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©Maeva Defroyenne
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Accès à l'avortement : un droit inégal ?

De nombreux rassemblements ont eu lieu à travers le globe, à l’occasion de la Journée mondiale pour le droit à l’avortement. Légalisé dans cinquante-cinq pays, l’accès à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) reste inégal. Souvent au coeur des enjeux politiques, ce droit est menacé dans de nombreuses nations marquées par le retour en force des courants ultra-conservateurs. En 2017, 42% des femmes n'y avaient pas accès. En 2019 où en est-on?
Cette année, la journée mondiale pour le droit à l’avortement a un goût amer. Elle intervient alors que la journaliste marocaine Hajar Raissouni est poursuivie, par le tribunal de Rabat, pour "avortement illégal" et "relations sexuelles  hors mariage". Une affaire qui soulève une vive émotion dans le pays. Des centaines de femmes - relayées par des milliers dans les jours qui ont suivi- ont publié une tribune dans laquelles elles défendent la liberté de disposer librement de leur corps, dont celui d’avorter."Nous sommes hors-la-loi. Nous violons des lois injustes, obsolètes, qui n'ont plus lieu d'être. Nous avons eu des relations sexuelles hors mariage. Nous avons subi, pratiqué ou été complices d'un avortement", affirment-elles dans cette tribune.

Mais le Maroc ne fait pas figure d’exception. En 2019, seuls 55 pays autorisent les femmes à avorter (librement). Dans la quasi-totalité des pays d’Afrique, d’Amérique du Sud, du Moyen-Orient ou encore d’Asie du Sud, l’IVG est illégale ou fortement restreinte et sévèrement condamnée par la loi. Une triste réalité qui fait écho à l’histoire d’Evelyn Hernandez, une jeune salvadorienne – tombée enceinte à la suite d’un viol -condamnée à 40 ans de prison pour "homicide"alors qu’elle l’a assuré, le bébé était mort-né. Aujourd'hui acquittée, la jeune salvadorienne n'en est pas pour autant sortie d'affaire. Le parquet a fait appel pour que son acquittement soit réexaminé.

Le Salvador possède l’une des législations les plus strictes en matière d’avortement. Considéré comme un "homicide aggravé", il  peut entraîner jusqu’50 ans de prison.
Retrouvez notre article > Evelyn Hernandez acquittée mais l'avortement reste toujours un délit au Salvador
CARTE AVORTEMENT MONDE
L'accès à l'avortement dans le monde.
©TV5MONDE
 

Les États-Unis font marche arrière

Si l’IVG est aujourd’hui l’un des sujets les plus clivants, il l’est particulièrement aux États-Unis. L'aile conservatrice du Parti Républicain est clair sur sa volonté de l’interdire, une opinion particulièrement visible depuis l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis. En ce sens, de nombreux états – à l’image de l’Alabama en mai dernier – sont de plus en plus offensifs au sujet l’IVG. Il est pourtant rendu légal par la Cour suprême depuis 1973.

Et l’IVG a bien failli être au cœur des élections fédérales canadiennes prévues le 21 octobre. Le Premier ministre canadien Justin Trudeau l’a assuré lors d’une conférence de presse, "quiconque se présente pour le parti libéral du Canada va toujours défendre les droits des femmes". Il  a ensuite ajouté, "j’encourage le chef des conservateurs à être aussi clair que cela", un pic clairement lancé à son principal rival, le conservateur Andrew Scheer. De son côté, Andrew Scheer se veut rassurant sur ce point : "les conservateurs ne vont pas relancer ces questions (avortement et mariage homosexuel), les Canadiens peuvent en être assurés", en réponse aux rumeurs d’une possible loi anti-IVG. A noter tout de même que plusieurs députés officiellement Pro-vie font partie de son camp  et qu'il a lui-même toujours voté contre des amendements en faveur de l'IVG. Il y a quelques mois lors d'un vote à l'Assemblée, les députés conservateurs avaient préféré rester ostensiblement assis pour montrer leur désaccord, alors que les libéraux s'étaient levés pour applaudir un texte consolidant l'accès à l'IVG au Canada.
 

47.000 décès par an

Derrière l’interdiction de l’IVG se cachent une autre réalité. Dans les pays où l'IVG est interdite, les femmes sont contraintes d'avoir recours à des méthodes clandestines et souvent dangereuses qui ne répondent pas aux normes médicales les plus élémentaires. Entre 2010 et 2014, près de 30 millions d’IVG ont été pratiquées de façon non sécurisée, selon l’ONU. Un problème de santé publique majeur, puisque ces pratiques entraînent la mort de 47 000 femmes par an.

Et en Europe ?

En Europe, l’avortement est légalisé dans la plupart des pays et reste le continent où il est le plus facile d'avorter. Aujourd’hui seuls Malte, la principauté d'Andorre et le Vatican l’interdisent. L’Irlande est le dernier pays en date, à avoir légalisé l’IVG, après un référendum en 2018, où 66% des électeurs ont voté en faveur de sa légalisation.
 Pour autant, dans les autres pays européens, la situation est loin d’être idéale. La Pologne, si elle ne l’interdit pas, n’autorise la pratique de l’IVG qu’en cas de viol, d’inceste, de danger pour la mère ou de malformation du fœtus. Une dernière condition que les ultraconservateurs ont souhaité abroger dans un projet de loi proposé en 2018.
Du côté de l'Espagne, l'accès à l'IVG est moins restrictif. Les jeunes femmes mineures ne peuvent cependant pas y avoir accès sans l'accord de leurs parents.

En Belgique, en France ou encore en Italie - où l'IVG est légale depuis parfois plus de 40 ans -les médecins sont libres de refuser de la pratiquer . Ils sont d’ailleurs de plus en plus nombreux à user de ce droit. En Italie, 70% d’entre-eux refusent aujourd'hui d'avoir recours à l'interruption de grossesse, ce qui inquiète beaucoup les défenseur.e.s des droit des femmes.  

Député belge du parti démocrate fédéraliste indépendant (DéFI), Sophie Rohonyi a affirmé, sur le plateau de TV5MONDE, "l’avortement n’est plus une faute morale mais un acte médical", tout en annonçant vouloir "assouplir les conditions qui entourent le délai légal et le délai de réflexion".
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 A ce sujet, la Cour européenne des droits de l’homme reste vague, chaque état peut "légitimement choisir de considérer l’enfant à naître comme une personne et protéger sa vie".