Pour mieux comprendre ce phénomène, vous remontez jusqu'à la préhistoire… Il y a un premier phénomène que nous appelons "la piste carnivore". Au paléolithique supérieur, durant la période des âges glaciaires, un certain nombre de "témoignages" nous laissent à penser que nos ancêtres ont consommé beaucoup de protéines animales et relativement peu d'hydrates de carbone [glucides, ndlr]. On pense qu'un certain nombre de gènes ont été sélectionnés durant cette période pour pallier les faibles niveaux d'apports en hydrates de carbone et pour utiliser énergiquement les apports en viande. Depuis 10 000 ans, notre patrimoine génétique n'a pas trop varié. Un certain nombre de sociétés sont encore adaptées à ce type d'alimentation. Elle ont ensuite rapidement basculé dans un autre type de régime alimentaire, de type occidental. C'est le cas des Amérindiens, après la seconde Guerre mondiale, ou des aborigènes d'Australie, qui connaissent actuellement une explosion de l'obésité. Au néolithique, à partir de -10 000 ans, les sociétés ont connu une nouvelle révolution alimentaire, avec notamment l'apparition de la consommation du lait et des céréales. Avec ce nouveau mode de vie agricole, les populations sont devenues plus tributaires des variations saisonnières et plus soumises aux famines. Ce mode de vie agricole a favorisé la concentration démographique et la proximité de l'élevage, ce qui fait que les maladies infectieuses se sont beaucoup plus développées. Cela a pu façonner notre patrimoine héréditaire dans le sens d'une plus grande capacité à économiser l'énergie et à la stocker. Vous pensez que le passé infectieux de certaines sociétés peut également favoriser l'obésité? Oui, c'est probablement le cas du sous-continent indien. Il y a en Inde beaucoup d'individus en surpoids, mais on ne le voit pas. Leur graisse serait en quelque sorte cachée. Les asiatiques du Sud ont un morphotype particulier, à tel point que pour caractériser un obèse dans ces pays, l'indice de masse corporelle de 30 va être baissé à 25. Il est possible qu'ils aient subi les conséquences de certaines maladies infectieuses comme la malaria. Ils auraient alors développé certains gènes entraînant une quantité plus importante de graisse interne au niveau de l'abdomen.
Lexique de l'alimentation
IMC : l'indice de masse corporelle se calcule en divisant le poids d'une personne par sa taille au carré. Il s'exprime en KG/m2. surpoids : selon l'Organisation mondiale de la santé, une personne est en surpoids quand son IMC est situé entre 25 et 30. obésité : maladie reconnue par l'OMS. Elle correspond à un IMC supérieur à 30. prévalence : mesure de l'état de santé d'une société à un moment donné. Elle rapporte à une population totale le nombre de cas présentant la pathologie étudiée. bilan énergétique : rapport entre les apports caloriques et leur dépense. transition nutritionnelle : passage d’une alimentation monotone, mais riche en amidon et fibres, et d’une vie physiquement active à une alimentation plus diversifiée, mais riche en sucres et en graisses animales saturées, et à un mode vie sédentaire. dénutrition : état pathologique résultant d'apports nutritionnels insuffisants en regard des dépenses énergétiques de l'organisme. malnutrition : état pathologique causé par la déficience ou l'excès d'un ou de plusieurs nutriments.