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Élections fédérales suisses du 23 octobre 2011 : Pour qui ? Pourquoi ? Comment ?

Le dimanche 23 octobre 2011 est une journée chargée en élections. L’Argentine vote pour désigner un/e successeur/e à Cristina Kirchner. La Tunisie post Ben Ali se dote d’une assemblée constituante. Moins visible, la Suisse désigne les élus qui siègeront aux haute et basse chambres de son Assemblée fédérale. Cependant, ce scrutin renouvelant le corps législatif helvétique pourra avoir des conséquences importantes sur la vie politique et économique des pays frontaliers.

Logo de l'Assemblée fédérale suisse
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QUI ÉLIT-ON LORS DES ÉLECTIONS FÉDÉRALES ? Ce scrutin va permettre le renouvellement de l’intégralité des 200 membres qui composent le Conseil National (la chambre basse), et 44 des 46 élus que compte le Conseil des États (la chambre haute). Les mandats durent 4 ans. Cette Assemblée fédérale défend les intérêts de l’électorat. Il a une importante compétence législative, étant chargé de voter les lois qui s’appliqueront à l’échelon fédéral. Le Conseil National représente le peuple souverain suisse, plus haute autorité politique du pays. Chacun des 26 cantons bénéficie d’au moins un siège. Ensuite, le nombre de sièges attribué par canton est proportionnel à la population de celui-ci. Ainsi, les cantons de Zurich, Berne et Vaud cumulent à eux 3 près de 40 % des sièges. Á l’exception des cantons n’ayant qu’un seul député, le scrutin est proportionnel, les sièges étant attribués en fonction du nombre de voix obtenues. Le Conseil des États représente les 26 cantons de la Confédération. Chaque canton envoie 2 représentants, à l’exception des 6 demi-cantons (Nidwald, Obwald, Appenzell Rhodes-Intérieures, Appenzell Rhodes-Extérieures, Bâle-Ville et Bâle-Campagne) qui n’en ont qu’un. Cette année, seuls 44 des 46 sièges à pourvoir seront renouvelés, Nidwald et Appenzell Rhodes-Intérieures ayant déjà élu leur représentant. Á l’exception des cantons du Jura et de Neuchâtel (qui ont opté pour un scrutin proportionnel), le scrutin est majoritaire : le candidat ayant obtenu le plus de voix est élu, tout simplement.
QUI PEUT VOTER ? Les élections fédérales ont pour objectif de désigner les représentants du peuple suisse. Aussi, logiquement, selon la Constitution fédérale, toute personne majeure et de nationalité suisse peut participer au scrutin. En 2011, près de 5,1 millions de Suisses sont concernés. Ce chiffre comprend également les Suisses vivant à l’étranger (qui sont un peu moins de 700.000). Ces derniers, s’ils le souhaitent, peuvent élire (et même être élus) au Conseil National, à condition d’être inscrits sur le registre de vote de leur commune d’origine. Il leur suffit ensuite de se rendre dans un consulat ou une ambassade suisse pour participer au scrutin. Par ailleurs, avec les élections de 2011, les Suisses à l’étranger dépendant des cantons d’Argovie, de Bâle-Ville, des Grisons et de Saint-Gall pourront voter en ligne. Environ 21.500 électeurs sont concernés. Pour l’élection des représentants au Conseil des États, par contre, la possibilité de participation des Suisses à l’étranger au scrutin se fait à la discrétion du droit du canton d’inscription. Ainsi, seuls 11 des 26 cantons autorisent le droit de vote à leurs ressortissants à l’étranger.
“Mode d'emploi“ du bulletin de vote conçu par la <a class=“rte-link-ext“ href=“http://www.revue.ch/einmaleins-fr“ target=“_blank“>Revue Suisse</a> (cliquez pour agrandir)
“Mode d'emploi“ du bulletin de vote conçu par la Revue Suisse (cliquez pour agrandir)
COMMENT VOTE-T-ON ? La question peut paraître absurde. Cependant, le système de listes lors de l’élection des conseillers nationaux, avec la possibilité de panachage et de cumul, et les différentes méthodes de vote, méritent quelques éclaircissements. Globalement, l’électeur peut remplir son bulletin de 3 façons différentes (dès lors que le canton d’origine possède plus d’un siège au Conseil National) : le vote compact, le vote modifié, et le vote sur bulletin vierge. En choisissant de glisser dans l’enveloppe de vote un des bulletins pré-imprimés distribués par les partis, sans y ajouter de modification, l’électeur opte pour le vote compact. En biffant certains noms d’un des bulletins pour les remplacer soit par ceux de candidats présents sur d’autres listes du canton (panachage), soit en réinscrivant jusqu’à 2 fois maximum un nom déjà présent (cumul), l’électeur propose alors un vote modifié. Enfin, l’électeur peut aussi composer sa propre liste, en remplissant en bonne et due forme un bulletin vierge avec des noms de candidats du canton. Il doit cependant veiller à ce que son bulletin ne propose pas plus de noms qu’il y a de sièges à pourvoir dans ledit canton. Par ailleurs, outre ces méthodes de remplissage de bulletin, les électeurs suisses peuvent voter de plusieurs façons : en se déplaçant au bureau de vote, en faisant parvenir le bulletin avant le vendredi 21 octobre, 17h00 (heure locale) au secrétariat municipal, ou encore, pour une poignée de privilégiés, sur Internet.
