Les incendies détruisent désormais deux fois plus de couverture forestière dans le monde qu'au début du siècle, révèle le World Resources Institute. L’ONG créée il y a 40 ans fonde ses conclusions sur une analyse approfondie de données satellitaires recueillies par des chercheurs de l’université du Maryland. Pour eux, il ne fait aucun doute : cette augmentation exponentielle est due au changement climatique.
Les feux de forêt ravagent désormais chaque année environ 3 millions d'hectares de plus qu'en 2001, soit une superficie équivalente à celle de la Belgique. Ces conclusions viennent des données satellitaires compilées par le Global Forest Watch (GFW), le World Resources Institute (WRI) et l'université du Maryland.
Voir : Sécheresse, incendies : l'Europe brûle
Leur
rapport, publié ce 17 août, révèle que 2021 a été une des pires années pour les feux de forêt depuis le début du siècle. 9,3 millions d’hectares ont brûlé, ce qui correspond à un plus d’un tiers des pertes d’arbres sur l’année.
La forêt boréale première touchée
70% des surfaces dévorées par les flammes en 20 ans concernent les forêts boréales, qui recouvrent une grande partie de la Russie, du Canada et de l'Alaska, et qui constituent parmi les plus grands puits de carbone de la planète. En Russie, ce sont 53 millions d'hectares qui ont brûlé depuis 2001, soit quasiment la superficie de la France.
Voir : La Sibérie ravagée par des incendies
Les feux, selon l'étude, représentent plus d'un quart de la perte totale du couvert forestier depuis le début du siècle. Le reste est causé par la déforestation ou d'autres causes naturelles (tempêtes et inondations).
Au final, la perte de couverture forestière due aux incendies augmente d'environ 4% par an, soit 230 000 hectares supplémentaires. Et environ la moitié de cette augmentation est due aux incendies plus importants dans les forêts boréales,
"probablement le résultat du réchauffement des températures dans les régions septentrionales", notent les chercheurs.
Un cycle apparement sans fin
Selon les chercheurs, le changement climatique est
"probablement un facteur majeur" de ces augmentations, les vagues de chaleur extrêmes. Elles rendent les forêts arides, étant désormais cinq fois plus probables aujourd'hui qu'il y a un siècle et demi.
Voir : Climat : quelle solution face au réchauffement climatique ?
La destruction de la forêt par ces incendies, aggravée par la sécheresse et les fortes chaleurs, entraîne des émissions massives de gaz à effet de serre. Cela augmente encore le changement climatique par le mécanisme d'une
"boucle de rétroaction incendie-climat", ajoutent-ils.
"Dans ces régions boréales, le CO2 s'est accumulé dans le sol pendant des centaines d'années et a été protégé par une couche humide sur le dessus", explique James McCarthy, un des auteurs du rapport du WRI.
"Ces incendies, plus fréquents et plus graves, brûlent cette couche supérieure et libèrent ce CO2". Cette dynamique, avertit l'étude, pourrait à terme faire perdre aux forêts boréales leur statut de puits de carbone.
Comment réduire les feux de forêts ?
Les causes de l’augmentation des feux de forêts sont complexes et diffèrent significativement selon la géographie.
"Beaucoup a été écrit sur comment gérer les feux de forêts et atténuer le risque d’incendie, mais il n’y a pas de solution miracle", expliquent les analystes du World Resources Institute.
Ils citent un
rapport publié par le programme environnemental de l'ONU au sommet de Nairobi du 23 février 2022 (la veille de l'invasion de l'Ukraine par la Russie) avait fait le même constat alarmant.
Le changement climatique et le changement d'affectation des terres devraient rendre les incendies de forêt plus fréquents et plus intenses, avec une augmentation mondiale des incendies extrêmes pouvant atteindre 14 % d'ici 2030, 30 % d'ici la fin de 2050 et 50 % d'ici la fin du siècle, concluent l'
UNEP et
GRID-Arendal.
La publication de l'ONU appelle les gouvernements à adopter une nouvelle
"formule Fire Ready", avec deux tiers des dépenses consacrées à la planification, à la prévention, à la préparation et au rétablissement, et un tiers restant pour la réponse. Aujourd'hui, les réponses directes aux incendies de forêt reçoivent généralement plus de la moitié des dépenses connexes, tandis que la planification reçoit moins d'un pour cent constate le programme environnementale de l'ONU.
Lire : Comment la Suisse gère le risque accru de feux de forêtLes chercheurs du WRI appellent les gouvernements à améliorer la résilience des forêts en mettant fin à la déforestation et en limitant certaines pratiques locales de gestion forestière, notamment le brûlage contrôlé, très à risque pendant les périodes de sécheresse.
"Les forêts sont l'un des meilleurs moyens de défense dont nous disposons contre le changement climatique", souligne James McCarthy.