Fil d'Ariane
Dix jours après la réouverture des universités privées du pays, le ministère de l'Education afghan a annoncé vendredi que "tous les professeurs hommes et les élèves" du secondaire allaient retrouver leur établissement, sans faire aucune mention des enseignantes ou des collégiennes et lycéennes.
Ce flou risque d'alimenter un peu plus encore l'inquiétude d'une partie de la population afghane et de la communauté internationale qui redoutent de voir se reproduire le même scénario que lors du premier passage au pouvoir des fondamentalistes, entre 1996 et 2001.
Le mouvement islamiste avait mené une politique particulièrement brutale à l'égard des femmes, qui n'étaient pas autorisées à travailler, étudier, faire du sport ou encore sortir seules dans la rue.
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Après le départ des talibans chassés par une coalition internationale emmenée par les Etats-Unis, les femmes avaient progressivement pu récupérer leurs droits fondamentaux et accéder à des métiers qui leur avaient été interdits, comme juge, parlementaire ou encore pilote.
"L'Unicef se félicite de la réouverture des écoles secondaires en Afghanistan, mais souligne que les filles ne doivent pas être laissées de côté", a réagi vendredi la directrice exécutive de l'agence onusienne, Henrietta Fore. "Il est essentiel que toutes, y compris les plus âgées, puissent reprendre leur éducation sans plus de retard, et que les enseignantes puissent elles aussi continuer à enseigner", a insisté l'Unicef dans un communiqué, rappelant les "progrès considérables dans le pays au cours des deux dernières décennies".
En l'espace de vingt ans, le nombre d'écoles a triplé et le nombre d'enfants scolarisés est passé de 1 million à 9,5 millions, selon l'agence onusienne.
En Afghanistan, les femmes manifestent pour ne pas devenir invisibles
L'agence des Nations unies pour l'éducation et la culture, l'UNESCO, a appelé samedi à la réouverture des écoles pour les filles en Afghanistan, mettant en garde contre des "conséquences irréversibles" pour la moitié de la population du pays.
Seuls les collégiens et lycéens afghans étaient autorisés à reprendre le chemin de l'école samedi. "Si cette interdiction (pour les filles) devait être maintenue, elle constituerait une violation importante du droit fondamental à l'éducation des filles et des femmes", a dénoncé l'Unesco dans un communiqué.
"Nous appelons les responsables de cette annonce à clarifier la situation et à rouvrir les écoles pour tous les élèves afghans, garçons et filles".
L'Unesco met en garde contre les conséquences irréversibles que pourrait engendrer le fait de ne pas permettre aux filles de retourner rapidement à l'école à tous les niveaux d'enseignement
Communiqué de l'Unesco
La directrice de l'Unesco, Audrey Azoulay, estime dans le même communiqué que "l'avenir de l'Afghanistan dépend de l'éducation des filles et des garçons" et ajoute qu'il "est tout aussi important que l'ensemble des enseignantes soient autorisées à retourner à l'école pour enseigner, offrant ainsi un environnement d'apprentissage sûr et inclusif".
"L'Unesco met en garde contre les conséquences irréversibles que pourrait engendrer le fait de ne pas permettre aux filles de retourner rapidement à l'école à tous les niveaux d'enseignement", poursuit Mme Azoulay.
"Plus particulièrement, un retour retardé des filles dans l'enseignement secondaire risque de les mettre à l'écart dans l'éducation et, à terme, dans la vie. Cela augmente le risque d'abandon complet de leur éducation et les expose à des mécanismes d'adaptation négatifs tels que le mariage précoce", ajoute-t-elle.
"Notre engagement envers les enfants afghans est sans équivoque, et notre responsabilité collective est de veiller à ce que le droit fondamental à l'éducation de chacun d'entre eux soit pleinement respecté".
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Depuis leur retour au pouvoir, les talibans ont tenté de rassurer la communauté internationale en assurant entre autres que les droits des femmes seraient respectés.
Mais ces affirmations ont été fragilisées ces dernières semaines par plusieurs décisions prises par le nouvel exécutif afghan.
Les femmes conservent certes le droit d'étudier à l'université, mais elles devront pour cela porter une abaya ainsi qu'un hijab et les cours se feront dans la mesure du possible en non-mixité.
Aucune femme ne figure par ailleurs au sein du nouvel exécutif provisoire présenté début septembre.
Quant au ministère de la Promotion de la vertu et de la Prévention du vice, craint pour son fondamentalisme durant le premier épisode taliban, il semble désormais occuper les locaux de l'ancien ministère des Affaires féminines.