
Depuis 2008, où en est-on du conflit entre la Géorgie, l'Abkhazie et l'Ossétie du sud? Actuellement, nous sommes avec des partenaires qui ne voient pas la situation de la même façon : les autorités d'Abkhazie, comme celles d'Ossétie du sud, ainsi que leurs populations, considèrent que leurs régions sont indépendantes, point final. De son côté, la Géorgie estime que ces territoires lui appartiennent toujours et que les forces russes qui s'y trouvent sont des forces d'occupation. Elle a toujours considéré que la reconnaissance de l'indépendance de ces territoires par la Russie était tout à fait illégale. C'est donc un statut quo complet dans lequel chacun campe fermement sur ses positions. L'élection de la formation Rêve géorgien aux législatives qui ont eu lieu mardi peut-elle changer les relations diplomatiques entre la Russie et la Géorgie? Cela va probablement les améliorer un tout petit peu, mais il ne faut pas non plus attendre de grands bouleversements. Ce que l'on peut espérer, c'est un rapprochement culturel et commercial, qui arrange les deux pays, et les deux populations. Mais d'un point de vue politique et diplomatique, les progrès seront très longs. Il est d'ailleurs assez remarquable de voir la prudence avec laquelle les Russes répondent quand on leur demande ce qui va changer : ils disent que le vainqueur des élections veut aussi se rapprocher de l'Union Européenne, des États-Unis et de l'Otan. Mais il veut aussi se rapprocher de la Russie, a la lui même affirmé en disant qu'on ne changeait pas la géographie, et que la Russie était leur voisin.

En ce qui concerne l'Abkhazie et l'Ossétie du sud, Bidzina Ivanichvili (le leader de la formation Rêve géorgien - ndlr) est sur la même ligne que Mikheïl Saakachvili (l'actuel président au pouvoir), même s'il est dans un rapport moins conflictuel avec la Russie. De toute façon, il ne pourrait pas négocier vis-à-vis de l'opinion publique qui considère que l'Abkhazie et l'Ossétie du sud sont des territoires qui doivent revenir dans le giron national. La phrase clé, c'est "l'intégrité territoriale de la Géorgie", un cliché qui est aussi adopté par les occidentaux. La Russie sait donc parfaitement qu'aucun dirigeant géorgien - à moins qu'il ne soit suicidaire - proposerait dans les années à venir de reconnaître l'indépendance des deux régions autonomes.

Que peut-on attendre des négociations entre la Russie et la Géorgie qui ont repris aujourd'hui à Genève, sous l'égide de l'Union européenne, de l'Onu et de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE)? Dans l'immédiat, ça ne va rien changer. Attendre que la réunion d'aujourd'hui change quelque chose parce qu'il y a eu des élections en Géorgie, c'est très illusoire, puisqu'il n y a pas de pouvoir politique nouveau en place. Je pense que les Russes ont une perception beaucoup plus réaliste que les occidentaux sur ce problème, ils savent qu'il n'est pas prêt d'être réglé. Il faut se rappeler que l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud n'ont pas structuré leur indépendance en 2008 lorsque la Russie l'a reconnue, mais depuis 1991. Pour eux, la question ne se pose même pas, ni pour la Géorgie d'ailleurs. C'est pour ça qu'à Genève rien ne bouge, parce qu'ils campent chacun sur leur position. Au début d'ailleurs, les géorgiens ne voulaient même pas que les Abkhazes et les Ossètes soient représentés à Genève... C'est bien la preuve que la Géorgie non plus ne changera pas d'avis!
L'analyse de Slimane Zeghidour
03.10.2012Les territoires séparatistes georgiens
