Argentine : Javier Milei est investi président

En présence de plusieurs dirigeants, responsables conservateurs ou nationalistes, de l'Ukrainien Volodymyr Zelensky, l'ultralibéral Javier Milei est investi ce 10 décembre président de l'Argentine. Le pays s'apprête à de durs ajustements pour sortir l'économie d'une crise sans fin. D'emblée, il a annoncé que la situation économique dans le pays allait "empirer" à court terme et promettant un "choc" d'austérité.

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Des partisans du président argentin entrant Javier Milei se rassemblent à l'extérieur du Congrès avant la cérémonie d'investiture à Buenos Aires, le 10 décembre 2023.

AP Photo/Rodrigo Abd
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Javier Gerardo Milei, 53 ans, est devenu le douzième président de l'Argentine depuis le retour de la démocratie il y a 40 ans, couronnant sa spectaculaire ascension. Élu député en 2021, l'économiste jadis panéliste prisé des plateaux TV a renversé la politique argentine en balayant les partis traditionnels.

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Après avoir prêté serment au Parlement, Milei a prononcé son premier discours de président. Symboliquement non pas devant les parlementaires mais depuis les marches du Parlement où il a appelé sur son compte X les Argentins à venir en masse. "Apporte ton drapeau, Argentine !", accompagné de son slogan fétiche "Vive la Liberté, bordel !

"Il n'y pas d'alternative à un ajustement, il n'y a pas d'alternative à un choc" en matière budgétaire, car "il n'y pas d'argent !", a lancé Javier Milei à une foule de partisans, réunis devant le Parlement, où il venait de prêter serment.

Ce 10 décembre au matin, une foule modérée se massait peu à peu sur la place du Parlement, mélange de maillots de la sélection argentine, et de drapeaux argentins, sous un soleil tôt ardent. Il parcourra ensuite, en décapotable, voire en partie à pied, les deux kilomètres jusqu'à Casa Rosada, la présidence, où il recevra les dignitaires étrangers, puis la prestation de serment de son gouvernement. Une équipe à ce stade restreinte à neuf ministres, conformément à sa promesse d'austérité de l’État.

Quelles mesures face à l'inflation ?

Le président élu a indiqué qu'il convoquerait dès les prochains jours une session extraordinaire du Parlement pour présenter un premier bloc de lois. Dévaluation du peso, la monnaie nationale, notoirement surévalué ? Premières coupes budgétaires, notamment les chantiers publics dans le collimateur ? Restriction, voire interdiction d'émission monétaire par la Banque centrale, qu'il veut à terme éliminer ?

"Électrochoc" ou "choc contrôlé", les premières mesures Milei et leur degré ont fait ces derniers jours l'objet de spéculations, sans que rien ne filtre de l'équipe du président élu. Une seule certitude : l'inflation, déjà intolérable à 143% sur un an, va continuer pour la troisième économie d'Amérique latine.

Il est très probable que l'inflation de décembre dépasse celle de novembre et celle de janvier celle de décembre.

Viktor Beker, économiste de l'Université de Belgrano

"La nouveauté pour les gens va être pour la première fois depuis longtemps des prix "libres", avec la fin des programmes dit "prix encadrés"" que négociait tant bien que mal le gouvernement sortant (centre-gauche) avec les fournisseurs, estime Viktor Beker, économiste de l'Université de Belgrano. "D'où certainement une forte hausse des prix. Il est très probable que l'inflation de décembre dépasse celle de novembre (+8,3%, NDLR) et celle de janvier celle de décembre", ajoute-t-il.

"Pas de place pour la tiédeur"

Dès après sa victoire retentissante, Javier Milei a prévenu qu'il n'y aurait "pas de place pour la tiédeur ou les demi-mesures". Mais a aussi douché certaines attentes, prévenant que l'inflation ne serait pas maîtrisée avant "18 à 24 mois". Le porte-monnaie des Argentins pourra-t-il encore le supporter ? Nombre de jeunes, qui ont constitué le cœur de l'électorat Milei, ont dit ces jours-ci être prêts à lui laisser du temps "car la situation n'est pas facile".

C'est une crise profonde, il faut lui donner du temps.

Maria Guazu

"On a beaucoup d'attentes, c'est un changement ! Mais c'est une crise profonde, il faut lui donner du temps", confiait aux abords du Congrès Maria Guazu, 60 ans, venue de Tucuman, à plus de 1 200 km, pour l'investiture. Restent hors champ, pour l'heure, certaines postures controversées du candidat Milei : son opposition à l'avortement légalisé en 2021, ou son déni du changement climatique comme "responsabilité de l'homme".

Ce qui compte c'est l'économie, et redresser les comptes budgétaires, avec un objectif difficilement croyable "d'équilibre à fin 2024" (le déficit était de 2,4% du PIB fin 2022). Carlos Felipe Jaramillo, vice-président de la Banque mondiale pour l'Amérique latine, a rencontré ces jours-ci l'équipe Milei, et dit avoir "un diagnostic très similaire" sur la "nécessité d'attaquer le problème budgétaire, cause clef de l'inflation". Mais il a aussi dit "l'inquiétude (de la BM) sur le problème de la pauvreté, et sa possible accentuation à court terme", dans un pays où 40% vivent déjà sous le seuil de pauvreté.

Plusieurs chefs d'État présents

L'investiture de Milei se fera sous le regard bienveillant de dirigeants ou politiciens de droite nationalistes, qui très tôt avaient exprimé soutien et affinité à l'ultralibéral argentin élu. Ainsi ,l'ex-président d'extrême droite brésilien Jair Bolsonaro, le Premier ministre hongrois Viktor Orban, le chef de la formation espagnole d'extrême droite Vox, Santiago Abascal. 

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky est arrivé dimanche en Argentine, d'où il a annoncé, sur son compte X, avoir un entretien téléphonique avec le président français Emmanuel Macron. Zelensky s'était entretenu fin novembre avec Milei, et l'avait "remercié pour sa position claire. Pas d'équilibre entre le bien et le mal. Juste un soutien clair à l'Ukraine".

Parmi les autres chefs d’État et de gouvernement présents: le roi d'Espagne Felipe VI, et les voisins de l'Argentine: l'Uruguayen Luis Lacalle Pou, le Chilien Gabriel Boric, le Paraguayen Santiago Peña. Le Brésilien Lula, vivement critiqué par Milei par le passé, a envoyé sa cheffe de la diplomatie. La France est représentée par le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Stanislas Guerini.