant l’importance des réductions de gaz à effet de serre. Cet accord marquait également une rupture avec le protocole de Kyoto (signé en 1997 pour la réduction de gaz à effet de serre, ndlr).

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L’élément central de l’Accord de Paris, à savoir la réduction des émissions, est toujours d’actualité. Il y a toujours des négociations entre tous les pays autour de la réduction de gaz à effets de serre, en fonction de leurs ressources. L’objectif de réduction d’1,5°C n’est pas perdu de vue.

Même si six ans sont passés depuis la COP21, le rôle de ce sommet en termes d’accords pour le climat reste d’actualité. Il reste l’accord pour le climat et je pense qu’il le restera. 

TV5MONDE : Comment les positions sur cet accord ont évolué au fil du temps ?

Patrick Bayer : Ce que l’on retient aussi de l’accord de Paris, c’est que l’ONU a donné des indications aux pays autour de la table sur ce qu’ils devaient faire à propos du réchauffement climatique, mais de les laisser décider eux-mêmes. 

Pour la COP26, ces pays ont été invités à soumettre des propositions plus ambitieuses. L’accord de Paris donne la trajectoire à suivre pour la réduction de gaz à effets de serre. Maintenant, il faut que les pays voient comment ils peuvent atteindre ces objectifs. Toutes les COP qui ont suivi celle de Paris en 2015, celle de Glasgow et celles qu’il y aura à l’avenir devront voir comment mettre en place des lois pour atteindre cet objectif. 

Le plus important pour la COP26 est de répondre à cette question : est-ce que l’on peut essayer d’augmenter nos ambitions au-delà de nos estimations ?
Patrick Bayer, spécialiste de politique environnementale

Ce qui ressort à l’heure actuelle c’est que les pays doivent revoir leurs ambitions à la hausse. Dans le dernier rapport de l’ONU évaluant les engagements nationaux (publié le 17 septembre, ndlr), les pays ont augmenté leurs ambitions de seulement 7,5% il me semble. Cela signifie qu’il faut poursuivre les efforts si nous voulons stabiliser les températures. Le plus important pour la COP26 est de répondre à cette question : est-ce que l’on peut essayer d’augmenter nos ambitions au-delà de nos estimations

TV5MONDE : Quelle est la position des pays d’Afrique vis-à-vis de l’Accord de Paris ? 

Patrick Bayer : Ces pays sont évidemment dans une position difficile. Ils n’ont pratiquement pas contribué à la création du problème du réchauffement climatique, mais ils en subissent les conséquences de plein fouet. Il y a deux principaux problèmes qu’ils doivent résoudre. 

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D’abord, il faut savoir que l’Accord de Paris contient des dispositions appelées “Pertes et préjudices”, à l’Article 8. L’idée : les pays développés ont convenu d’un fond pour aider les pays en développement et notamment les nations africaines en termes techniques, mais aussi monétaires. Cela devrait leur permettre de s’adapter aux impacts du réchauffement.Mais le problème, c’est que ce fond n’est pas encore opérationnel et on ne sait toujours pas quand il le sera.

L’autre point qui a causé de nombreuses frustrations, renvoie à l’année 2010 et au sommet de Copenhague. Les pays développés avaient promis d’investir dans un fonds climatique mondial. Ils ont notamment promis de porter l’aide aux pays aux développement à 100 milliards de dollars par an en 2020. Or, ils sont encore loin du compte : elle était à 79,6 milliards de dollars selon les derniers chiffres. Ces deux éléments creusent un fossé entre les pays développés et les pays en développement, notamment les nations d’Afrique.

TV5MONDE : Est-ce que les pays d’Afrique peuvent faire pression sur les pays développés afin que les promesses soient tenues ? 

Patrick Bayer : La rhétorique a quelque peu changé. Certains pays développés semblent avoir compris qu’il en va de leur responsabilité d’aider les pays en développement à prospérer de manière plus durable. Il faut reconnaître que ces pays ont besoin de se développer, il faut qu’ils sortent leurs populations de la pauvreté et qu’ils recensent tous leurs défis environnementaux.

Plus ces pays apparaîtront unis lors des négociations, plus ils pourront espérer de meilleurs résultats.
Patrick Bayer, spécialiste en politique environnementale

La bonne nouvelle, c’est que de nombreux pays sont plus réceptifs face aux demandes. En revanche, je pense qu’il faut que les pays africains se regroupent, car ils représentent une grande part de la population mondiale.