
Fil d'Ariane
- Accueil >
- International >
- Yémen : le chaos >
- Armes françaises au Yémen : " Si on ne veut pas de...
La ministre des Armées, Florence Parly, a répété ce jeudi 18 avril que ces armes sont utilisées à des fins défensives et non offensives. Elle a aussi déclaré "ne pas avoir d'éléments de preuve" montrant que ces armes de fabrication française auraient fait des victimes civiles au Yémen.
TV5MONDE : Selon le gouvernement français, ces armes françaises sont utilisées à des fins défensives et non offensives dans la guerre au Yémen. Peut-on parler d'une opération de communication de la part du gouvernement ?
Jean-Dominique Merchet : C'est effectivement une opération de communication de dire que nos alliés se défendent contre une agression et qu'ils utilisent ces armes pour se défendre. Lorsqu'on va bombarder une ville, lorsqu'on envoie des chars dans une autre ville, est-ce qu'on considère que c'est de l'attaque ? Non. C'est vraiment un discours politique de justification des opérations de nos alliés au Yémen, et rien de plus. Cela n'a pas de sens, pas de valeur militaire.
TV5MONDE : Certains politiques dénoncent "un mensonge d'Etat". Qu'en pensez-vous ?
Jean-Dominique Merchet : Dire que c'est un mensonge d'Etat, c'est peut-être beaucoup. Je dirais que c'est plutôt une incapacité politique à assumer ce que l'on fait, ce que la France fait. Il est clair que la France vend des armes à ses alliés et que ses alliés les utilisent dans la guerre qu'ils mènent contre des groupes au Yémen. La France a du mal à le dire, parce c'est une sale guerre au Yémen. C'est une guerre où il y a une situation humanitaire absolument catastrophique.
De plus nos amis, nos alliés sont notamment les Saoudiens et ils n'ont pas une très bonne image, surtout depuis l'affaire de ce journaliste saoudien exécuté : Jamal Khashoggi.
On sait que ces ventes d'armes françaises ont lieu. Les ventes d'armes ne se font pas secrètement en réalité. Elles passent devant des commissions, il y a des rapports parlementaires. On sait que l'Arabie saoudite est le premier client de l'industrie française de l'armement et que toutes les ventes d'armes, sans exception, se font avec l'autorisation du gouvernement. Ce n'est donc pas une découverte spectaculaire.
Le rapport qui a été dévoilé par cette ONG Disclose est très intéressant, parce que c'est un rapport de la Direction du renseignement militaire. Mais ce rapport ne fait que décrire et confirmer une situation que tout le monde supposait, il ne révèle pas des choses qu'on ignorait totalement.
TV5MONDE : Qu'est-ce que des armes défensives ? A quoi servent-elles sur le terrain ?
Jean-Dominique Merchet : Les armes défensives ? Je dirais que c'est surtout la manière dont on les emploie sur le terrain. Quand un pays fait la guerre, ce que font les Saoudiens et les Emiratis eu Yémen, il y a ce que l'on appelle des postures défensives et des postures offensives.
On fait de la politique en disant qu'on se défend, on ne dit jamais qu'on attaque un pays, on dit qu'on se défend contre une agression venant de ce pays et que c'est pour cette raison qu'on attaque. Tout cela est un jeu politique, plus qu'une réalité militaire. Effectivement, les armes servent à faire la guerre, par conséquent quand un pays en guerre achète des armes c'est pour s'en servir, parfois de manière défensive, parfois de manière offensive.
TV5MONDE : De nombreuses ONG internationales dénoncent régulièrement les ventes d'armes française à l'Arabie saoudite et aux Emirats arabes unis. D'après vous, pourquoi la France refuse de stopper ses exportations ?
Jean-Dominique Merchet : La France fait une politique sans vraiment l'assumer de manière publique, parce que la question des ventes d'armes est devenue une question politiquement sensible dans nos sociétés, sur des théâtres de guerre comme le Yémen.