Gérald Butts n'est pas un conseiller politique lambda. C'est l'éminence grise de Justin Trudeau, son bras droit, son plus fidèle allié, son confident, son ami depuis l'université. Lundi 18 février il a annoncé sa démission du cabinet du Premier ministre canadien, pour dit-il se "défendre" contre des "allégations" qui le lient à un vaste scandale de corruption.
>Le rappel des faits en images :
Selon le journal The Globe and Mail, Gerald Butts serait intervenu auprès du ministère de la Justice pour éviter un procès à la société SNC-Lavalin. Ce géant canadien de l'ingénierie, établi à Montréal (où Justin Trudeau est élu député de la Chambre des communes depuis 2008), emploie plus de 52 000 personnes dans le monde dont 9 000 au Canada. L'entreprise est notamment accusée depuis 2015 d'avoir versé 48 millions de dollars canadiens de pots-de-vin (32 millions d'euros) à des responsables libyens entre 2001 et 2011 quand Mouammar Kadhafi dirigeait encore le pays.
Dans sa lettre de démission, publiée par Justin Trudeau sur Twitter, Gerald Butts "nie catégoriquement les allégations selon lesquelles [lui] ou un membre de ce cabinet aurait tenté d'influencer madame Wilson-Raybould". Il s'agit désormais de limiter les dégâts et d'éviter au maximum que le scandale n'éclabousse le Premier ministre lui-même. Ce dernier a apporté son soutien à son ami "indéfectible".
Gerald Butts a servi notre gouvernement - et notre pays - avec intégrité, sagesse et dévouement. Je tiens à le remercier pour son service et son amitié indéfectible. Veuillez lire la déclaration qu'il a faite aujourd'hui : pic.twitter.com/j5EREadYaP
— Justin Trudeau (@JustinTrudeau) 18 février 2019
Mais l'opposition souligne qu'en février 2018, le gouvernement Trudeau a amendé le Code criminel pour rendre possible la conclusion d’accords de réparation ou d’accords de poursuite suspendue. Ces accords permettent aux procureurs de la Couronne de suspendre des accusations criminelles contre des entreprises qui ont commis des malversations, des fraudes et autres crimes du genre. En contrepartie, la société doit reconnaître publiquement ses responsabilités et payer une amende conséquente. C'est un accord de ce type qu'aurait refusé de proposer la ministre démissionnaire Jody Wilson-Raybould à SNC-Lavalin.
Et de là à imaginer que le gouvernement a fait adopter cette loi pour arranger l'entreprise, il n'y a qu'un pas pour l'opposition.
L'opposition fait monter la pression
Le chef des conservateurs, Andrew Scheer, estime que « cette démission indique un gouvernement en plein chaos alors que Trudeau tente désespérément de cacher ce scandale. Les Canadiens ont raison de se préoccuper des allégations d’ingérence politique dans une poursuite criminelle. Trudeau doit arrêter de se cacher et dire la vérité."L’affaire de Justin Trudeau avec SNC-Lavalin n’est peut-être pas qu’un scandale – ça pourrait être un crime. C’est ce qu’a dit l’ancien procureur général libéral Michael Bryant cette semaine. Les conservateurs n’arrêteront pas tant que la vérité ne sera pas faite! pic.twitter.com/L7hcAswM9q
— Andrew Scheer (@AndrewScheer) 19 février 2019
Canadians expect their gov't to work for them, but when corporate insiders call in favours from Ottawa, the PMO answers – this is a problem. So we're calling for a public inquiry into Trudeau's #SNCLavalin scandal to provide Cdns with answers they deserve: https://t.co/w0lx5cQBsN
— Jagmeet Singh (@theJagmeetSingh) 18 février 2019
Il s'agit là d'une véritable situation de crise pour le Premier ministre Justin Trudeau à quelques mois des élections fédérales prévues en octobre.
Conséquences de cette démission
Cette crise pourrait mettre en danger le Premier ministre lors des prochaines législatives du mois d'octobre prochain. "Toute cette histoire ressemble à des sables mouvants", dans lequel le Premier ministre pourrait s'enliser analyse notre correspondante Catherine François depuis Montréal