Tolérance ? La Scandinavie ou l'Allemagne, en revanche, ne jouent pas dans la même cour. Dans ces pays du Nord, à la culture luthérienne, il serait très difficile de revenir sur le devant de la scène politique après une affaire comme le dossier Bettencourt et ses ramifications. « Les scandales financiers et de corruption font ici plus de morts que de vivants », explique Vibeke Knoop Rachline, correspondante du quotidien norvégien Aftenposten. Et de citer l'exemple de Terje RØd Larsen, ancien ministre norvégien du Plan, qui fut aussi l'un des négociateurs des
accords d'Oslo, contraint de démissionner après la révélation du scandale Fideco : grâce à un délit d'initié, il avait réalisé 600 000 couronnes de bénéfices. Encore actif sur le plan international, il n'a plus aucune chance en Norvège. Quant à Victor Norman, ancien ministre du Travail, il s'est vu reprocher d'avoir acheté un piano avec les deniers publics. Sa carrière politique est terminée. « Nous sommes très à cheval sur les principes de crédibilité et d'honnêteté, explique Vibeke Knoop Rachline. Nous exigeons de nos dirigeants politiques, comme de tout le monde, d'ailleurs, qu'ils soient incorruptibles et irréprochables sur le plan financier. Jamais un journaliste ne pourrait envisager d'accepter un voyage payé par un tiers, par exemple. » Certains, pourtant, semblent avoir eu droit à l'erreur, comme Bård Hoksrud, un député du Parti du progrès surpris sortant d'un bordel à Riga, en Lettonie, alors que les clients de prostituées sont pénalisés par la loi norvégienne, dans le pays, mais aussi à l'étranger. « Le scandale a été retentissant, mais il est revenu en politique », constate la correspondante. L'influence de la religion jouerait-elle son rôle dans la tolérance d'un pays face aux abus de ses dirigeants ? En Europe du Nord, protestante et luthérienne, droiture et transparence sont les mots d'ordre. En revanche, dans les pays catholiques, où l'Eglise n'a pas toujours donné le bon exemple, les frontières entre l'acceptable et l'intolérable sont plus floues, suggère Anna Merlo Ponti : « L'influence du Vatican a longtemps été perceptible sur la Démocratie chrétienne et le pouvoir, à Rome. Or aujourd'hui, le jésuite argentin - surtout jésuite – (le pape François, ndlr) est en train de faire le ménage en remuant d'énormes scandales financiers. Cela aide le gouvernement italien à s'affranchir de liens délétères et du mélange des genres, surtout en matière de finances. »