Et quand la ministre belge de l'énergie s'y rend, c'est un jet privé qu'elle emprunte. Incompréhensible pour les jeunes venus manifester avec leurs parents comme Louise Vanden Abeele : "Cela a créé un déclic : si une telle mobilisation ne parvient pas à changer la mentalité des politiques, on s'est dit n'est-il pas temps que, nous aussi, on s'y mette ?"
Le témoignage de Louise Vanden Abeele sur les motivations de la jeunesse belge :
La FEF (Fédération des Etudiants Francophones), le principal syndicat étudiant de Belgique francophone avec 150 000 adhérents, a d'ailleurs battu le rappel elle aussi. Le problème climatique n'est pas dans les questions défendues habituellement par le syndicat mais son président Maxime Michiels assume : "Quand 35000 jeunes sont dans la rue pour défendre une question, si on ne les soutenait pas, on serait très loin de notre rôle."
Maxime Michiels, président de la FEF :
"Quand ils nous le demandent, on leur prête des salles de réunions ou notre atelier de banderoles", explique Karen Naessens, bénévole de Rise4Climate et coordinatrice mobilisation et bénévoles de Greenpeace Belgique. "On les met en contact avec d'autres associations, on organise des directs sur les différentes pages Facebook de Greenpeace en Europe, mais ils doivent rester autonomes. On ne veut pas récupérer leur mouvement."
L'habituée des mobilisations est elle-même surprise par l'ampleur du mouvement d'une jeunesse qui sèche les cours alors que l'administration belge est très stricte sur l'assiduité.
Mais pour cela l'inventivité est de mise. "On organise une grève tournante", raconte Louise. "Seuls quelques élèves de chaque classe vont manifester, ainsi à la fin chacun n'aura manqué l'école que deux ou trois fois ! Et puis dans certains établissements, quand la direction partage les inquiétudes climatiques, elle ferme un peu les yeux".
Mais comment expliquer le succès de cette mobilisation ?
On peut distinguer deux raisons essentielles.
La première c'est l'engouement suscité par la jeune Suédoise Greta Thunberg, nouvelle égérie de la jeunesse mondiale depuis qu'elle a donné la leçon aux grands de ce monde pendant la COP24 en Pologne, et encore cette semaine au forum économique de Davos en Suisse.
L'adolescente de 16 ans exerce une grève hebdomadaire tous les vendredis depuis la rentrée scolaire et appelle sur les réseaux sociaux les jeunes du monde entier à suivre son exemple avec les mots-dièse #schoolstrike4climate (Grève des écoles pour le Climat, en français) #FridaysForFuture (Vendredis pour le futur, en français).
Un appel entendu en Belgique donc, mais aussi en Allemagne, en Australie, et peut-être même bientôt en France où un collectif se lance et appelle à manifester dès le vendredi 1er février.Collégiens, lycéens, étudiants : dès le vendredi 1 février, mobilisons-nous pour le climat ! Rejoignons le mouvement international #schoolstrike4climate.
— Fridays for future – France (@fridays_france) 26 janvier 2019
#FridaysForFuture #climatechange #ClimateAction #ClimateStrike #GlobalWarming pic.twitter.com/BdpF89NDKX
Une grande grève internationale est aussi attendue le 15 mars.
La seconde raison du succès de la mobilisation belge tient au contexte politique spécifique du pays qui fait figure de mauvais élève sur le plan du climat au niveau européen.
Les discordes entre partis flamands et wallons ont retardé à fin 2018 l'adoption d'un plan climat attendu depuis plusieurs années, un plan jugé pas assez ambitieux par les observateurs. Ainsi d'ici à 2030 la Belgique doit réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 35 % (pour le secteur des transports, de l’agriculture et du logement), alors que nombre de pays européens revoient leurs propres ambitions à la hausse jusqu'à proposer des réductions de 55%.
Et ce n'est pas un hasard si ce mouvement en faveur du climat de la jeunesse belge est parti de Flandres. Le parti nationaliste flamand, la N-VA, qui faisait partie de la coalition gouvernementale jusqu'en décembre dernier, soutient les industries et a notamment bloqué deux directives européennes en faveur de l'efficacité énergétique et des énergies renouvelables.
Chaque parti doit mettre le climat en priorité de ses projets.
Adelaïde Charlier, lycéenne
Les jeunes ne se retrouvent pas dans les paroles ou les actes de leurs dirigeants et ils entendent donc le faire savoir. Car s'ils ne prétendent pas apporter des solutions eux-mêmes, ils estiment que les adultes qui les dirigent doivent adopter une nouvelle politique pour protéger leur avenir. "On demande aux politiciens de collaborer avec les scientifiques, rappelle Adelaïde Charlier, jeune lycéenne mobilisée. Chaque parti doit mettre le climat en priorité de ses projets."
Le témoignage d'Adelaïde Charlier sur les revendications du mouvement :
Ils n'ont pas encore le droit de voter alors ils annoncent déjà qu'ils feront entendre leur voix chaque jeudi jusqu'aux élections fédérales et européennes du 26 mai prochain.
Mais avant cela un autre grand rassemblement national, et pas seulement étudiant, était prévu. Plus de 70000 Belges de tous âges ont défilé à Bruxelles ce dimanche 27 janvier, imités par leurs voisins français à Paris et dans plusieurs grandes villes du pays.
La journée du dimanche 27 janvier en France et en Belgique en images :