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Affaire Carlos Ghosn : l'ex-PDG de Nissan et Renault est sorti de prison

L'ex-grand patron de l'automobile aujourd'hui déchu, a été libéré mercredi 6 mars de la prison de Kosuge à Tokyo, après plus de 100 jours passés en détention sur des accusations de malversations financières. Via son avocat, Carlos Ghosn a payé une caution d'environ 8 millions d'euros. Le ministre français de l'Économie estime que "c'est une bonne chose".  Marie Vallerey a recueilli la réaction de l'avocat de Carlos Ghosn.

Vêtu d'un blouson barré de bandes réfléchissantes oranges, portant un masque sanitaire blanc, une casquette bleue et des lunettes, l'ex-patron de Renault et Nissan est sorti du centre de détention encadré de gardiens avant de s'engouffrer dans une voiture gris clair banalisée, avec un de ses avocats japonais, devant les objectifs de dizaines de caméras et appareils photo.

Sa femme Carole, une de ses filles, l'ambassadeur de France et d'autres personnes étaient arrivées à la prison plusieurs heures auparavant, mais ne sont pas ressorties en même temps.

Le tribunal de Tokyo avait accepté mardi la remise en liberté de l'ex-PDG et un deuxième juge avait rejeté dans la nuit de mardi à mercredi un appel lancé par le procureur.
 

"Je suis innocent et résolument déterminé à me défendre vigoureusement dans un procès équitable contre ces accusations sans fondement", avait déclaré Carlos Ghosn dans un communiqué en apprenant la décision mardi.

Des dizaines de journalistes s'étaient rassemblés dès l'aube mercredi devant la prison. 

Il est très rare au Japon qu'une personne inculpée pour abus de confiance soit libérée avant que ne soit connue la date de son procès ou même avant qu'il n'ait débuté. Les experts expliquent que le nouvel avocat de M. Ghosn a vraisemblablement offert des garanties qui ont convaincu le juge que le magnat franco-libanais-brésilien serait dans l'incapacité totale de détruire des preuves ou de quitter le pays.

"Procès équitable"

Afin d'arracher l'approbation du juge, Junichiro Hironaka, nouvel avocat japonais de M. Ghosn qui a remplacé Motonari Otsuru, un ancien procureur, il y a moins d'un mois, a suggéré que son illustre client soit placé sous la surveillance de caméras et dispose de moyens limités de communication avec l'extérieur.

"Nous avons proposé un dispositif qui rend impossible une évasion ou la suppression d'informations", a insisté mardi Me Hironaka, réputé pour avoir obtenu l'acquittement de plusieurs clients de haute volée.

Il a suggéré que M. Ghosn donne une conférence de presse dès que possible.

Mécontent du rejet de précédentes demandes de libération sous caution, Carlos Ghosn avait décidé de changer mi-février son équipe de défense japonaise, au moment d'aborder la phase de préparation de son procès qui n'interviendra pas avant plusieurs mois. 

La libération de M. Ghosn va permettre à l'ancien PDG de Renault de "se défendre librement et souverainement", a réagi le ministre français de l'Economie, Bruno Le Maire, estimant que c'était "une bonne chose".

"Il est essentiel de protéger le principe de la présomption d'innocence et de laisser à chacun la liberté de se défendre dans les meilleures conditions possibles", a-t-il ajouté.

"Je suis impatient de pouvoir me défendre, avec vigueur", avait déclaré Carlos Ghosn alors qu'il se trouvait toujours en prison disant non seulement "vouloir rétablir son innocence, mais aussi à faire la lumière sur les circonstances qui ont conduit à une injuste détention".

"Complot"

Celui qui était vénéré au Japon pour avoir sauvé Nissan avait été arrêté le 19 novembre 2018 à Tokyo et placé dans le centre de détention de Kosuge, dans le nord de la capitale.

M. Ghosn a été inculpé pour minoration d'une partie de ses revenus pour un montant de 9,23 milliards de yens (74 millions d'euros) de 2010 à 2018, dans les rapports de Nissan remis aux autorités boursières. Il a également été inculpé pour abus de confiance.

Fin janvier, lors d'un entretien accordé en prison à l'AFP, il avait dénoncé sa détention prolongée, un traitement qui "ne serait normal", selon lui, "dans aucune autre démocratie".

Il estime avoir été victime d'un "complot" ourdi par Nissan pour faire échouer son projet de rapprochement avec Renault.

Nissan, à l'origine de l'enquête ayant conduit M. Ghosn en prison, a déclaré mardi dans un message transmis aux médias qu'il "ne joue aucun rôle dans les décisions prises par les tribunaux ou les procureurs et n'est donc pas en position de commenter".

"Les investigations menées en interne chez Nissan ont montré des conduites (de M. Ghosn) manifestement contraires à l'éthique (...) et d'autres faits continuent d'émerger", a ajouté le constructeur, au chevet duquel était arrivé M. Ghosn en 1999.

La libération de Carlos Ghosn "n'a pas de conséquences sur les affaires de Nissan", a assuré l'actuel directeur général du groupe, Hiroto Saikawa.

En théorie, Carlos Ghosn, qui est toujours en titre administrateur de l'entreprise, pourrait assister à un conseil d'administration, mais cette possibilité risque de lui être refusée par le groupe.