Principaux leaders politiques suisses (de gauche à droite et de haut en bas) : Ueli Leuenberger (PES), Christian Levrat (PSS), Martin Bäumle (PVL), Christophe Darbellay (PDC), Fulvio Pelli (PLR) et Toni Brunner (UDC)
Principaux leaders politiques suisses (de gauche à droite et de haut en bas) : Ueli Leuenberger (PES), Christian Levrat (PSS), Martin Bäumle (PVL), Christophe Darbellay (PDC), Fulvio Pelli (PLR) et Toni Brunner (UDC)
POUR QUI LES SUISSES PEUVENT VOTER ? Au cœur des débats qui ont animé la campagne de ces élections fédérales, on retiendra 4 grands sujets : l’immigration et la question des travailleurs étrangers en Suisse, le nucléaire, la dévaluation du franc suisse, et la fin du secret bancaire. La principale question qui a animé l’essentiel des échanges politiques de 2011 reste l’immigration. Sujet phare de l’Union Démocratique du Centre (UDC – droite extrême), grâce auquel le parti a remporté 62 sièges au Conseil National en 2007, il est remis sur le devant de la scène. L’UDC, mené par Toni Brunner, exige que la Suisse quitte l’espace Schengen pour une politique migratoire plus contrôlée, afin de lutter contre une insécurité croissante, et de protéger l’emploi des Suisses. Le thème de l’immigration a depuis été repris par d’autres partis, dont le Parti Socialiste Suisse (PSS – centre-gauche) de Christian Levrat, qui avaient perdu des sièges en 2007. Cependant, l’actualité à court et moyen terme a agité les thèmes de campagne. Ainsi, les partis écologistes comme le Parti Écologiste Suisse (PES – écologiste de gauche) de Ueli Leuenberger ou le Parti Vert’ Libéral (PVL – écologiste de centre-droit) conduit par Martin Bäumle, mais aussi le Parti Démocrate-Chrétien (PDC – centre-droit) de Christophe Darbellay misent sur la sortie du nucléaire, avec le spectre de Fukushima en toile de fond. La Suisse s’est depuis longtemps positionnée comme un pays où il fait bon vivre, avec une avance certaine sur la plupart des pays dit développés, et ces partis veulent aller plus loin dans ce sens en faisant sortir définitivement le pays du nucléaire. De même, la crise financière mondiale actuelle a chamboulé le programme politique des partis. D’une part, avec la crise de l’euro, la gauche reprochent au franc suisse sa force, et souhaitent un taux de change équivalent à 1 franc = 1,20 euros, pour relancer les exportations et protéger plusieurs dizaines de milliers d’emplois. A contrario, la droite libérale, notamment le Parti Libéral Radical (PLR) de Fulvio Pelli, propose de racheter de l’euro pour investir dans les infrastructures de l’Union Européenne. D’autre part, la gauche (PSS, PES) souhaite la fin du secret bancaire suisse, suite aux incitations multiples impulsées par la communauté internationale (Banque Mondiale et FMI entre autres), afin d’assainir ses finances. Le PLR, le PDC et l’UDC, de leur côté, insistent sur la protection de la sphère privée, l’inscription dans la Constitution fédérale du secret bancaire, et sur le fait que 70% des Suisses se prononcent contre sa suppression.
QUELQUES CHIFFRES A l’heure actuelle, le Conseil National est constitué de 200 membres, dont 60 femmes. L’UDC y est majoritaire, avec 62 sièges, suivi par le PSS (43 sièges), le PLR (35 sièges), le PDC (31 sièges) et le PES (20 sièges). 9 sièges sont occupés par d’autres formations politiques moindres. Le Conseil des États comprend 46 membres (dont 9 femmes). Le PDC avec ses 15 représentants y figure en tête, suivi par le PLR (12 membres), le PSS (9 membres), l’UDC (7 membres), le PES (2 membres), et le PVL (1 membre). Le dernier sondage d’opinion en date du 12 octobre 2011 par GFS.BERN pour le groupe de télé et radiodiffusion SRG SSR indique que l’UDC conserve largement les faveurs de l’électorat suisse, avec 29,3% d’intentions de vote. Le PSS serait en léger progrès par rapport à 2007 avec 19,9% d’intentions, suivi par le PLR, lui en recul, avec 15,2%. Suivent le PDC (14,2%), le PES (9,3%), et le PVL (4,9%). Si ces chiffres (à part peut-être celui du PVL) sont relativement similaires à ceux du scrutin précédent, un ou deux sièges supplémentaires pour l’UDC au Conseil National et au Conseil des États pourraient amener à la formation d’un Conseil fédéral (la plus haute instance exécutive fédérale suisse) largement mené par l’UDC. Le Conseil fédéral sera élu une fois la nouvelle Assemblée fédérale constituée, le 14 décembre 2011.