France : un ballet de chefs d'États pour inventer des financements climatiques

Le président français Emmanuel Macron réunit ces 22 et 23 juin plusieurs dizaines de chefs d'États afin de discuter des manières de protéger les États les plus vulnérables aux changements climatiques et à la pauvreté. 

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Macron Cop27

Le président français Emmanuel Macron à la tribune de la COP27, à Charm el-Cheick en Égypte, le 7 novembre 2022.

AP Photo/Nariman El-Mofty
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Chefs d'États riches et pauvres, financiers, experts du climat... Tous se réunissent jeudi à Paris à l'initiative du président français Emmanuel Macron pour réimaginer un système financier mondial à même de mieux armer les Etats fragiles contre le changement climatique et la pauvreté. Qu'il s'agisse de l'un ou de l'autre, l'argent sera au centre des discussions de ce sommet les 22 et 23 juin au Palais Brongniart.  Une centaine de pays seront représentés, dont une cinquantaine de chefs d'États et de gouvernements sur place. 

"Désormais, la bataille contre la pauvreté, la décarbonation de notre économie et la lutte pour la biodiversité sont très liées ensemble", avait affirmé Emmanuel Macron fin avril, en référence à ce "sommet pour un nouveau pacte financier" dont l'idée à germé au moment de la COP27 à Charm-el-Cheikh en novembre.

Si on commence dans les années 2030, cela nous coûtera beaucoup plus et les dilemmes seront vertigineux.

Sarah Jane Ahmed, conseillère d'un groupe de 58 pays très vulnérables

Dépoussiérer l'architecture financière mondiale

L'objectif est donc de dépoussiérer l'architecture financière internationale, née des accords de Bretton Woods en 1944 avec la création du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, et de le faire vite. "Si on commence dans les années 2030, cela nous coûtera beaucoup plus et les dilemmes seront vertigineux", dit Sarah Jane Ahmed, conseillère d'un groupe de 58 pays très vulnérables appelé V20.

Les besoins sont immenses. Un groupe d'experts indépendants sur le financement de la lutte contre le changement climatique, créé sous l'égide des Nations unies, estime en 2022 que les pays en développement autres que la Chine devront dépenser plus de 2 000 milliards de dollars par an d'ici à 2030 pour le développement et pour répondre à la crise du climat et de la biodiversité. Le compte est loin d'y être.

La France reconnaît que Paris "n'a pas la capacité de décider", selon une conseillère d'Emmanuel Macron, qui anticipe que la réunion débouchera sur une "feuille de route". Des réformes institutionnelles aux sujets de taxation, de la question de la restructuration des dettes des pays pauvres au rôle du secteur privé, une large palette de sujets sera abordée durant ces deux jours. Ils s'étendent indirectement sur trois jours avec la réunion annuelle parallèle du Club de Paris mercredi au ministère de l'Économie, avec au menu les questions d'endettement des pays pauvres.

Vers une taxation des émissions carbones ?

L'Elysée entend donner un "élan politique" à l'idée d'une taxe internationale sur les émissions de carbone de l'industrie du transport maritime, à deux semaines d'une réunion cruciale de l'Organisation maritime internationale (OMI). D'autres sujets occuperont les échanges, de l'idée de la suspension du paiement de la dette en cas de catastrophe naturelle, très soutenue par la Première ministre de la Barbade Mia Mottley, à une potentielle taxation internationale sur les transactions financières qui a peu de chances d'avancer.

Il y a un vrai écart entre l'ambition initiale et la réalité, où peu de nouveaux financements sont attendus.

Louis-Nicolas Jandeaux, de l'ONG Oxfam

Les banques multilatérales de développement, bailleurs de fonds des pays vulnérables, de l'Amérique latine à l'Afrique sub-saharienne, seront aussi appelées à prêter davantage, quelques mois après l'annonce de la mobilisation de 50 milliards de dollars sur dix ans par la Banque mondiale. Son nouveau président, Ajay Banga, sera là, tout comme la directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva.

"Un événement de ce type a le mérite de mettre beaucoup de sujets au coeur des discussions internationales et les faire sortir de leur niche", se réjouit Louis-Nicolas Jandeaux, de l'ONG Oxfam. Il relève toutefois "un vrai écart entre l'ambition initiale et la réalité, où peu de nouveaux financements sont attendus". Le parterre s'annonce pourtant garni à Paris, du chef de l'ONU Antonio Guterres au président sénégalais Macky Sall, en passant par le chancelier allemand Olaf Scholz, la secrétaire américaine au Trésor Janet Yellen accompagnée de l'envoyé spécial pour le climat John Kerry, et la militante Greta Thunberg en marge.

Très attendue sur la dette car prêteur incontournable de l'Afrique mais rechignant à participer à un cadre commun de restructurations avec les pays occidentaux, la Chine sera représentée par son Premier ministre Li Qiang.  Les pays riches seront mis face à leur promesse, censée être tenue cette année après beaucoup de retard, de financer 100 milliards de dollars par an pour aider les pays pauvres face au réchauffement. Egalement en ligne de mire, le recyclage de 100 milliards de dollars de droits de tirage spéciaux, une monnaie de réserve du FMI.