David Gressly, coordinateur humanitaire de l'ONU pour le Yémen, lance donc une campagne de financement participatif espérant réunir 5 millions de dollars d'ici fin juin.
Today I launched a @UN crowdfunding campaign because we urgently need funds to start the emergency operation before it is too late. Learn more: https://t.co/H6q5MJWBDg pic.twitter.com/moFtjedoKn
— David Gressly (@DavidGressly) June 13, 2022
Construit en 1976 comme tanker par une compagnie japonaise (Esso Japan), le Safer prend son nom de la SAFER Exploration and Offshore Production Company qui était la compagnie pétrolière numéro 1 du Yemen.
Il est amarré au large de Ras Isa depuis 1988. Il se connecte à l’oléoduc de Marib-Ras Isa et sert également de plate-forme flottante d'extraction et de stockage de pétrole.

Le terminal est fermé depuis le début de la guerre civile au Yémen en mars 2015 et il n’est plus entretenu depuis.
Dès mai 2018, un rapport de l’Observatoire des Conflits et de l’environnement pointait l’état avancé de détérioration du navire et le danger que constituent les 1,14 millions de barils de pétrole qu’il contient. En 2020, le risque d’explosion dûe à l’oxydation de l’air au-dessus des cuves contenant le pétrole a été écarté.
Faire fonctionner le navire coûte 8 millions de dollars par an de combustible spécial uniquement pour maintenir ses chaudières opérationnelles et faire fonctionner ses générateurs, indispensables pour la ventilation qui réduit l’humidité et prévient la corrosion.
"Après l'arrêt des chaudières la grande majorité des équipements et des machines de la citerne s'est arrêtée car elles dépendent toutes de la puissance de la vapeur" expliquait en juin 2020 à Associated Press un responsable de la compagnie pétrolière Yéménite.
Ian Ralby, fondateur de I.R. Consilium, spécialiste de la sécurité et des ressources maritimes connait bien le problème du SAFER qu'il suit depuis des années.
During our webinar last week on the #FSOSafer vessel, Dr. David Soud from @IRConsilium discussed the threats of a leak and combustion & proposed a solution. #Yemen #SalvageTheSAFER. Watch the full webinar here https://t.co/mkRsW4Pmoz pic.twitter.com/C63dB2VezR
— Green Bee Insights (Formerly Mashora Group) (@GreenBeeInsight) September 3, 2020
Dès cette époque, l’expert affirmait que les tentatives de l’ONU pour consolider le bateau étaient "vaines" et que ce dont on avait besoin était tout simplement un sauvetage.
Déjà en 2019, il démontrait pour l'Atlantic Council, le risque de catastrophe écologique majeure que laisse planer le Safer.
Ian Ralby, The Atlantic council, le 11 avril 2019
(RE)voir : Yémen : la solution de cette guerre qui dure "se trouve surtout à Washington, Londres et Paris"
Toute tentative de négociation engagée par l’ONU était au point mort depuis que les Houthis ont pris le contrôle de la capitale Sanaa.
L’ONU estime que si la cargaison se déversait dans la Mer Rouge, plus de 200 000 pêcheurs perdraient leur travail et 20 milliards de dollars seraient nécessaires pour nettoyer.
Les risques d'une marée noire ont été détaillés par Ian Ralby pour le centre d'études The Atlantic council dans un article alarmant en juillet 2019.
"Un tel incident pourrait avoir des effets considérables et hautement destructeurs : usines de dessalement contaminées, privant des dizaines de millions de personnes, certaines déjà au bord de la famine, d'un accès à l'eau potable; la perte d'écosystèmes marins qui pourraient être la clé pour sauver le reste du corail du monde du réchauffement des mers; des millions de Yéménites désespérés ayant littéralement perdu l'aide internationale parce que les installations portuaires sont inutilisables. Sans compter l'impact tangible sur l'économie mondiale de la fermeture temporaire des voies de navigation de la mer Rouge, le déclenchement de conflits armés pour obtenir les produits de première nécessité, et une spirale descendante dans une région déjà fragile."
Les experts d'I.R. Consilium, fondé par Ian Ralby, plaident pour une action rapide et décisive.
Expecting more of the same re #FSO_SAFER from @UN, @OSE_Yemen, @UNReliefChief, @un_council today. Last attempt to get onboard failed, like the many before. We expect the UN to show unwavering commitment to that unsuccessful approach. #SalvageTheSAFER https://t.co/WWnKfGSIKH
— I.R. Consilium (@IRConsilium) June 3, 2021
David Gressly, le représentant de l’ONU pour le Yémen, a obtenu le soutien de la coalition soutenue par l'Arabie saoudite et celui des Houthis.
L’ONU transporterait les 1,1 millions de barils sur la côte. Ils seraient dans un deuxième temps transférés sur un nouveau navire plus sûr. Les Houthis se sont engagés à acheter dans les 18 mois un autre tanker qui remplacerait le Safer qui sera remorqué et ensuite vendu pour de la ferraille.

L'Algérie, l'Arabie Saoudite, l'Autorité palestinienne, le Bahreïn, les Comores, Djibouti, l'Égypte, les Émirats arabes unis, l'Irak, la Jordanie, le Koweït, le Liban, la Libye, le Maroc, la Mauritanie, Oman, le Qatar,la Somalie, le Soudan, la Syrie (suspendue depuis 2011), la Tunisie et le Yémen.
Seuls les Émirats arabes unis ont contribué à la levée de fonds de l'ONU pour le sauvetage du Safer.
L’Arabie Saoudite s’est engagée le 11 juin à offrir 10 millions de dollars.
The Kingdom Provides USD 10 Million to Confront the Potential Economic, Humanitarian and Environmental Threats from the “Safer” Tankerhttps://t.co/d2AACK8MxF pic.twitter.com/cInOAeSktw
— KSrelief (@KSRelief_EN) June 12, 2022
"Il est déplorable que la crise du Safer ne soit toujours pas résolue en raison du manque de soutien financier", regrette dans un communiqué Ghiwa Nakat, directrice de l'ONG pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord.
بعد أيام من رسالة المديرة التنفيذية في غرينبيس @GNakat
— Greenpeace غرينبيس (@GreenpeaceAR) June 13, 2022
الى أمين عام جامعة الدول العربية لحثّ الدول الأعضاء على عقد اجتماع طارئ لتمويل ناقلة النفط صافر، أعلنت #السعودية بتوفير ١٠ ملايين دولار.#FSOSAFER #Yemen #صافر #اليمن #خزان_صافر https://t.co/HejYLsCVrA
Selon elle, "un seul" des États arabes a jusqu'à présent contribué, alors même qu'une catastrophe les toucherait "en premier lieu".
Greenpeace Moyen-Orient en fait sa cause numero 1 et parle d'une "bombe à retardement".
L'ONG résume ainsi l'impact qu'aurait une marée noire dans la mer Rouge. Cette catastrophe environnementale "détruirait les moyens de subsistance limités des communautés côtières pauvres du Yémen qui dépendent de la pêche, aurait un impact sur la santé, dévasterait les récifs coralliens à proximité, obstruerait les usines de dessalement qui fournissent de l'eau potable à des millions de personnes dans la région. Les conséquences seraient desastreuses pour le conflit yéménite."
Mais il faut agir vite, avant l'hiver, comme le soulignait la représentante de l'ONU pour le développement du Yémen, Auke Lootsma, car le mauvais temps pourrait compliquer les opérations de sauvetage et augmenter les risques de rupture du navire : "le financement et la rapidité d'action sont indispensables".